Catégorie : Souris-verte orange
Le bal de l’école des Chartes
Parce que je suis à présent en vacances, que j’ai rendu cette sublime dissertation et que je me suis installé avec mon portable sur la table basse du salon, porte-fenêtre ouverte et soleil rentrant à flots (vous n’avez qu’à imaginer que le bruit de la gare suggère le clapotis de l’eau – y’a pas marqué Aragon, tout de même), j’ai décidé que j’allais faire un post. (ou comment faire une chute dès son entrée en matière). Histoire de vous raconter le bal de l’école des Chartes avant de changer d’ambiance et d’aller en boîte ce soir (pour achever de se faire de belles cernes et se lamenter que, décidemment, la prépa ça vous crève).
Déjà pour ceux qui n’auraient pas de Teckel hypochartiste pour leur expliquer, l’école des Chartes est une grande école qui prépare les futurs grands historiens. Déjà en prépa, ils apprennent par cœur les mots latins (oui, le fameux petit livre bleu, celui que j’ai du feuilleter deux fois depuis le début de l’année, le même que celui qui dort dans votre armoire), font des devoirs sur les principautés méridionales, commncent à parler latin entre eux et peuvent vous narrer par le menu détail la fin émoustillante croustillante de Louis je-ne-sais-plus-combien – à moins que ce ne soit un Henri (là je sens le Teckel qui va arriver et me dire « Meuh non, c’est un Charles !). La seule prépa où l’on trouve des bicas, qui non content d’avoir cubé, refont une troisième deuxième année. Voilà pour vous faire peur et pour comprendre pourquoi les affiches indiquaient « Latrinae » et « Nolite fumare ». Mais sachez que ces élèves (les prépas, pas les chartistes, quoique dès que le Teckel intégrera, il se pourrait que ça change…) pratiquent aussi de saines activités comme la danse du jardinier. Bref.
Nous arrivons au musée Carnavalet après moultes aventures, incluant dans un total désordre chronologique : trois essais de coiffure pour finalement revenir au premier, un faux ongle qui se décolle en plein milieu d’un couloir de métro, une accélération en talons hauts (pas aiguille tout de même, il ne faut pas charier), des regards bizarres sur les bouts de robe de soirée qui dépassent (avec mon Easpack bleu pétant sur les épaules, c’est un oxymore visuel du plus bel effet *hem*). Nous arrivons donc, fraîches comme des roses – rosée incluse, parce qu’il est toujours plus amusant de sortir du métro précisement au moment où il se met à pleuvoir. Délestage au vestiaire : on retrouve un minimum de classe. Avancez à l’intérieur… discours d’inauguration (parce que nous sommes en retard, mais ponctuelles – c’est un concept)… et l’ouverture du bal par une valse. Là, un instant, vous vous demandez ce que vous faîtes là, au milieu de sublimes robes de soirées avec des vrais normaliens, chartistes, grands élèves divers dedans et de polytechniciens en uniforme. Après l’épreuve du faufilage entre les couples où les athéniens s’attegnirent, nous abordons les rives opposées où l’on retrouve la tribu du Teckel (et le buffet- comment ça je suis un estomac sur pattes ? –parfaitement, j’assume). Les discussions s’engagent, avec une certaine précaution sur l’emploi du « tu » ou « vous », la robe de soirée ayant un effet vieillissant assez étonnant. Entre deux mots avec des khâgnes d’HIV, vous élaborez le patron de la robe de vos rêves : le croisé surmontant une ouverture « goutte » de telle robe noire le dispute à un sublimissime corset rouge, lequel se perd au milieu de robes bustiers, décolletées, d’étoles négligemment jetées sur les épaules, à distance respectueuse de la coupe de champagne.
Puis nous avons fait l’expérience de danser en robe de soirée avec des talons. Parce que oui, la valse ne dure qu’un temps. Le rock mode rallye versaillais a plus de mal à être éradiqué, mais on arrive à cotoyer les couples sans trop de dommages collatéraux. Nonobstant la robe bustier ayant une fâcheuse tendance à vous faire regretter de ne pas avoir un bonnet en plus histoire que cela tienne bien en place, ainsi que les pieds prenant une douce coloration rouge, il est parfaitement possible de danser. Pour la danse d’ailleurs, mention spéciale au disciple de Micheal Jackson, un étudiant en médecine ce me semble. Ouverture de parenthèse à propos des étudiants en médecine. Quand un ami m’a demandé s’il y avait des gens « normaux » (attention, différent de normalien), j’ai eu le malheur de répondre « oui » avec en apposition « des gens à la fac, des étudiants en médecine… ». Réponse immédiate : « parce que ce sont des gens normaux ? ». Pendant les vacances je vais aller réviser ma définition de la normalité, les transports en commun sont une excellente zone d’étude pour cela. Fermeture de la parenthèse.
J’ai du partir relativement tôt pour cause de répétition de danse le lendemain, aussi ai-je abandonné le Teckel ses chaussures à la main – les talons demandent décidemment un entraînement de haut niveau qu’il nous faut encore pratiquer. Somme toute, ce fût assez amusant de jouer aux jeunes filles clââaaasses. Et non, vous n’aurez pas de photo, je ne voudrais pas ruiner tout ce que je viens d’écrire.
Le Teckel, je suis prête à t’accompagner de nouveau l’année prochaine. ^^
Et caetera
Je ne suis pas là.
Vous ne faites pas partie de la LS1, vous avez échappé à :
– mes jérémiades sur « Philosopher en vers, c’est vouloir jouer aux échecs selon les règles du jeu de dames ». Valéry
– l’explication des anticyclones à une classe qui n’a pas fait de science depuis 3 ans.
– 5h 30 de DS de philo
– la nouvelle julienne de légume de la cantine
– un contrôle coup bas tellement il était surprise OU comment se faire accueillir un lundi matin à 8 heures par l’onomastique proustienne vue par Barthes.
Vous ne faites pas partie de la HK1, vous avez loupé :
– le come back de Hugh Grant avec un déhanché parfaitement pop
– l’effeuillage des marguerites pendant les deux heures menant au latin
– des conversations fort féminines à la cantine
– un anniversaire fort sympathique à Paris
Vous n’êtes pas moi, vous avez échappé à/ loupé (je ne veux pas savoir ce que vous choisissez comme option) :
– un spectacle de danse dans une maison de retraite, parfaitement drôle puisqu’il y avait à peu près autant de place que dans ma chambre pour danser.
– le premier spectacle de la compagnie ELEGANZA (association montée avec des amies)
– le bal de l’école des Chartes
Vous n’en avez rien à faire, mais vous risquez fortement de ne pas y couper :
– Lire toutes ces péripéties en retard pendant les vacances.
Vous en rêvez, même Sony ne l’a pas fait :
– Me faire taire.
Le temps retrouvé
Surtout ne chercher aucune logique. J’ai passé ma matinée du samedi à danser. Le début d’après-midi a été consacré à une révision efficace d’un contrôle d’allemand imminent. Puis nonobstant les réjouissances de la semaine à venir, (i.e.
– un commentaire sur Proust à présenter à la classe –en passant après l’exposé de la madeleine parfaitement réussi, c’est plus drôle
– une khôlle d’histoire –programme cumulatif
– une préparation de commentaire d’anglais sur Shakespeare
– un contrôle de géographie française – mais le camembert a dépassé le Brie de Meaux, donc nous sommes sauvés ), nonobstant cette énumération passant et repassant dans mon esprit pour finir par être aussi emmêlée que les guirlandes électriques de Noël ayant séjourné un an à la cave, je laisse tout en plan pour rejoindre à Paris trois amies prépaïennes, et non pas simplement hypokhâgneuses, puisque contrairement à Clio et Melpomène, Polymnie est chartiste. Cette subtilité ne nous a pas empêché de traîner ensemble un temps infini au milieu des livres ; à apercevoir toutes nos lectures en retard sur les listes de khôlles, à repérer les délices de l’été lointain, à farfouiller dans les bac d’occasion, en parcourant les rangées à arrêter le regard sur les petites étiquettes jaunes, à déplorer le prix des livres neufs, à comparer les éditions et les couvertures, à conseiller tel ou tel bouquins, faire une remarque acerbe ou élogieuse sur tel ou tel autre, à découvrir le concept de la cuisine des séries (un plat par série télévisée… vous prendrez bien un dallas ?) ou au détour d’un présentoir le regard accusateur de Max Weber.
Un combat cornélien s’engage entre la raison qui vous rappelle avec un cartésianisme implacable que les Illusions perdues et l’Assommoir sont en train de prendre la poussière à votre chevet, et l’envie d’acheter le magasin entier. Je décline chaque ouvrage qu’on m’indique en invoquant le manque de temps. Les assauts répétés des pavés ont raison sur la mienne : avec une petite pierre déculpabilisatrice de Proust, j’emporte ma pierre tombale en la forme d’un modeste ouvrage d’environ huit cents pages. Déformation hypokhâgneuse poussant à chercher des volumes qui tiennent bien en main, encart orange en quatrième de couverture ou titre improbable, peu importe, Les chroniques de l’oiseau à ressort se retrouvent dans mon sac. Mais après une orgie de XVIII et XIX ème, comment ne pas céder à la simplicité de cette première phrase : « J’étais debout dans la cuisine, en train de me faire cuire des spaghettis, et je sifflotais en même temps que la radio le prélude de la Pie voleuse de Rossini, musique on ne peut plus appropriée à la cuisson des pâtes, lorsque cette femme me téléphona. » ?
Je suis un estomac sur pattes, certes. Mais je ne suis pas seule. Je vous entends d’ici… Voici une bien meilleure excuse : la fondue au chocolat Häagen-Dazs qui a suivi, pour célèbrer dignement les dix-huit ans de Polymnie (enfin dignement si vous otez la difficulté inhérente à la fondue et au caractère tachant du chocolat). Accompagnée d’un chocolat chaud, tant qu’on y est (la fondue, pas Polymnie, hein). Vous noterez à ma décharge que Melpomène n’a pas ensuite réussi à me corrompre avec les frites de son Mac Do – mais j’avais grande envie de kebab, je le confesse ; il y en a à tous les coins de rues dans le quartier latin ! Nous avons fini par nous échouer devant Notre-Dame. C’est beau, c’est très très beau quand même. Et puis le hamburger post-fondue au chocolat ajoute à la magie de la chose dixit Melpomène. Je dirais plutôt que c’est la petit air hobby que Polymnie a interprété à la flûte. Quoiqu’il en soit, nous nous sommes arrachés à ce trop plein d’esthétique pour aller attraper le RER C. Fin de soirée consumée en lecture dudit livre tentateur. Plus d’approximation sur le nombre de pages restantes pour évaluer le temps de la lecture et organiser le planning des suivantes, mais un grappillage incessant de chapitres. Celui-ci ne fait que dix pages, celui-là n’est pas bien long – au diable l’histoire et la géographie. Le plaisir de lire retrouvé.
[Ce matin, je me suis mise à mon commentaire de Proust et nom de Dieu pays ! je me suis bien amusée.]
Les éditions GF Flemmardons vous présentent…
J’ai redécouvert qu’il y avait une vie après les réformes de la Pac, et pas seulement sous le forme du chapitre sur « les mutations du système productif » –français, il va sans dire, pourrait-on ne pas étudier la France, je vous le demande bien. En même temps, entre la France et l’Afrique subsaharienne, où est le moindre mal, je vous le demande (mais pas bien cette fois-ci).
[Le mal absolu reste pour moi incarné par l’Europe rhénane. Chacun ses phobies. Je suis Europe-rhénanophobe. Et arachnophobe aussi – on est commune ou on ne l’est pas].
Donc, revenons à nos moutons – oh, d’ailleurs, il y avait un paragraphe sur la viande bovine, un sur le porc et quelques lignes sur la viande ovine, mais rien sur les moutons ! Mes agneaux ! Si c’est Dieu possible ! Je disais, je disais…
Allions l’utile à l’agréable, sortons de notre caverne studieuse et allons faire un achat non moins studieux à Gibert.
– L’éducation sentimentale et les œuvres de Walter Benjamin, ça vous fera 15 € ma p’tite dame.
– Vous m’en mettrez 500 grammes alors.
Evidemment, loi de la tartine oblige, je n’ai que 14, 70 €. Aller-retour au distributeur de billets – quel nom inadapté ! est-ce qu’il distribue ? Il rechigne et vous tend les billets du bout des lèvres. Retour chez mon bon ami GiLbert. En bonne souris de bibliothèque, je musaraigne musarde dans les rayons. Et me dit que je commence à être vraiment atteinte quand je m’arrête devant l’édition bilingue des Amours d’Ovide – cela dit, la quatrième de couverture était extrêmement bien rédigée, ce qui est, soit dit en passant, extrêmement rare (oui, avec prononciation du chapeau). Pas de tartinage de culture académique périmée, mais une invite badine et curieuse où l’on vous fait résonner Mozart et Fragonard. Je muse-art- devant les rayons, et frustrant est de constater la quantité de livres que je ne pourrai pas lire avant…* bruit de la calculette pourtant sous copyright chez Miss Me*… avant deux ans !
La prochaine fois, j’essayerai de ne pas rebondir sur chaque mot que j’écris et de ne pas partir sur une nouvelle idée avant d’avoir commencé à exposer la précédente… mais peut-être n’y arriverai-je pas.