Julie (en 12 chapitres)
(Spoiler alert) Le taux d’humidité de mon masque l’a probablement rendu inefficace à la sortie du cinéma. La larme à l’œil, je connais, je suis très bon public pour les mélos ; la catharsis fonctionne à plein régime. Mais lors de la scène de rupture, ce n’est pas une larme à l’œil, ce sont des sanglots qui me prennent par surprise : à cet instant, je ne me projette plus dans un élan d’empathie fictionnelle, je me souviens. Ça m’a secouée, ça et le reste, toujours étonnamment juste, avec des résonances troublantes dans le caractère et le type de relation noué avec l’ex (cette entente intellectuelle qui restera probablement inégalée mais aussi une certaine sécheresse dans l’attention portée à l’autre). Ce film est probablement la raison pour laquelle je n’ai toujours pas résilié ma carte UGC, payée à perte ces derniers temps.
The Talented Mr. Ripley
The Talented Mr. Ripley ou comment la fascination pour un être et son mode de vie aisé peut faire passer un jeune homme fauché du mensonge à l’usurpation d’identité, de Jude Law à Matt Damon (incroyable dans ce film), et de l’arnaque au thriller. Le malaise s’installe rapidement, durablement, et ne cesse de croître, même lorsqu’on pense qu’il a atteint son paroxysme. Je ne soupçonnais pas en lançant ce film sur Netflix qu’il serait aussi glaçant – ni aussi virtuose.
Sex Education
Un soir que je menaçais de partir en vrille, le boyfriend en visio m’a intimé l’ordre d’arrêter de travailler et de regarder une série. J’ai objecté que je n’avais plus de série en cours, mais il n’a rien voulu savoir, et c’est comme ça, dans un pifomètre orchestré par l’algorithme de Netflix, que je me suis mise à regarder Sex Education. J’imaginais ça comme un teen movie délayé, dont je me lasserais vite. En réalité, la série, du moins dans la première saison, est extrêmement bien écrite, et tout un tas de sujets délicats y sont abordés.
Je me suis notamment prise d’amitié pour le personnage de la mère, thérapeute sexuelle à l’air pincé qui est aussi ouverte sur le sexe qu’elle est frileuse sur tout ce qui serait engagement amoureux, et celui de Maeve, la meuf badass qui, inspirant autant la peur que l’admiration et le mépris, entretient cette peur et embrasse la manière dont on l’a stigmatisée pour n’être ni ostracisée ni approchée, mais en souffre aussi car elle en a sous la pédale, tant émotionnellement qu’intellectuellement (comment ça, j’ai un kink pour les meufs brillantes en minijupe ?).
L’épisode quotidien avec un bol de soupe Brighton (pomme de terre, carottes et cheddar, chez Picard – le plaisir décadent de la fondue sous l’appellation raisonnable de soupe) et une petite crème au chocolat est vite devenu le point d’orgue réconfortant de mes journées, au point que je me suis heurtée début décembre à l’absence de saison 4. Même s’il faut bien admettre que la saison 3 est un cran en-dessous des deux premières, les personnages ont fait leur boulot, on s’y est attaché et on veut voir la suite, le scénario fût-il moins travaillé.
Klaus
Klaus, ce sont des mines impayables et des décors magnifiquement éclairés pour revisiter de manière décalée la légende du père Noël. Tout y est, mais rien comme on l’attendait, l’esprit de Noël bien caché derrière les mesquineries individuelles et collectives.
Don’t look up
Comment un film intrinsèquement démoralisant, qui se finit franchement mal, peut être une comédie si réussie ? Vous avez 2h25, une pléiade de bons acteurs et Adam McKay, le réalisateur du tout aussi trépident The Big Short, pour répondre à cette question. Puisqu’on va tous mourir, autant rire.
Un grand oui pour Julie (dont je préfère mille fois la traduction anglaise du titre : « the worst person in the world ») dont la justesse parfaite m’a retournée.
Retournées comme des crêpes.
Oh combien je suis en phase avec ce que tu écris sur « Julie … ». J’ai été pour ma part écrasée par l’ami commun qui passe à la librairie avertir de la maladie de l’ex. Il faut dire que je venais d’apprendre le décès de quelqu’un qui avait beaucoup compté pour moi, avant qu’il ne me plante là en mode J’ai trouvé mieux, et que je n’avais pas su qu’il était gravement malade. Peut-être parce que n’étant plus libraire, plus personne ne pouvait passer « by the way » pour m’avertir de son état ? Si je l’avais su, j’aurais fait comme Julie, pas l’ombre d’un doute.
Comme c’est étrange quand un film rejoint des éléments récents de nos vies.
Les films de Joachim Trier valent le détour, qu’on s’en sente proche ou non.