Concert d’il y a deux semaines. Environ.
A plus ou moins un CEP et une maquette.
J’ai failli écrire ici une lettre ouverte à Michael Gondry, parce qu’il s’y connaît en démagnétisation, et que j’ai en ce moment quelques soucis de mauvaises ondes avec les appareils électroniques. Avec un mois de mai aussi plombé en boulot qu’il est aéré de jours fériés, ces caprices technologiques m’ont mise sur les nerfs. Il me faut donc, avant d’entamer cette chroniquette, confesser avoir été d’humeur massacrante en entrant à Pleyel. Je comptais sur la musique pour adoucir mes heurts, mais elle est comme le ciel (aides-toi…) et m’a refusé tout apaisement. Autant dire que je m’en suis lâchement vengée : dénigrer, rabaisser, il y a une certaine joie maligne à trouver le monde entier aussi médiocre que soi, dans ces cas-là ; rien n’a trouvé grâce à mes yeux.
Premier extrait de Debussy : je connais sans reconnaître. Les Nocturnes ne sont plus célébrés avec des flûtes de champagne, légères, cristallines, mais avec des verres en cristal lourdement sculptés. A cause de leurs arrêtes tranchantes ne viennent y nager que des sirènes-piranhas. Plus rien de chatoyant, seulement d’agressif. Conclusion inepte : l’orchestre est trop bruyant.
Le concerto pour violon de Szymanowsky met fin à mes tergiversations ; il n’y a pas à regretter d’avoir choisi la parterre pluôt que le premier balcon, je vais pouvoir suivre de près le soliste. Las ! Christian Tetzlaff a à peine commencé à jouer qu’il me tape déjà sur les nerfs. Je pourrais incriminer comme Joël ses flexions régulières avec transfert de poids d’une jambe sur l’autre comme s’il skiait sur une piste étroite, ou le son grinçant de son violon, mais la vérité est bien plus prosaïque : il garde les yeux fermés. Je n’en tiens jamais rigueur dans les moments de grande intensité ; il faut parfois fermer les vannes avant que l’émotion ne déborde. Seulement, là, il les garde fermés en permanence, comme s’il gardait égoïstement son jeu pour lui, comme s’il ne voulait pas nous voir et jouer pour nous. Comme un amant qui garderait sa jouissance pour lui seul et n’aurait pas un regard pour celle qui la lui donne. Le public est délaissé ou je ne me suis pas laissée embarquer, toujours est-il que l’ivresse n’est pas partagée.
Les musiciens n’ont pas l’air non plus de s’amuser, mais je me fais tancer par Palpatine : ils ne s’ennuient pas, ils sont simplement sérieux. Bah moi, c’est l’air sérieux qui m’ennuie. Non, ce n’est pas beau, mais oui, mes contrecoups de coeur font du délit de sale gueule. Contempler la magnifique violoniste au cou-de-pied et au chignon-banane à faire pâlir une danseuse ne suffit pas à me faire oublier mon contrebassiste guilleret. Klari dit toujours tant de bien du London Symphony Orchestra… je suis déçue, j’ai raté ma rencontre.
J’achève de scribouiller ma soirée avec Scriabine. Sa quatrième symphonie porte bien son nom, Poème de l’extase : le dernier mouvement en particulier, avec ses vagues sonores à la limite de l’assourdissement, nous transporte en dehors du monde sensible, où l’excès n’est pas à la mesure de nos sens. Pour ce qui est de la communication avec une forme de divinité, en revanche, il faut se rendre à l’évidence, elle vient de passer chez FreeMobile. On se captera une autre fois, quand je trouverai totalement saugrenu qu’extase soit donné comme synonyme de catalepsie.
« la magnifique violoniste au cou-de-pied et au chignon-banane »
La brunette au coup de pied hallucinant, chez les premiers violons, au fond ? Yup, j’ai remarqué aussi.
« tant de bien du London Symphony Orchestra… je suis déçue, j’ai raté ma rencontre »
je n’irai pas te jeter la pierre, je n’ai toujours pas rencontré le Concertgebouw. Ni Berlin avant de les écouter chez eux. C’est pas grave. Le temps le soigne. Ou pas. Et ce n’ets pas grave non plus !
Et tu disais sur twitter alimenter ton blog avec du périmé ? En quoi est-ce périmé ? L’avantage du blog est de pouvoir écrire quand on veut de ce qu’on veut, non ? Et nos souvenirs sont toujours aussi valides même délicatement empoussiérés..
(et puis moi, deux semaines de délai avant parution, j’appelle ça de l’actu brûlante)
(mais bon)
A bientôt et bons CEP ! (je peux en regarder un ?)
Au fond, la brunette ? Hum, à moins que tu ne parles depuis l’arrière-scène, non. Au premier rang.
Périmé, brûlant, brûlé, râpé… je perds un peu la chronologie des spectacles ces temps-ci. Ce serait plutôt Manon qui commence à périmer, en fait.
Si l’offre des CEP tient toujours, tu risques d’avoir une surprise dans ta boîte mail.