Sous l’adjectif : des femmes à la rue, qui trouvent un éphémère refuge dans un centre d’accueil de jour. Alors que l’une des femmes qui le gère se fait déborder par la fatigue, l’impuissance et l’empathie, son frère tente de la conforter ; il lui dit toute son admiration pour elle, dont il est fier, et pour son travail, que lui ne pourrait pas faire. Je suis comme ce frère : je ne pourrais pas. Recommencer chaque jour, prendre la misère à bras le corps sans savoir par où commencer pour que chaque effort ne s’annule pas de lui-même, perdu dans les règlements absurdes et l’inertie de personnes démunies – de ressources mais aussi d’espoir, et parfois même d’une intelligence moyenne.
Louis-Julien Petit filme ça très bien, avec humour et dignité : les paroles et les corps engoncés, les divagations d’esprits malades qui n’ont pas pu être soignés, les borborygmes de personnes dont on ne sait si elles ne savent pas raisonner ou juste articuler, l’incapacité à intégrer certaines conventions sociales qui paraissent évidentes pour nous autres plus fortunés… Ce qui fait jeter l’éponge et détourner les yeux, le film le remet sous notre regard, inlassablement, jusqu’à ce qu’on recommence à voir ces personnes comme des personnes, qui peuvent avoir leur place dans la société, que l’on doit aider à trouver une place dans la société – et qui doivent le vouloir elles-mêmes car, le film ne fait pas l’impasse sur ce point douloureux, on ne peut pas sauver une personne malgré elle.