Parfois, il ne faudrait pas laisser de seconde chance. Après un Copie conforme mi-figue mi-raisin, c’est carrément le pépin avec Like someone in love.
Une étudiante qui se prostitue se rend auprès d’un vieillard un peu spécial par rapport à ses clients habituels (dont on ne saura rien) : avec un pitch comme ça, je m’attendais à trouver une belle endormie. Elle a beau être belle et s’endormir dans le taxi, c’est raté. Il n’y a pas une once de sensualité dans ce film. De l’empathie, en revanche, il y en a à revendre : la jeune fille remuée de rater sa grand-mère venue passer la journée à Tokyo, le fiancé jaloux qui prend le vieillard pour le grand-père de sa moitié, celui-ci qui endosse le rôle sans moufter et elle encore, angoissé par le quiproquo qui ne peut pas bien finir (mais c’est quand même bien que ça finisse).
On passe du temps au restaurant, comme dans Copie conforme, mais encore plus en voiture, et je me prends à regretter le rythme effréné de Cosmopolis, autre huis-clos sur roues. Certes, la lenteur et la pudeur permettent de s’abîmer dans la contemplation de magnifiques reflets (le mac-business man qui se superpose dans la vitre à sa recrue, les lumières de Tokyo sur son visage à travers les vitres de la voiture, son corps dénudé flou sur l’écran de la télévision – vague idée du grain de la peau), mais la technique ne peut pas faire toute l’esthétique d’un film. Ni les gros plans réitérés sur les visages faire durer l’émotion.
On veut nous signifier je ne sais quelle profondeur ; on se heurte à la surface quotidienne des choses, des êtres et du temps. Car d’ellipses narratives, il n’y en a que très peu dans ce film – une nuit et quelques minutes d’un trajet, qui n’existent pour ainsi dire pas à la conscience de la jeune fille dans le sommeil. D’après Umberto Eco, il existe un moyen narratologique de définir le film porno : le temps du récit est exactement le même que celui de l’histoire. « Entrez dans une salle de ciné : si pour aller de A à B, les protagonistes mettent plus de temps que vous ne le souhaiteriez, alors c’est un film porno. » Like someone in love est un film porno. D’où la prostituée malgré l’absence de sexe. Reste à trouver quel est l’intérêt d’un porno sans sexe.