Skillshare #02

 

3 fun, freeing exercises to spark your creativity. Carly Kuhn ne ment pas : l’exploration du dessin à ligne continue qu’elle propose rappelle que dessiner est d’abord un jeu.

J’ai cru que jamais on n’en viendrait aux exercices tant la sauce est montée à l’américaine, mais si et, à ma propre surprise, je me suis prise au jeu.

Le résultat de l’exercice par Carly Kuhn

Le portrait photographique qui sert de support à la création des dessins n’a presque pas d’importance – c’est un prétexte plus qu’une référence. La consigne consiste à retranscrire la photo en une ligne unique :
1. de la main non dominante (gauche pour les droitiers),
2. de la main dominante,
3. de la main dominante, sans regarder sa feuille (mais sans fermer les yeux non plus ; on regarde uniquement la photo).

Et ça fonctionne : on n’a aucune attente de résultat à dessiner d’une main qui sait à peine diriger un crayon. On s’habitue au tracé tremblotant, aux lignes qui vont un peu où elles veulent : rapidement, le dessin n’est plus un défaut mais une surprise.

Main gauche, premier essai : petite mort
Main gauche, deuxième essai : l’agonie (tout est dans le menton)

 

Quand je reprends le stylet de la main droite, j’ai l’impression d’être la reine du pétrole. L’impression de contrôle est telle que j’en oublie d’être hésitante sur le chemin du tracé, et l’image surgit presque d’elle-même. Je suis surprise ; j’aime assez.

Main droite, sans ruse

 

Juste au moment où l’on pourrait commencer à redevenir self-conscious, la consigne fait repartir dans le jeu – à l’aveugle, sachant que le trait continu évite le hors-piste total.

Main droite, sans regarder la feuille : l’orgasme

 

La dernière partie du tutoriel, intitulée The Art of the Aesthetic, est peu ou prou une leçon de décoration d’intérieur. Mon réflexe a été de lever les sourcils très hauts, en mode : oh my God, on nous prend vraiment pour des quiches, à enfoncer des portes ouvertes et à nous flatter dans le sens du poil (exit le drawing, place à la piece of art).

J’ai regardé jusqu’au bout sans me départir de ma perplexité. Le réflexe de mépris initial, pourtant, a reflué : il y a quelque chose d’inspirant dans l’assurance tranquille de cette jeune femme, quelque chose à chaparder pour s’éviter une jalousie inavouée. Elle y croit, tout simplement. Elle sait y faire, et nous montre comment faire : encadrer, disposer, mettre en scène – le dessin, mais plus largement, se mettre en scène soi et ses réalisations. Jusqu’à y croire, et inciter les autres à faire de même. Il y a finalement quelque chose d’assez libérateur à troquer le soupçon de prétention contre l’assertion joyeuse : se dire qu’on réalise une piece of art, peu importe sa valeur artistique intrinsèque, c’est tout de même mieux que se sentir piece of shit.

En bonus, la photo de référence : Émilie Cozette photographiée par Christian Lartillot

4 réflexions sur « Skillshare #02 »

  1. J’aime énormément ces expérimentations que tu nous partages, c’est toujours un vrai plaisir d’apprendre ce qu’il se passe en coulisses et l’expérience de la découverte.

    Le style de dessin me fait penser à mon… rideau de douche (qui porte un dessin de Sophie Schulz ainsi fait au trait levé)

    Je trouve la réflexion intéressante d’aller jusqu’à rendre l’œuvre physique et exposée. Si on arrive à le faire sans honte voire avec beaucoup d’amour pour des dessins d’enfant qu’on affiche sur le frigo, les nôtres devraient avoir droit à tout autant de bienveillance 🙂 D’autant plus que, sincèrement, ton résultat final me plaît !

    1. Cela me fait sourire que tu commentes ce post-ci, parce que j’ai pensé à toi en le rédigeant – pour l’expérimentation et son récit. Le coup du rideau de douche a encore élargi mon sourire : c’est vrai que c’est similaire dans l’idée. J’imagine qu’il y a toujours plusieurs artistes à s’emparer d’une même technique pour en faire leur style (du coup, est-ce encore un style ou juste un genre que l’on se donne…).
      J’ai un peu levé les yeux aux ciels pour l’exposition du dessin, mais depuis, je dois bien avouer que l’idée s’est mise à me trotter en tête de trouver un imprimeur pour voir ce que rendraient certaines illustrations en vrai (grâce à toi, je penserai aussi aux magnets pour le frigo XD).

    1. Oh, tu me montreras si tu essayes ?
      C’est un peu le pendant dessiné de tes ateliers d’écriture, quand j’y pense.
      (Je vais essayer de reprendre ces récits, je suis un peu dissipée en ce moment.)

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