Revue de blogs #13

Dans la dernière newsletter de La moins bonne version de moi-même, Agathe H. explore son rapport à la mode et j’ai aimé lire ce portrait à travers sa garde-robe. C’est en outre grâce à sa mention du Dressing de Jane Sautière que j’ai regardé ce que cette autrice avait écrit d’autre (pour au final préférer emprunter Nullipare).

Quand je regarde des photos de mon enfance dans les albums de famille, je hurle souvent contre mes parents à cause de la manière dont iels nous habillaient avec mes sœurs, mais bien souvent iels répondent que c’est nous qui avions choisi nos vêtements (il fallait nous en empêcher !). C’est ainsi que selon les années, nous avons eu l’air de sortir d’un kolkhoze, d’un carnaval ou d’une émission de Stéphane Bern.

(rires) à cette dernière phrase.


N’est-ce pas grossophobe de vouloir toujours avoir l’air plus mince quand on parle de « se mettre en valeur » (marquer la taille, allonger la silhouette) ?


Elle cite une réponse reçue d’une certaine Maud sur Instagram :

Être sexy peut conférer beaucoup de pouvoir en société par exemple. Et être en large ou masculine peut apporter beaucoup d’indifférence et de paix. Moi j’alterne tout le temps, j’ai besoin des deux.

Se fondre caméléon en jogging de danse dans le métro lillois. Conquérir le pavé parisien en mollets galbés et minijupe.


Il y a une expression anglaise que j’adore, “man repeller”, qu’on pourrait traduire par “repoussoir à hommes”. Il s’agit, pour les femmes, de s’habiller d’une manière qui aurait pour effet de repousser les hommes, de ne pas leur plaire. […] Je pense qu’on peut aussi repousser les hommes (ou en tous cas se détacher de leur regard/validation) en étant too much : en prenant une contrainte qu’on aurait intériorisée et en la poussant tellement à fond qu’on se met à leur faire peur.

Dans mon expérience, les couleurs vives attirent les insectes mais repoussent les relous (enfin dans mon expérience de vingtenaire ; parce que, trentenaire, j’ai disparu des radars).

Agathe H., Mode de vie(s), La moins bonne version de moi-même

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Instead most of us would spend a large part of our lives making decisions based on what other people want, and what society decides is the norm at that time. Then, probably because it is so tiring to live life this way, the rest of the time we give in to our impulses as a form of compensation. Since we’ve already given up so much of our selves, we should just eat that thing, buy that thing, do whatever that gives us instant gratification because we deserve that quick dopamine hit after having to tolerate so much.

L’effet de compensation, que j’ai bien connu en tant que salariée, s’est dissipé avec ma reconversion.


Tell me, what is it you plan to do with your one wild and precious life – Mary Oliver wrote askingly in a poem.

Y’a encore du travail (psy) pour que le precious n’annule pas le wild.


To a large extent we have to face our unhappiness and lack of fulfilment alone.

Winnie Lim, do we cherish our selves

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Si même les gens qui sont sensés me maintenir sur terre lâchent le fil du ballon de baudruche maintenant.

Je me complique un petit peu la vie parce que ça me passionne plus comme ça […].

Meredith B., simple compliqué compliqué simple

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Donc si je comprends bien, l’inventivité des exercices est le fruit d’un mélange de traditions corporelles et de connaissances médicales contemporaines.

Alice, Sport fusion

Direct envie d’une enquête historique et sociologique sur la création des exercices de la barre de danse classique.

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Peinture beige et noire où un homme est agenouillé au pied d'un autre homme au visage de pierre fissuré, une main sur son crâne, l'autre tenant une pierre qui a fait partie de lui
Feeling Kintsugi, de Moonassi

L’éboulement de soi, la main sur le crâne comme sur la tête d’un enfant qu’on voudrait endormir et l’autre qui tient un morceau de lui… Merci à Karl pour la découverte de cette œuvre de Moonassi.

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J’ai fait des choses qui bricolent un dimanche, m’échouant là avec un constat : cette journée est passée bizarrement. Je ne suis pas sûre d’avoir vécu chaque heure, comme s’il y avait un hiatus, une maille lâche.

J’ai des inquiétudes sur le feu, mais je n’y peux rien, alors je les laisse étouffer.

Mathilde, Du yoga & des nazis, Tant qu’il nous reste des dimanches

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I am not sure when it started, but I tend to feel like I am wasting my life if I am not doing something creative or enriching.

Pwnd.

I just wish I can accept myself more. […] But isn’t wishing for this self-acceptance a form of an unrealistic self-expectation too?

Winnie Lim on inner expectations

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une boîte à livres dans la rue déborde de jeux improbables et rares, des jeux de cartes un peu mystiques, […] on oscille entre l’oracle et le petit jeu d’ambiance, en somme ce sont autant de petites cartes dressées entre nos solitudes respectives, des passerelles, ô monde moderne

je veux tout récupérer, me relier, j’en ai plein les bras

Rêver peut-être

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When an average student suddenly gets an A, it is like they achieved something great. But anything less than an A is unacceptable and even embarrassing for high-performing students.


I started to contemplate that being somewhat average is actually a form of superpower. There is much more room to manoeuvre, more opportunities for experimentation. Average people are accustomed to a certain rate of failure, so they don’t take failures too hard. Wins are really celebrated and joyous because they are unexpected. […] Doesn’t this feel like a happier life?


Personally I think flying under the radar is a form of happiness […]

Winnie Lim, thoughts about human intelligence
after watching korean game shows

Les conclusions de Winnie Lim recoupent le parti-pris du boyfriend de volontiers passer pour plus bête qu’il n’est ; ça l’arrange, il préfère surprendre que décevoir. Autant dire que c’est à des années-lumières de mon fonctionnement. J’ai été cet high-performing student pour qui obtenir d’excellentes notes était normal, tandis que des moyennes, c’était déchoir.

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J’aime les maisons de vacances et les choses laissées dans la cuisine par les habitants qui nous précédèrent […], j’aime que des habitudes se prennent et se défassent à toute vitesse […] et j’aime la lumière où qu’elle se pose, la traquer, la poursuivre, l’empoigner.

Victoire de Changy, publication Instagram du 12 mai

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Quel dommage que la mémoire ne sache pas mieux retenir les bons moments.

Alice (du fromage), Chemin des écoliers

Tout est toujours coloré du dernier filtre projeté (les émotions comme des gélatines devant un projecteur).

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Mais je suis écrivain quand même. […] J’ai décorrélé la publication de l’écriture.

Podcast d’Anne Savelli, Envoyer son manuscrit en lecture

Je n’attends plus vraiment de réponse pour mon manuscrit sur la danse. Je n’ai pas vraiment décorrélé l’écriture de la publication, je me suis juste réappropriée cette dernière en lançant une newsletter : je publie de petites choses à un tout petit nombre certes, mais à ma guise. Un partage plus qu’une publication (mais n’est-ce pas celui-là qu’on attend de celle-ci ?).

Revue de blogs #12

Revenir dans une ville que l’on a déjà visitée et documenter ces voyages successifs pour éprouver les écarts d’une version de soi à une autre :

I think the desire to remember is a form of hoarding life, the unwillingness to let go of what we’ve experienced. But similar to comparing differences between versions of texts, I like to contrast the textures and feelings between the versions of my selves […].

Winnie Lim, random scenes and words from taichung

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[…] les IA provoquent ce doute, sur toute image. Cette possibilité de doute, cette possibilité absolue, sur tout, finit par abîmer toute vérité possible.

Joachim Séné, Le temps des faux, Journal éclaté

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J’espère que vos projets vont bien, et à plus!

Gersande la Flèche, journal de bord écriture du 7 au 20 avril 2025

De la bonne santé de l’individu en fonction de l’épanouissement de ses projets.

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L’importance du travail en petites touches. On ne réalise jamais combien parfois, des micro-tâches régulières peuvent avancer un projet sur le long cours. Tout est une question d’endurance.

Karl, Les carnets Web de La Grange

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Les jours après les longues marches, il n’existe plus que le gouffre de l’absence de la marche pendant cinq jours. La poésie au fond des chaussures, le corps amolli par l’effort répété, la constante sollicitation des paysages sont un manque terrible. Parcourir le monde, qu’il soit au bout d’un océan ou au coin de la rue, est un élixir.

Karl, élixir, Les carnets Web de La Grange

Quand je reprenais le salariat après des vacances passées à arpenter de nouveaux lieux, je me sentais enfermée, comme séquestrée à mon poste de travail.

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J’observe, de plus en plus je regarde la jardin l’homme qui partage ma vie mes enfants le chat de la maison les oiseaux les arbres les bourrasques les insectes les nuages le soleil les herbes, sensation que dessous il y a un secret à découvrir. Je lis et je lève les yeux vers, je danse depuis celle que je suis jusqu’au secret qui est, en perçois des contours encore flous. Une vérité qui attend.
Quelque chose de l’ordre du bonheur d’être – là.

Dame Ambre, Journal d’avril, Toutes les minutes non écrites

Lire et lever les yeux vers… Ce genre de sortie de lecture est aussi chouette que d’y entrer.

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[…] on doit se résoudre à ce que cette histoire demeure incompréhensible pour les autres. Quand on a compris, on n’explique plus […]

Latmosphérique, Composer avec la nuit, Accrocher la lumière

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Our urban space is overpopulated
by people looking at their own little screen […]

What are they craving?

Attention?
Love?
A sense of belonging?
A cure to boredom?

[…]

Technologies were supposed to
Create
Links
Bridges

I can only see
Holes
Wells
Where people are hiding their loneliness

Latmosphérique, A new urban space, Accrocher la lumière

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Mes marches du matin m’apportent beaucoup de joie. C’est une affaire de délier le cœur et le corps.

Mathilde, Grincement & vélocité, Tant qu’il nous reste des dimanches

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Colorier sans suivre les traits, ça m’a tellement libérée dans ma vie d’artiste.

Je crée dans un but de documentation personnelle. Ça m’amuse de savoir ce qui pousse autour de moi et d’en faire quelque chose d’intime avec.

Fanny Cheung, Jardin, semis et promenade – 立夏 Début de l’été, Ynote_hk

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La poussière dans le regard, la rouille dans les rêveries, la patine dans les gestes […]

Karl, Oubli, Les carnets Web de La Grange

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La mémoire c’est particulier, on croit, comme pour tout, que les autres font comme nous, nombrils de notre monde que nous sommes, que c’est assez universel mais il en est autant de formes que de personnes.

Sacrip’Anne, Memory Lane

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Small-scale blogs and forums were about meeting like-minded dweebs, and forming new friendships unconstrained by age or geography. Today’s social media platforms often divide us into creators and consumers; people whose job it is to go after others’ eyeballs, and people whose attention is the product.
[…] Already, I’ve caught myself reading stuff online and wondering if it’d been written by a real human, or merely spat out by a GenAI tool fed a series of prompts. I find it soul-destroying, quite literally […]. Getting a robot to write words for you means building an extra layer between you and whoever you see as your audience.
It builds a distance between people, which all feels sad and ironic as the old internet was so good at removing so many of the layers which meant that like-minded people couldn’t have met in real life.

Marie Le Conte, 11 things I hate about AI, The Young Vulgarian

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[…]  je m’inquiète mais juste un peu, pas trop, j’ai confiance en elle. La manière dont elle s’est sortie de la violence qu’elle retournait contre elle, me fait dire que ça ira. Peut-être.

[…] elle m’a dit je te fais plein de bisous et ça voulait dire laisse-moi.

Dame Ambre, Journal de mai, 14 à 18 – Quelques histoires de musique

Revue de blogs #11

Je n’aime pas l’été, c’est la mort de tout, par cuisson, alors que le printemps est un pétillement de vie.

Bonne humeur : Nom féminin. Synonyme : Colline,
Un peu chaque jour

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love, is simply being able to be utterly ourselves with each other, and that same love incubates a space for the other to become. as i become more of my self, the more i understand how much of her love plays a part in my becoming, the deeper my love for her goes. i would be so much less of a person without her, because she sees and knows who i am, before i can recognise it in myself.

Winnie Lim, 107 months together

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[…] sometimes knowing a situation is entirely irredeemable gives us permission to stop struggling

[…] people in general will take every opportunity to dismiss our suffering from a chronic illness – because it is always about their uncomfortable feelings, not ours.

I feel less and less disappointed with people, because the more I accept where I am, the more I understand where they are. I don’t expect much out of people anymore. Maybe people would see that has a positive evolution, but for me it is in tangent with the reality that expectations only develop when there is enough care.

Being aware of the richness that exists in these moments and awareness, knowing that a ton of things have to be in place before they can exist – this is what happiness looks like to me at age 44. Happiness is being capable of noticing the potential and richness of our own lives, […] it is being able to discern what is actually noise and extraneous.

Winnie Lim, 44

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Enfantillages ? Absolument, mais dans le bon sens du terme.

Anne Savelli, L’enfant en soi

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Et cette peur que ça brûle revient, augmentée du désir d’incendier tout soi-même.

Extrait de Décor Lafayette d’Anne Savelli
(j’ai envie de le lire maintenant, mais il n’est pas à la médiathèque)

J’étais consciencieuse (j’aurais pu l’être moins) tout en ne mettant aucune implication émotionnelle sérieuse dans ce que je faisais […] je me rendais compte que cela me faisait du bien, de ne ressentir aucun enjeu.

L’implication émotionnelle est réservée à l’écriture […].

L’implication émotionnelle, je ne peux pas y couper non plus quand j’anime des ateliers. Dans ces moments-là, je suis tout entière présente, raison pour laquelle je n’ai jamais voulu exercer ce métier à plein temps. J’ai fait de drôles de choix, de ceux qui sont aujourd’hui valorisés dans les discours de développement personnel (trouver ce pour quoi on est fait, se centrer, aller vers son désir), mais plus difficilement par la société (euphémisme).

Anne Savelli, L’implication émotionnelle

L’implication émotionnelle, voilà un critère important pour un choix de métier — encore que le curseur soit difficile à régler, j’ai toujours un peu envie de repartir en sens inverse. Trop d’investissement crame toutes nos ressources, mais trop peu les éteint à peu près aussi sûrement, j’en ai fait l’expérience en CDI dans un job que je pourrais pourtant exercer à nouveau si je le savais borné à quelques mois — comme un divertissement professionnel qui offrirait un répit à petite dose, mais redeviendrait mortellement ennuyeux sur le long terme.

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Sacrip’Anne rectifie l’expression : dans les cadeaux, ce n’est pas l’intention, mais l’attention qui compte.

Et ce n’est pas si courant, dans la vie, d’avoir justement l’idée de quelque chose qui plairait à l’autre. Il y a toujours une sorte de pari — des paris, même : celui de louper le coche, de ne pas avoir réussi à transmettre… l’intention.

[…] J’adore quand surgit l’idée d’un cadeau pour quelqu’un. J’ai autant de joie à préparer mon méfait que, j’espère, la personne à qui il est destiné en aura à le recevoir.

Tout pareil, je n’aime pas « les cadeaux-obligations », pour lesquels je manque souvent d’idées. Quand j’en ai trouvé une que j’estime bonne en revanche, je jubile, contente de mon coup (surtout si le destinataire ne s’y attend pas).

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Le mois d’avril au cours des années est étrangement devenu un mois rempli de bons et mauvais souvenirs. Quel étrange phénomène que celui des événements qui s’accumulent ici plutôt que là par le hasard du vent ou de la géographie du cours de l’existence.

Choses du calendrier, Les Carnets Web de La Grange

J’ai un ami qui prends des photos de ses réalisations culinaires tout au long de l’année. À la fin de chaque année, il en fait un livre qu’il nous envoie. Ses livres/journaux/photographies font partie des livres de poésies les plus beaux sur mes étagères.

Peut-être qu’il faudrait retrouver ce sens de l’adresse. Créer consciemment de petites choses pour un petit nombre — qui n’en serait plus un nombre (ni les choses petites).

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J’aimerais ne vivre que là, dans cette mélancolie d’enfant de primaire, à bricoler, et perdre à l’occasion cette empreinte terrible de l’âge adulte, la crainte des aiguilles qui tournent. Je vis, et chaque matin pourtant je goûte le jour comme s’il était déjà parti. […] Je me demande comment m’extraire de cette mécanique, celle où je note inconsciemment que bientôt, le temps libre ne sera plus.

Je n’ai rien fait cette semaine. Vécu pourtant, mais qu’en dire ?

Soleil & mots, Tant qu’il nous reste des dimanches

Recopié à J-4 de la reprise.

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Je n’ai pas assez de temps seulement dans ma journée, pour tout découvrir, lire, tester, me lancer, vivre.

Toutes ces petites choses qui, journal d’avril de Dame Ambre

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Le bruit dehors et en dedans un silence caressant. Rien n’existe que la lumière qui se faufile.

Des dentelles de douceur, Accrocher la lumière

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Toujours beaucoup de plaisir à suivre le récap des « trucs créatifs » de Lawrence sur Deadly Breakfast, notamment ses linogravures.

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The thing with getting used to a place is that you stop seeing beauty everywhere. I love travelling because the stark contrast between the foreign place and my home country makes me drunk in the pleasure of constant marvel.
[…] I have expanded my awareness of beauty.

This is why I like making art, taking photos and even writing. They are basically impressions of my different selves. Behind these things lie an interior world that would only exist in that moment, and to browse these things again it is like time travelling back into those selves […]

Winnie Lim, Taipei after 7 years
(allez voir ses photos)

Un voyage dans le temps des soi successifs <3 On pourrait aussi définir le blog comme ça.

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De même, je me réfugie souvent dans une longue marche, dans un univers hors-de-portée du « eux. » Je m’extrais de ce « nous » qui ne sait plus être « nous » mais juste des micro-condensations de « nous » entourées de nombreux « eux. »

Orthodoxie, Les carnets Web de La Grange

Revue de blogs #10

In the world of self-something, I know a lot about self-doubts, self-judgement, self-pity at times, self-talk.
Nothing to do with confidence at all.

Self-confidence, Accrocher la lumière

Confidence is not the belief in self, confidence is the willingness to try. — Mel Robbins

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[écrire sur son blog] Ça permet de boucler des évènements ou de les remettre en perspective.

Week-end à Nîmes, Un peu chaque jour

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Et comme les images du monde flottant (Ukiyo-e) étaient l’expression d’une modernité contemporaine de la période d’Edo, n’oublions pas notre propre modernité.

Fleurir le souvenir, Carnets Web de La Grange

Souvent cette tentation de gommer tout ce qui ancre dans le présent — un présent qui nous semble trop prosaïque pour être un jour daté et susciter une quelconque forme de nostalgie ou de beauté. On voudrait directement l’atemporel, l’éternité.

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Je ne coupe pas par souci de pureté, mais par instinct, ce qui est peut-être l’autre nom du hasard, hasard choisi.

block note — objectif, Tentatives

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Ça fait comme un curieux vide ; il ne s’agit plus d’être l’unique coupable sur laquelle ma Bavarde peut s’acharner en me disant que j’ai bien mérité mon sort. Si ça n’est pas de ma faute, alors c’est juste dur ? […] Curieusement, ne pas avoir de coupable à blâmer ne fait pas toujours du bien.

Faire taire la bavarde chez Sacrip’Anne

Se blâmer pour conserver l’illusion rassurante qu’on a encore prise sur les choses.

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Les (nombreuses) citations qui suivent sont extraites de la newsletter La moins bonne version de moi-mêmeThis is 35.

J’ai complètement revu mon rapport au travail, je ne veux plus du métier passion qui dévore et détruit […]. Je ne vis pas pour mon travail, je le fais bien mais sans plus, et je profite de mon temps libre pour écrire pour moi.

Combien de temps avant que le travail alimentaire ne nourrisse plus l’intellect ? C’est un curseur bien difficile à ajuster.


J’aimerais être amoureuse, mais je ne veux plus du couple conventionnel. J’aimerais ne pas avoir besoin d’amour, arriver à coucher sans m’attacher, ne pas avoir besoin de marques d’attention des personnes avec qui je relationne, mais je n’y parviens pas. Alors pour l’instant, je préfère faire sans.

La gueule de bois affective au petit matin après une relation d’un soir… j’ai découvert ça pendant ma brève période Tinder, je n’aurais pas pu continuer longtemps.

Quant au couple conventionnel, je ne l’ai jamais connu jusqu’à la vie commune et n’y aspire pas spécialement (le rapprochement géographique, si, en revanche).


J’aimerais surtout vous dire que je suis heureuse et que je ne comprends pas exactement pourquoi. Je ne sais pas à quoi c’est dû, puisque rien n’a vraiment changé. Et comme je ne sais pas comment c’est arrivé, j’ai peur que ça s’arrête à tout moment.

L’autrice de cette newsletter raconte avoir connu des épisodes dépressifs, alors je suis tentée par une réponse très terre-à-terre : la chimie du cerveau.


Elle m’a raconté qu’elle n’était pas contre l’amour, le couple et les enfants, mais qu’elle avait arrêté de les attendre et de les chercher. Que si ça lui tombait dessus elle serait super heureuse, mais que si ça n’arrivait pas, elle serait super heureuse aussi. Elle avait l’air sincèrement alignée avec elle-même et épanouie, et je me suis dit que je voulais être comme elle, que je voulais son secret. Sur le papier, j’étais en phase avec ce qu’elle disait, mais je n’arrivais pas à le ressentir VRAIMENT, à être heureuse seule.

Au plus fort de ma dépression, j’étais obsédée par la question du sens de la vie. […] Les petits plaisirs (manger une glace, avoir un fou-rire, voir le soleil se lever), ça me semblait dérisoire. J’avais l’impression que les gens étaient dans le déni du vide de l’existence, qu’ils le comblaient avec des choses superficielles.

Et puis ça m’est tombé dessus, pour de vrai. Moi aussi je suis devenue heureuse, alors que rien de fondamental n’a changé dans ma vie.

Pourtant, je ne peux pas m’empêcher de penser parfois que c’est moi qui suis dans le déni. […] Qu’au fond je suis triste d’être seule et que je me persuade d’être heureuse pour supporter ma condition.
Quand j’en ai parlé à ma psy, elle m’a demandé pourquoi ce serait grave que je sois dans le déni ?


Il est anarchiste et polyamoureux, très soucieux de sa liberté. Quand il s’est rendu compte de ce qu’il éprouvait pour D., il a dit « je suis amoureux, je suis dans la merde ».

Tiens, tiens, y’avait pas amoureux dans polyamoureux ?


même si j’ai l’endurance d’un Tamagotchi en fin de vie et le cardio d’un paresseux, je me suis dit que j’avais envie de me mettre aux claquettes


Une reconnaissance violente. Métaphysique. L’éclat de l’iconographie byzantine. Je ne veux pas le rencontrer ; je veux l’avoir connu durant des années et des années.

– Ton/Nom, Esther Yi (Je ne sais toujours pas trop comment gérer les citations dans les citations)

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Scrollez lentement :

Le format fait un effet incroyable (il me semble que Karl affectionne les panoramiques à la verticale). Cela rend l’émerveillement devant la profusion florale sans que l’on se dise devant la photo, oui, bon, des fleurs.

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L’émerveillement de Karl devant les mille petites pièces de vieux magasins d’électronique me rappelle le mien, enfant, devant des casiers similaires remplis de perles, boutons et fermoirs…  Travaux manuels ou circuits imprimés avec diode, même rêve de choses à assembler, à bricoler.

…

Les débuts du Covid, c’était il y a 5 ans. Pour l’occasion, Marie Le Conte republie un essai écrit durant le confinement. J’ai été troublée de constater que certaines choses qui me paraissaient propres à cet épisode résonnent bien au-delà, comme si le confinement avait été un miroir grossissant de certains traits de notre époque (ou de notre psyché ?).

[…] I am living through this like an artist is preparing for an exhibition.

On a maintenu le lien en se mettant en scène les uns pour les autres. Est-ce qu’on ne le faisait pas déjà ; est-ce qu’on n’a pas continué à le faire, sur Instagram et ailleurs ?


Everything doesn’t happen for a reason, but if you don’t construct a reason for everything that has happened to you, I’m not sure how you keep on living.

Ce besoin de faire sens toujours, quitte à le construire, l’inventer.


[…] ensuring that I can look back on those months and feel safe in the knowledge that I did not waste them.

Cette angoisse de ne pas gâcher son temps, je m’y retrouve tant. Et pas seulement pour le confinement.


Resting is only worth it when you know what you’re resting for […]


I worry about turning myself into a spectacle, about ripping my ribs open when no-one asked me to. In darker moments I see it as desperate attempts to foster immediate intimacy, from someone who isn’t very good at forming relationships.
I have no idea if that’s the case; if I’m being kinder to myself, I simply see it as a habit that I have, because I have always had it, because I am of the generation that grew up pouring its secrets into screens, and right now screens are all we have.
There is something to be written about the internet once being where we went to escape from our real lives, and presently being the one place we go to in order to try and cling on to those real lives.

Cette conclusion me semble articuler de manière beaucoup plus claire la distinction que je tente souvent de faire entre intime et privé : au début du web et des weblogs, on « déversait nos secrets dans les écrans » — ce n’étaient pas nécessairement des choses à cacher, plutôt des bouts d’intimité qu’on ne savait pas comment partager dans la vraie vie, où l’on demande plus volontiers si on a des frères et sœurs (enfant) ou ce qu’on fait dans la vie (adulte) qu’on ne nous interroge sur nos doutes ou notre rapport à la mort (big up à Eli, je ne retrouve plus le billet en question). Sur des forums, sur des blogs ou des pages personnelles, sous pseudonyme, on écrivait des tartines, des bouteilles à la mer pour un partage hypothétique, lointain.

Avec Facebook, Instagram et compagnie, tout s’est peu à peu inversé : on se connecte d’abord avec les gens qu’on connait IRL ; le partage est proche, similaire à celui de la « vraie vie » et le privé a pris le pas sur l’intime, de nouveau plus compliqué à partager (sans compter que les données privées se vendent bien mieux aux annonceurs ; nos états d’âme présentent moins d’intérêt pour Meta que de savoir où on habite et à quelle fréquence on va au restaurant). Le pseudonymat, avatar d’une identité réinventée, est devenu un anonymat suspect : que peut-on avoir à cacher ? pourquoi cette rétention de données ? Aujourd’hui, même si on commence à vouloir faire machine arrière, on se géolocalise à tout va, on donne mille détails qui croisés permettent de nous identifier, alors qu’on prenait soin d’effacer les indices quand on entrouvrait nos entrailles.

On a migré de nos arrières-boutiques secrètes pour les vitrines. L’ailleurs un peu utopique qu’était le web est devenu une réplique de la vraie vie, professionnelle, marchande, normée, un nouvel ici qui donne à nouveau envie d’aller voir ailleurs si la vraie vie ne s’y serait pas réfugiée.

Je continue et le blog à l’ancienne et les réseaux sociaux, et c’est probablement la juxtaposition des deux qui me met mal à l’aise, qu’il soit possible de recouper le privé et l’intime. L’intime se partage bien, c’est la dimension la plus enfouie et la plus commune ; couplé au privé pourtant, il en devient obscène. On peut dire les caresses et l’extase amoureuse si on ignore l’identité du partenaire, de même qu’on peut connaître l’identité du partenaire si on ne dit rien de ce qui se joue entre les corps ; les deux ensemble mettent mal à l’aise. J’essaye de cloisonner autant que je le peux, autant que j’y pense — mal.  À défaut de pouvoir éviter les recoupements, je conserve une distinction symbolique : au journal du blog l’intime (les ressentis, les émotions, les doutes, le flou), aux réseaux sociaux les détails privés (les stories de voyage en temps réel ou presque, les annonces de stage de danse…), avec des comptes distincts pour ceux qui sont couplés à mon identité bloguesque (où j’évite de poster des images de moi reconnaissables) et ceux qui sont couplés à mon identité nominative (LinkedIn, compte Insta danse…).

happy birthday to youuu COVID-19, Young Vulgarian

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Au-delà de l’amusement à voir ce qu’il y a dans l’assiette d’un auteur qui n’est pas du genre à partager sa morning routine, je souscris à la quête d’énergie de Thierry Crouzet via son régime alimentaire

 J’en suis arrivé à ce régime pas à pas, avec les années, en même temps que mon corps se transformait et pour répondre à ses transformations. Dès que je déroge au régime, je me sens moins vif, moins alerte.

Ça recoupe d’ailleurs ce que disait Sylvie Guillem en interview : abandonner une alimentation carnée lui avait donné plus de stamina à l’âge où l’énergie est censée baisser. (En revanche, vous pouvez m’exclure du jeûne intermittent, je mords si je n’ai pas mangé depuis plus de quatre/cinq heures.

Pour ma part, le sport est le meilleur moyen de me garder affûté intellectuellement, le sport à ce moment de ma vie m’est plus important que la lecture.


Je désinstalle de mon mobile les applications Facebook, Messenger, LinkedIn, BleuSky, Instagram. J’avoue que le geste n’a pas été si facile. Des années de réflexes pavloviens à défaire. C’est à ce moment précis que je découvre que je suis sous emprise. J’ai physiquement mal.

Je suis sur Mastodon, mais le fil est moins nourri, même si sa qualité est supérieure. Ce n’est pas si simple de quitter.


La chambre ne devient lieu de créativité que quand j’y suis seul, et c’était déjà vrai dans ma jeunesse. […] Je pourrais presque écrire un petit éloge de la chambre à part.

Please do.


Le récit de la poursuite d’une œuvre est peut-être plus important que l’œuvre.

L’œuvre peut passer de mode, mais sa quête reste, parce qu’elle est celle de la vie […]

La quête me fascine parfois davantage que l’œuvre… s’il y a une œuvre qui la précède.


La souffrance regardée avec impuissance me traverse jusqu’à devenir souffrance en moi.

Écho à ma lecture de Samah Karaki.

Journal de mars de Thierry Crouzet

Revue de blogs #9

Et cela s’est fait assez naturellement […] non en fonction d’une position théorique, morale et réfléchie, mais de manière psychologique, épidermique.

Je crois bien que j’ai quitté Twitter, Le dernier des blogs
découvert via Karl

De même, je prends moins des décisions qu’elles ne se prennent, décantent en moi.

…

Reboot de 2 neurones & 1 camera

Assez incroyable que la crasse de la vitre devienne un élément graphique.

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Her teaching style, she liked to say, was not to lighten the burden of the student, but to make it so heavy that he or she would put it down…

You could say the worrier gets things exactly backwards. He’s so terrified that he might not be able to rely on his inner resources […]. In fact he should devote less energy to manipulating the future, and have more faith in his capacity to handle things once the challenge actually arrives. If it arrives, that is.

Meditations for mortals by Oliver Burkeman,
cité par Winnie Lim qui commente :

Why don’t I store my energy instead of worrying, so I can hoard enough of it to deal with it when shit happens?

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Je me souviens encore de la sensation de tes baisers sur ma bouche qui a duré des heures après que tu sois parti, tu étais imprimé sur moi.

Je me souviens que nous entrés dans l’eau en courant comme des gamins et que nous avons plongé sans savoir si elle était bonne ou pas, nous étions ensemble et c’était la vie en Cinémascope.

[…] j’étais hébétée de fatigue parce que l’amour, ce n’était pas reposant.

Je me souviens (2), Ma vie sans lui

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Ce qu’il y a de bien avec notre abominable époque, c’est qu’après des décennies à nous dire, mais comment les écrivains des années trente faisaient pour écrire comme si de rien n’était leur journal, sans trop refléter le gouffre vers lequel l’Histoire les amenait à sombrer ?, nous allons enfin le découvrir par nous-mêmes.

Fuir est une pulsion

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J’ai un gros problème avec les injonctions faites aux corps des femmes. Ce problème s’appelle la flemme. […] Rien à voir avec le féminisme, tout à voir avec une approche pragmatique de l’existence corporelle.

La crème pour célibataires, Sisters Cia

J’ignorais qu’on pouvait se marrer à propos d’une crème exfoliante, mais avec Sacrip’Anne, c’est chose possible.

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do NOT put in the newspaper that I’m a pervert : Marie Le Conte imagine ce qu’elle ferait si elle avait un superpouvoir d’invisibilité et, clairement, tu peux pas test le délire d’une insomniaque qui a passé des nuits à raffiner ses hypothèses.

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La précision. Le souffle. La concentration. […] Il s’agit de faire, de chercher, d’assimiler, d’appliquer, d’essayer. J’aime particulièrement voir que de séance en séance, le placement dans certaines postures se fait plus sensible. C’est parfois infime, le bassin qui bascule de quelques degrés, les bras qui s’abaissent, l’extension toujours plus longue. […]

J’ai […] les abdominaux pas douloureux mais existants […]

Meilleure description du plaisir des (légères) courbatures.

Si j’avais su que bouger, c’était d’abord s’écouter, puis se rencontrer […]

Bif-bof & périnée engagé, Tant qu’il nous reste des dimanches

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[…] « tu sais, je garantis pas que je vais aimer tout ce que tu partages » et ça a touché un truc. On résonne tous à des fréquences différentes ; le point de rencontre n’est pas l’œuvre en elle-même, mais l’échange des échos.

De fil rouge, Hypothermia

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Une remarque m’a fait rire : presque tout le monde respire mal. Ceux qui respirent bien sont… les fumeurs : inspiration vigoureuse en tirant sur la clope, expiration longue de la fumée. Ils stimulent leur système parasympathique.
Il n’y a pas que la nicotine qui détend, il y a aussi la respiration.

Fumer détend, Alice du fromage

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Je me suis rendu compte hier que j’étais plus simple dans l’écriture avant. Et c’est peut-être cela qui nous enferme quand nous écrivons de longue date sur nos carnets Web. L’impression que nous devrions être plus dense. Je vais tenter de m’alléger et de ne pas forcément écrire de la consistence.

Murs avec voix, Les Carnets Web de La Grange

Peut-être que ça va avec les années, et pas juste avec l’écriture : être dense des expériences passées, sédimentées ?
Ces revues de blog me permettent aussi ça : des remarques en passant, plus légères.

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Grâce à Karl, je découvre le blog Tentatives de Christine Jeanney, et accroche à ce journal de traduction de Virginia Woolf. La parenthèse sur la théorie de la fiction panier m’enchante :

pour faire court, Ursula K. Le Guin envisage le récit fictionnel comme une transmission qui reste d’une génération à l’autre, prenant souvent appui sur des faits de gloire, des faits d’arme, héroïques, la prestance du chasseur qui revient de la chasse au mammouth forcément célébrée, racontée et chantée, alors qu’il est possible que la tribu survive principalement grâce à la cueillette
mais remplir un panier de baies ou de graines, même si c’est essentiel, n’est pas vendeur, pas de frissons, pas de lames, pas de larmes
et puis ce sont souvent les femmes qui s’en occupent — ces décervelées hystériques
la théorie de la fiction panier veut renverser le rapport de force
se débarrasser un peu du héros
se concentrer sur ce qu’il y a dans les paniers et dans les sacs, ces graines de vie

Est-ce pour ça que je me retrouve à lire quasi-exclusivement des autrices ces temps-ci — pour regarder dans leurs paniers ? C’est tout juste si un nom masculin ne suscite pas de la méfiance de ma part (attention au mammouth dans la pièce), exception faite des poètes (ça part à la cueillette et pas à la chasse, un poète).

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[…] can I shorten the gap that exists between my negative spiralling and the realisation that I can break out of most of these spirals by reminding myself what is truly important?

The journey of coming back to our selves never ends.

People think that such focus on our selves is narcissistic. I argue that we seem self-absorbed precisely because we have no sense of self, so we are misled to pursue societal achievements and peer recognition thinking that they will prop up our sense of self. […] I offer a suggestion that there is a sense of self that exists that doesn’t require an external gaze to feel more whole.

Winnie Lim, ringfencing my self

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La liste de 100 souvenirs pour l’année écoulée a ricoché jusque chez Tomek : 2024, on fait au mieux sur Envisager l’infinir ! Maintenant, je veux goûter au fiadone.

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Ça va être bien, parce que ça l’est déjà.

Épiphanies, Ramblings of an adulescent