À en croire les critiques, Julieta ne serait pas un vrai Almodóvar : pas assez exubérant, pas assez loufoque, pas assez comique. Un drame, forcément… Et pourtant : des années 1980 flamboyantes, des femmes complexes, fortes et fragiles, lumineuses, aux sourcils épais, qui bouffent l’écran, des prénoms qui se prononcent avec la langue qui vient taper sur les dents ou rouler au fond de la gorge, Julieta, Antía, mère et fille, mer et père, mort, filiation et abandon, la tragédie grecque aux couleurs ibériques. Même dans le drame (surtout dans le drame ?) Almodóvar conserve son style, qu’il sait parfaitement abstraire de ses tics (il faut qu’il en soit conscient pour s’être auto-parodié dans la joie et la bonne humeur des Amants passagers). Son dernier film est sans doute pour beaucoup trop aldmodovarien et pas assez almodovaresque. Je trouve pour ma part splendide la manière dont il met en sourdine son extravagance stylistique pour laisser libre cours à celle de la vie, des destins qui s’y dessinent, et peint le drame en couleurs vives, étoffes rouges, villes et visages lumineux dans les remords et la joie.
Mit Palpatine