De la tragédie en hypokhâgne

         C’est épique en ce moment. Je ne parle pas des chevauchées intrépides mais plutôt des âpres luttes verbales ou joutes amicales.

 
Acte I : la scène des portraits

Scène 1. Salle 309. (non pas la 101, n’en déplaise aux amateurs de 1984).
Lecture du Misanthrope. Il s’est trouvé que Célimène était on ne peut mieux jouée par la coquette de la classe, j’ai nommé mademoiselle Miss Love and Potins. Ca doit être l’intertextualité inter-époques.

Scène 2. La cantine et son délicieux fumet d’huile frite pour la nième fois.
C’est le quart d’heure ragots et médisance, si tant est que l’on puisse réduire ce temps à seulement quinze pauvres petites minutes étriquées. Proposez, proposez ! Que pensez vous de C. ? Défauts, vices et manies. Que pensez-vous de X ? Pas grand-chose, tout juste mieux qu’Y. Et Z ? crime et châtiment… alphabet à la Molière.

 

Acte II : le dilemme cornélien

Doit-on ou non présenter des excuses au professeur d’anglais pour avoir quelque peu chatté pendant le cours ? [Je ne me sens pas concernée, le sommeil est silencieux.] Conciliabules dans les couloirs, dénonciations en salle des professeurs. Le verdict demain.

 

Acte III : la bataille d’Hernani

La salle 309.
La LS1 ; Boc en Dona Sol, grande et perchée sur des talons ; Le petit génie en Hernani, petit et fluet.

« Dona Sol, souriant.
Comme vous êtes grand ! »  

Rires et quolibets dans la salle.

 
Acte IV : « Le latin n’est pas une fatalité » dixit magister latinae

… c’était la réplique fatale qui a ponctuée une heure savonneuse (petites bulles comprises sur les copies)

 

Acte V :  rideau

Dodo.

La dissertation peut-elle être autre chose que la recherche du moindre mal ?

Thèse : en théorie, oui. La pensée qui s’emballe, l’argumentation qui se déplie, la plume qui se délie tandis que l’esprit court. La construction, le paradoxe, la vérité.

Antithèse : en pratique, non. La pensée qui se remballe, l’argumentation qui se replie, la plume qui s’arrête court tandis que l’esprit se dédit. Le choas, la contradiction, la correction (d’un trait noir, plus sévère que le rouge rageur).    

Synthèse : en supplication, pitié. Stop, pause. Je ne pense plus clair.  » La politique peut-elle être autre chose que la recherche du moindre mal ? »  Je vous en pose moi de ces questions ? 

 

La culpabilité sans sursis

     En fait l’Eglise l’avait bien compris : on ne prend pas les gens par les sentiments – terreur et pitié larmoyante versent trop rapidement dans le kitsh – on les prend par la culpabilité.

A toutes les sauces

     Pour vous vendre tous les desserts allégés du monde qui allègent surtout votre portefeuille. Avec 0% de sucre mais 50% d’aspartame, qui soit dit en passant a un pouvoir sucrant 300 fois plus important que le sucre (vieux restes des cours de première) et vous y rend donc encore plus accro. Vendredi dernier, je suis allée faire les soldes et dans la cabine d’essayage du printemps, une gentille affiche vous suggérait « Vous ne pouvez pas rentrer dans cette magnifique petite robe ? Ducon, j’essaye un pantalon… Essayez donc le programme spécial K ! En même temps, on peut toujours prendre une taille au-dessus… »

Or)donnez moins, je ferai plus.

       On ne travaille pas assez. Ne pas s’arrêter pour ne pas ensuite se dire que l’on aurait pu faire telle ou telle chose et surtout qu’aurait du. Commencer toutes ses phrases par « Il faut que… », virant au mode conditionnel en temps de découragement. Le travail pour le lendemain est fait lentement ; celui pour lundi en 8, totalement inutile au point de vue de l’organisation de votre emploi du temps, passe rapidement, en s’amusant.

 … DONt on ne sait que faire

      Pour que vous donniez –quoi que ce soit : sang, argent…- on va toujours vous montrer que vous vous rendez coupable en ne le faisant pas. Image d’atrocités, d’enfants qui ne crient plus famine seulement parce qu’ils n’ont plus la force de crier, grimace… Informer, choquer pour faire réagir ? Certainement. Mais parfois, je me demande si voir le sourire qui succède au don ne vous donnerait pas plus envie d’aider. Juste un éclat de bonheur, même fugace.

Vous êtes priés…

     Culpabilité. Je ne sais plus quel philosophe disait en avoir assez de la morale de l’ennui, qu’il voulait une morale de volonté et d’enthousiasme. Je ne sais plus qui, mais je suis d’accord.
Ca ne m’étonne qu’à moitié de lire dans notre cours d’histoire qu’à la Belle Epoque, même les croyants commencent à rejeter le dogme du péché originel. C’est tout de même plus encourageant de voir que l’on réussit à faire une chose à laquelle on s’est attelé, que de contenter (sans même satisfaire) la personne qui nous l’a commandée. Mais non, il faut : tournure impersonnelle – de la force divine ? Il faut qu’on vous écrase. C’est une sensation que j’ai souvent quand je rentre dans une église pour ce que j’y rentre…: l’architecture n’invite pas à se grandir, à s’élever au niveau des vitraux et de leurs saints. Elle vous balaie comme le misérable grain de poussière que vous êtes. Ecrasé par la pierre, les voûtes trop hautes aux clés plus qu’énigmatiques. En revanche, l’église où j’ai été avec la famille aux USA ( c’est maaal d’utiliser des abréviations anglophones…) était à taille humaine et je trouve que l’ambiance était beaucoup plus propice à exalter les nobles sentiments dont se réclame l’Eglise.

Et pour en finir, faites faire le culbuto à la culpabilité.

(sans oublier que faire faire se dit jubeo + prop. inf. )
Ne complexez pas sur vos kilos en trop. La dernière crème arnaque est là pour vous les faire perdre.N’attachez pas trop d’importance à ce bourrelet, ce pull le cachera et vous ira à ravir. J’assume mon âge avec la dernière crème antiride et je mange ce qui me plaît, puisque de toute manière, il n’y a plus de produits qui ne soient allégés. Sauf le Nutella, Dieu soit loué. Ne soyez pas timide, nous avons les moyens de vous faire parler. [ Nous avons l’intelligence de l’inintelligence de la communication !] Avec Hegel, on fait dans le travail du négatif, avec Carrefour, on positive.  

 

 

De la tragédie du cours de français

 

 

 

[ Où l’on voit que je suis très attentive au cours. Tout compris au schéma actantiel. ]

[ Merci à ma voisine pour les réveils salvateurs. ]
 
Pour vaincre un point d’honneur qui combat contre toi, 
Laisse faire le temps, ta patience et la prépa.*
 
* var. Laisse faire le temps, ta patience et l’HK.

Le spectre du concours blanc

       On en a envie depuis longtemps, on les réclame très fort depuis la semaine dernière, les vacances sont arrivées. Ca fait presque bizarre, de terminer comme ça brusquement sur une épreuve d’allemand (ça me rappellerai presque le bac pour un peu). Pour un peu, j’irai presque lire quelques pages du remplaçant d’Afriques noires [si vous n’avez pas suivi, c’est que vous êtes sourd : rattrapage ici], j’ai nommé La France : permanences et mutations. Presque. Tout est dans la nuance. Au bout d’une semaine de concours blanc, vous maîtrisez la nuance ou du moins les transitions acrobatiques entre des sous-parties, ou plus grave des parties entières in-raccordables. Mais dans une certaine mesure…. Certes, cependant… pourtant il convient de nuancer ce jugement… il n’en va pas de même pour… nonetheless… zwar, aber… sans oublier le mythique non solum sed etiam !

Un bilan du concours blanc ? Bah, on en a vu de toutes les couleurs. Petite décomposition prismique.

Rouge : la couleur de nos visages dans la chaleur estivale de la salle 309. C’est que l’activité intellectuelle, ça dégage, nous rappelle notre cher prof de français. Vous n’ouvririez pas les fenêtres ?
Autres mots-clefs : les yeux rouges à la suite de crises de nerfs ; les boules de Noël du sapin du hall ; le fourrage suspect de la tulipe de saumon au repas de Noël.

Orange : la grande tendance de cette année : la clémentine remporte tous les suffrages. Votre amie pour éviter d’avoir pris 10 kg à la fin de la semaine (du jeudi à jeudi) ponctuée par le repas de Noël. Et qui fout plein de jus sur votre table, mais soyons positifs, ça emporte les miettes de gâteau. [Du trafic de gateau d’ailleurs pendant les épreuves. Eh oui en hypkhâgne, l’économie n’est pas (toujours) monétarisée.] Autres mots-clefs : assortis aux clémentines, le pull et chaussettes de l’as de trèfle ; les « intro » et « ccl » au stabilo de Calliope.

Jaune : Fais gaffe, t’as un truc jaune. Blague désopilante adressée à I. qui portait un T-shirt jaune et si horripilante que Thalie et Erato n’ont pas manqué de me la ressortir avant chaque épreuve pour cause d’élastique jaune dans les cheveux.

Vert : couleur du yaourt de notre prof d’histoire, qui a purement et simplement pique-niqué devant nous. Le déjeuner du Roi, bien installé sur son estrade a comporté par la suite un yaourt mamie nova au miel, un Tupper wear gros comme un bac de salade avec des trucs non identifiés dedans * là tout le monde relève la tête, poussé du coude par son voisin, et se marre… le prof s’arrête la fourchette en l’air et d’un air très stoïque nous intime : « Ne vous laissez pas déconcentrer ». * et enfin de saumon fumé *on se se refuse rien*. Heureusement qu’on n’a pas eu le lever du Roi…
Autres mots-clefs : les bonnets de Noël portés à la cantine, verts. Fêtons Noël écolo.

Bleu : pour l’encre qui a coulé à flots. Je ne vous raconte pas le nombre de cartouches. Et les munitions qui viennent toujours à manquer au moment critique, en pleine transition (voir plus haut) ou en pleine attaque. La guerre des boutons (rayé, quoique…) des mots. « Battez vous avec le texte ! » nous encourage notre coach de latin. Ma crise de fou rire en pleine épreuve n’a pas désarmé le texte et ma voisine n’a bizarrement pas consenti à recevoir un coup de Gaffiot sur le crâne. Véritable épreuve de force, le texte a pourtant fait des victimes et certains se sont déclarés KO. Quelques écroulments sur le ring, le Gaffiot constituant un appui d’une hauteur parfaite pour servir de cale ou d’oreiller. [Mol ou dur, je vous le demande bien – ça, c’est la suite de cette histoire] De toute façon, la vérité et la note qui va avec s’obtient par « la souffrance, la patience et le travail du négatif ». Comme dirait l’as de trèfle ou le ptit génie : « Je souffre, là, je souffre ». A votre avis, pourquoi ça s’appelle une épreuve ?
Autres mots-clefs : le ciel grec en ressortant de l’épreuve fratricide du latin mercredi ou encore le ciel tout plein de brouillard duquel émerge la pointe d’une église…
(en même temps, à Versailles…)
( aaaaaaaaah Proust !)
… éclairée par un rayon de soleil. Le genre de paysage qui vous suggère qu’il existe sûrement une divinité quelque part, même si en l’absence de toute révélation, il n’y aura aucun éclair de génie dans votre copie.

Violet : les cernes, incontestablement.
Autres mots-clefs : la belette !! –> allez donc faire un tour chez Thalie.

Blanc : nos têtes livides, particulièrement après le latin, à l’exception notable d’Incitatus qui a failli se faire lyncher par les pains de la cantine quand elle a déclaré après l’épreuve s’être bien amusée. Tous les goûts sont à la cantine.
Autres mots-clefs : copie blanche. Je n’en ai pas vue…

Noir : y’a plus d’espoir ?
Si, si, c’est trou noir pour ce qui a précédé. Noir cinéma, noir réveillon, noir boîte, noir mascara.