Cadeau de Noël + maquillage = post gamin et girly

La trousse à pinceaux étalée sur le rebord du tiroir où s’entassent les fards et autres, fond de teint, rouges à lèvres, crème pour les genoux, pinces à cheveux (on a tous notre tiroir à bordel, mais le mien est dans la salle de bain et non ma chambre puisque cette dernière est un bazar à elle toute seule et que les tiroirs doivent être le seul endroit où tout est en ordre), une petite grimace dans la glace et c’est parti. Un maquillage tel que je puisse utiliser tous les pinceaux, le petit plat, pour l’ombre, le petit rond pour le halo, le tout fin biseauté, et un tout fluffy pour fondre les couleurs. Ces nuances de magazine de mode me font bien rire, mais les pinceaux en main, je m’amuse bien – le maquillage n’est pas un truc d’adulte mais bien une reconversion du gribouillage enfantin. Je me débrouille pour utiliser tous les pinceaux, en peu comme ceux qui découvrent que les polices ne se limitent pas au Time new roman et à Arial. Mais là où la mise en page surchargée de lettres de toutes les formes, en diagonales, avec une ombre, de toutes les couleurs donne un résultat somme toute immonde, la multiplication des pinceaux et des couleurs donne au contraire un aspect plus naturel et beaucoup moins peinturluré. Voilà ma découverte du jour, d’où je comprends mieux qu’en légende d’un visage nude, comme ils disent, on vous mette une liste de produits de beauté pire qu’une liste de lectures khâgneuses, et que la(premièrement)dite liste n’est pas uniquement là pour faire fonctionner simultanément toutes les grandes marques de maquillage. Sur ce, je m’en vais chez mon vieil ami Gibert pour récupérer de quoi me distraire de ces puérils divertissements. ^^

Rien

Les résolutions de tiennent jamais, même avant le premier de l’an. Je m’étais dit naïvement que j’allais poster tous les jours pendant les vacances, histoire de redonner un peu vie à ce coin moribond, et de voir si par effet d’entraînement les autres ne se remettraient pas à poster, ce qui m’éviterait de passer des heures entières sur l’ordinateur à presque rien faire – j’ai d’ailleurs découvert où se nichait une des failles spatio-temporelles : youtube, où il y a toujours une variation ou un extrait de ballet à regarder qui en propose d’autres qui en imposent d’autres etc. Toute activité exigeant de maintenir un tant soit peu son attention me paraît difficile. Je suis comme un flamby dont on aurait retiré la languette. Très belle image, vous en conviendrez – mais j’ai plein de trucs idiots dans le genre qui me viennent à l’esprit en ce moment. Peut-être le privilège des vacances est-il de pouvoir faire plein de projets et de n’avoir à en tenir aucun. Alors j’ai décidé de les prendre étymologiquement et de les remplir de vide, c’est-à-dire de remplir mon estomac de tous les goûters que vous pouvez imaginer ou regarder des vidéos de danse qu’on m’avait enregistrées et que je n’avais pour certaines encore jamais regardées (d’où par exemple, une d’un gala de l’ABT intitulée « Doc Balanchine », humpf). Le mal est contagieux. Comment expliquer sinon que ma mère finisse par scander le rythme de « il en faut peu pour être heureux » avec des petites cuillères, avant de plonger lesdites cuillères dans le pot de marmelade ?

Miroir, mon beau miroir…

… dis-moi si je suis bien placée.
Pour les danseurs, le miroir vous dit vos défauts en face et ne vous montre jamais sous votre meilleur profil (je hais cordialement les glaces latérales où je trouve toujours un superbe en-dedans). Il n’est pas simple reflet puisqu’il indique toujours ce qui manque – ou ce qui est en trop s’il s’agit d’épaules trop montées, par exemple. C’est de ce point de vue-là un traître. Doublement traître, car à vouloir s’attirer ses faveurs et vérifier qu’on ne lui déplaît pas, on finit par fausser une position jusqu’alors juste.

Il s’agit de se concilier le regard critique qu’il nous renvoie en le réfléchissant : on peut voir dans cette démultiplication qui fait du cours un corps de ballet un moyen de mise en scène. C’est lui qui agrandit la salle et outre le professeur, qui est moins un spectateur qu’un acteur à part entière (dans une pièce, ce serait le confident, celui qui, toujours là, permet aux autres personnages de se révéler au public) nous procure un public : nous-mêmes. On me taxera sûrement d’égoïsme, mais j’ai toujours trouvé faux ceux qui déclarent ne danser que pour le public. On danse d’abord pour soi, pour ce miroir qui nous fait sortir de nous-mêmes et nous permet ensuite de passer la rampe. Car sur scène, il n’y a personne – pas de public, duquel on est séparé par un rideau de lumières – seulement le cercle des danseurs. Comment pourrait-on danser en scène pour les autres, invisibles, si on ne danse pas d’abord en studio pour (le) soi (visible du miroir) ?

C’est aussi le miroir qui en nous procurant notre public permet de faire du cours une réelle préparation à la scène et non une série d’exercices de gymnastique. Les contemporains nous rétorqueront qu’il est meilleur de travailler en aveugle pour véritablement sentir le mouvement. Ce qui, une fois de temps en temps, ne fait pas de mal. Mais d’une part, ce n’est pas nécessairement parce que le danseur ressentira mieux le mouvement que le spectateur le percevra mieux. La danse reste bien un art de la vue (et de l’ouïe, bien sûr) pour le spectateur et il y a nécessairement une distorsion entre le senti et le vu de même qu’un peintre déforme la réalité pour lui être semblable (les rails convergent pour avoir l’air de rester équidistants), et qu’un auteur n’a pas besoin de ressentir la même chose que son personnage au moment où il l’écrit. D’autre part, le bon usage du miroir n’empêche pas le danseur classique de sentir (même s’il y a évidemment là un piège) : il lui indique seulement quelle est la sensation à retenir. On se tortille face au miroir, les hanches un peu plus en avant, les bras moins hauts, non plus, et, une fois la position juste trouvée, il s’agit de la sentir pour l’intégrer à son répertoire de sensations. Ce n’est donc pas au miroir mais bien à nous de réfléchir un peu avant de renvoyer les images.

(En plus d’égoïsme, vous pourrez me taxer de narcissisme)

Two lovers, un film à géométrie variable

 

 

Jamais deux sans trois. Encore faudrait-il savoir qui sont les deux. Comme on ne sait pas, on commence à trois. Mais l’affiche n’est pas juste*, il n’y a pas de triangle : Leonard n’hésite pas entre deux femmes, il est amoureux de Michelle et aimé de Sandra. C’est justement le fait qu’il ait à choisir alors qu’il a déjà fait son choix qui fait toute l’épaisseur du film. Ce n’est pas vraiment une comédie romantique. Leonard fait sourire lorsque sur le quai de la gare il s’absorbe dans la contemplation pour feindre la surprise d’être abordé par Michelle, lorsqu’il se rajuste pour faire impression, lorsqu’il se met à danser comme un malade toujours pour la même cause, mais il agace tout autant, par son corps maladroit, par son chewing-gum qu’il mâchouille comme si cela devait lui donner un style de beau gosse, par son soin à ménager ses parents ou une sortie de secours à ses amours, on ne sait pas vraiment. Il fixe rendez-vous à Sandra tout en guettant Michelle à la fenêtre : son crush irrationnel pour celle-ci ne suffit pas à faire oublier qu’il n’est pas vraiment réglo avec celle-là – sans pour autant être salaud. Il a du respect pour cette femme qui l’aime et qui ne peut pas ne pas apprécier. Ils sont du même monde, et pas seulement parce que Sandra est passée par ses parents pour approcher Leonard ou que ceux de ce dernier font tout pour les pousser dans les bras l’un de l’autre. Sandra est d’emblée à sa place dans l’appartement de Léonard, dans sa chambre aussi qu’elle visite comme une adolescente entre le plat et le dessert (c’est pour elle aussi que Leonard fait disparaître le portrait de son ex-fiancée), tandis que Michelle y passe une seule fois et fait le tour du propriétaire comme pour un état des lieux, s’étonne d’objets qui pourraient caractériser Leonard –étonnement poli et relativement indifférent. La plupart du temps, elle évolue dans un autre espace (un autre monde), dans son appartement de l’autre côté de la cour. On la voit toujours à sa fenêtre comme dans un tableau et au fonds elle n’est pas autre chose que cela, le tableau d’elle-même peint (ou plutôt photographié) par Leonard. Michelle n’est réelle qu’un instant, lorsqu’on l’aperçoit dans un autre triangle qu’elle forme avec Leonard et son amant qui ne quitte pas sa femme pour elle ; on aperçoit alors sa vie, indépendamment de Leonard. Il n’y a donc pas un triangle, mais plusieurs, et encore, ils ne sont pas équilatéraux.

 

2+1, toujours :

Leonard et Michelle + Sandra, toujours poussée sur le devant de la scène par les parents.

Leonard et Michelle + l’amant de Michelle, qui la soustrait à Leonard = l’amant et Michelle + Leonard, visiblement pas à sa place dans le restaurant où il est invité à dîner avec le couple au titre de bon ami devant évaluer les chances (ou plutôt les risques pour lui) que l’amant quitte finalement sa femme. [Two lovers qui aiment également en vain]

Leonard et Sandra + l’obsession puis le souvenir de Michelle c’est un film à géométrie variable. [Two lovers qui aiment de façon différente, Leonard dans l’absolu de l’instant, Sandra dans la tendresse de la durée des macarons !]

 

Un film à géométrie variable : des triangles à foisons et peut-être même un quadrilatère – comment faire autrement quand on a two lovers et qu’ils ne le sont ni l’un de l’autre ni de deux personnes différentes ? La dissymétrie équilibre le film à merveille. C’est également ce qui fait que si l’on n’a pas une comédie romantique, on n’a pas pour autant une tragédie. Le tragique est refusé dès le début : on ne mettra pas de mot sur la tentative de suicide qui débute le film, Leonard lui-même refait surface. Pas de tragédie à la fin non plus. Michelle, comme on pouvait s’y attendre, repart avec son amant, qui a (on ne l’aurait peut-être pas espéré) quitté sa femme, tandis que Leonard passe la bague au doigt de Sandra. Pas de joyeuses équations de comédie romantiques où les compagnons délaissés par la formation d’un nouveau couple en forment un à leur tour, certes, mais la tragédie est laissée hors-champ (les prétendants éplorés de Sandra et la famille de l’amant de Michelle, qui restent à l’état de mot). Ou simplement évitée. La fin est bien définitive, et pourtant, elle ouvre sur un autre avenir (peut-être pas radieux, il est vrai). Pas de héros tragique abandonné, il y a toujours quelqu’un pour vous tendre la main, serait-ce sous la forme d’un gant échoué sur la plage. Un gant que Sandra a offert (enfin la paire, hein) à Leonard et qui tombe de sa poche alors qu’il balance la bague qu’il avait achetée pour Michelle vers la mer (on notera au passage que la plage est une approche plus pacifiée que le ponton d’où Leonard tente de se noyer au début). Un souvenir du geste de Sandra qui est autre chose qu’une roue de secours. La bague destinée à Michelle et passée au doigt de Sandra a un petit goût amer, mais Leonard a vraiment de la tendresse pour elle. Ils parviendraient presque à faire mentir Balavoine et son « aimer est plus fort que d’être aimé ». Si Leonard revient vers Sandra, c’est aussi parce qu’il ne peut s’empêcher d’être attiré par celle qu’il obsède. Son crush pour Leonard est peut-être tout aussi irrationnel que celui de ce dernier pour Michelle, mais Sandra saisit Leonard dans son individualité – elle fait véritablement attention à lui. (Comme si l’intérêt pour l’autre ne naissait que d’une certaine focalisation/fixation : après tout, cela expliquerait pourquoi dans les films les deux personnages qui se détestent et se retrouvent coincés en famille/ dans un ascenseur/ dans un magasin de jouet le jour de Noël etc. finissent toujours par tomber dans les bras l’un de l’autre).

Au final (désolée, ce n’est pas la fin mais « su
ite et fin »), je ne sais pas si j’ai aimé. Vous me direz peut-être, comme nos profs, que ce n’est pas le propos, à moins de chercher à partir de là pourquoi on a ou non apprécié. Bah, j’ai fait l’inverse, d’abord cherché à comprendre pourquoi une impression bizarre, incomplète, qui m’empêchait d’être véritablement enthousiaste, mais aussi de ne pas aimer. A présent, je crois pouvoir dire que j’aime ce film – à défaut de l’avoir aimé. Je ne me suis pas ennuyée une seule seconde ; on a beau savoir ce qui va se passer (ou alors c’est parce que j’ai lu avant la note très juste de Melendili), il y a une certaine densité qui soutient l’attention. Le film a simplement le défaut de sa qualité : la dissymétrie qui fait sa richesse est aussi ce qui laisse une impression bancale. Ni comédie, ni tragédie ; une sorte de drame, qui fascine par son épaisseur psychologique, mais qui comme tout drame tombe dans l’entre-deux. Un absolu qui n’est pas idéal (Leonard a bien été un bref moment avec Michelle) mais qui n’est plus possible (et en devient presque impossible) ; une vie qu’il faut continuer par un effort incessant.

 

(deux astérisques, mais en fait, c’est la même)

* l’affiche n’est pas juste aussi avec Leonard en costard alors que, balourd, il se trimballe dans un anorak et n’a rien du séducteur ; avec Sandra, qui ne fait pas du tout vamp’ séductrice.

* cette photo (ci-dessous, comme on dit dans les légendes de magazines) que l’on retrouve souvent non plus. Il n’y a guère que l’escapade sur les toits (*résister à la tentation de faire une synthèse des lieux et une nième ou plutôt septième interprétation avec celui-ci*) qui ait un petit côté The Eternal Sunshine of the Spotless Mind. Contente d’ailleurs de voir que je ne suis pas la seule à qui cette analogie est venue à l’esprit – autre note très juste, ce me semble, qui vaut le détour – rien que le nom de ce blog est miamesque.

 

 

Métaphore éphilochée

J’ai tout de suite vu qu’on voulait nous embobiner. Mais comme il n’était pas question de se débiner, j’ai attrapé le premier fil directeur que j’ai trouvé. Avec, j’ai brodé quelques arguments et j’ai cousu mes transitions de fil blanc. J’ai tiré tout le fil ; puis je suis arrivée au bout du rouleau.

C’est seulement après qu’on m’a dévoilé ce qui m’avait préoccupée : dans la guerre est-elle la préoccupation du droit politique ? il fallait voir que la pré-occupation est ce qui occupe avant. Je savais que je filais un mauvais coton. Là, on arrache le point d’interrogation et on en fait le crochet du capitaine crochet pour crocheter une écharpe qui servira à s’étrangler à la remise des copies un crochet par un agréable déjeuner avec une camarade khâgneuse. Parce que dans vacances, il y a du vide, alors il faut commencer à le faire aussi vite que possible. Dans sa tête à défaut du bureau où les feuilles et les promesses de devoirs s’entassent. Mais le devoir est secondaire en vacances, il découle du droit, et non plus le droit de dormir découle du devoir bâclé ou accompli. Bazardez-moi toutes ces antiquités. Ce sera peut-être un moindre mal : après tout, le devoir est parfois plus agréable de ce qu’il n’est pas (encore) une contrainte. On en reparlera certes la veille de la rentrée. Pour le moment, VALE !