Films 2022

Janvier : Madeleine Collins (ciné), En attendant Bojangles (ciné), The Trial of the Chicago 7 (Netflix), Annette (ciné), Sybil (TV), Belle (ciné), Twist à Bamako (ciné), La Place d’une autre (ciné)Février : Une jeune fille qui va bien (ciné), Crazy stupide love (Netflix), Passing (Clair-obscur sur Netflix FR), The King (Netflix)Mars : Viens, je t’emmène (ciné), Belfast (ciné), Le Chant du loup (Netflix), The Dig (Netflix)Avril : En corps (ciné) / Mai : Polisse (TV), Downton Abbey II (ciné) / Juin : Au poste (VOD) / Juillet : I’m your man / Ich bin dein Mensch (ciné), Decision to leave (ciné), Tempura (ciné)Août : American Psycho (Netflix), Bolshoi (Amazon Prime) / Septembre : Plan 75 (ciné), Point d’équilibre (Amazon Prime), Premier contact (Netflix) / Octobre : Prisoners (Netflix), Radioactive (Amazon Prime) / Novembre : What we do in the shadows (VOD), Chat noir chat blanc (Netflix ?) / Décembre : Armageddon Time (ciné) / Casino (Netflix) / Get out (Netflix)

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Le premier constat du bilan ciné de l’année, c’est que je ne vais plus beaucoup au cinéma. Celui de Roubaix ne passe que des films très populaires, presque toujours en VF (un blockbuster, ça se voit en VO, déso pour le snobisme). Aller au cinéma implique donc de se rendre à Lille, le temps de trajet se rapprochant dangereusement de la durée du film ; la tentation des plateformes de streaming est alors grande. Mon abonnement virant au mécénat, j’hésite depuis des mois à résilier ma carte UGC, mais j’ai à chaque fois l’espoir de retrouver la motivation de sortir davantage (et la carte UGC, c’est aussi l’assurance de pouvoir faire pipi comme on veut quand on est en ville).

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Quelques tendances :

  • Un début d’année marqué par Virginie Efira dans Mademoiselle Collins, Bojangles et Sibyl.
  • De judicieux choix de midinette : Timothé Chalamet dans King, mais surtout Eddy Redmayne dans The Trial of the Chicago 7 (très bien rythmé, des répliques au cordeau) et François Civil dans Le Chant du loup (avec Paula Beer en prime).
  • Quelques bons films français (si, si) : Le Chant du loup précédemment cité, mais aussi Polisse et Viens, je t’emmène.
  • D’émouvants noirs et blancs avec Passing et Belfast.
  • Toujours un œil tourné vers l’Asie : excellent Decision to leave, Tempura tout à fait dispensable, Plan 75 perturbant et émouvant (une dystopie sans effet spéciaux, qui colle quand même des frissons dans le dos : pour ne pas s’effondrer sous le poids de sa population vieillissante, la société japonaise propose aux personnes de plus de 75 ans de se faire euthanasier, contre un petit pactole à dépenser auparavant et un suivi téléphonique… qui vont justement rattacher à la vie l’héroïne qui s’était résolue à se la laisser ôter).
  • Des films clairement dispensables : j’ai déjà cité Tempura mais la palme revient à Radioactive, biopic le moins rythmé de l’histoire.
  • Des tentatives pour partager l’humour du boyfriend : Au poste, What We do in the Shadows, Chat noir chat blanc. Même si j’entrevois en quoi ça peut être drôle, rien à faire, ça tombe à plat pour moi ; je trouve ça poussif. Hors comédie romantique (comment ai-je pu passer à côté de Crazy Stupide Love si longtemps ?), il me faut des parades d’intelligence – traits d’esprit, ironie – quand lui affectionne la simulation de l’idiotie pour souligner la bêtise ambiante et s’amuser de son absurdité. Je suis beaucoup plus réceptive à ses découvertes en matière de thriller (Prisoners, Get out) et science-fiction (engouement pour Premier contact, avec questions de langage et paradoxes temporels).
  • Si je devais n’en retenir qu’un, sans hésitation : I’m your manIch bin dein Mensch en VO.

Séries 2022

 

Plutôt que d’ajouter le nombre d’heures passées à regarder des séries aux statistiques faramineuses de mon téléphone, je préfère voir ce qu’il en reste et vous donner envie vous aussi d’y laisser quelques soirées.

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Normal People

Vu sur Arte replay –
dispo sur france.tv jusqu’au 15 mars

Heureusement que Melendili m’a avertie de l’existence de cette courte série avant l’arrêt du replay : je suis rapidement tombée amoureuse du personnage principal. Un beau personnage masculin bien écrit, a approuvé Melendili. Je pensais au personnage féminin, incroyablement belle et brillante mais difficilement aimable.

On est clairement du côté du mélo plus que de la comédie romantique, avec un couple qui ne cesse de se manquer et de se rejeter, remuant un passé-passif-agressif — des histoires de classe sociale, de confiance et de soi abîmés, ébréchés, qui font que l’un et l’autre sont toujours prêts à se saborder. C’est une histoire magnifique, jusque dans son dénouement à rebrousse-poil, avec des personnages à la psyché fouillée et probablement les plus belles scènes de sexe-tendresse que j’ai jamais vues (des scènes avec un véritable enjeu narratif où le sexe n’est pas une performance ou une manière d’acter une conclusion, mais un espace d’intimité où l’on se découvre dans la friction).

À voir si : vous avez un cœur caramel mou.
À ne pas voir si : vous avez un cœur caramel dur.

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Black Mirror

Presque tous les épisodes des saisons 1 à 4, sur Netflix

Une éternité après tout le monde, je découvre cette série qui n’a de série que le nom, puisque les épisodes, confiés à des réalisateurs différents, sont totalement indépendants ; ils n’ont en commun que leur noirceur. Le boyfriend a soigneusement sélectionné des épisodes pour m’y faire entrer progressivement, privilégiant les dystopies aux thrillers… que j’ai fini par regarder (parfois derrière une main ou une épaule) tant ils sont virtuoses et intelligents. Le niveau de stress est pourtant de taille à tester l’efficacité de son déodorant : un épisode de Black Mirror et je pue d’une sueur âcre comme si c’était moi qui avais été traquée pendant une heure.

Parmi les épisodes qui m’ont le plus marquée :

  • presque feel good : Hang the DJ (malgré le titre), Chute libre
  • sur le deuil : San Junipero (mélancolique), Bientôt de retour (creepy et dur émotionnellement)
  • proprement terrifiants : La Chasse, Metalhead

À voir si : vous avez quelqu’un derrière qui vous cacher.
À ne pas voir si : vous êtes seul chez vous et/ou n’avez pas mis de déo.

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Les Chroniques de Bridgerton

Saison 2, sur Netflix

C’est téléphoné, évidemment, mais quel plaisir de passer quelques heures au téléphone à bitcher en bonne compagnie !

- Viens voir le bébé, Eloïse. - Pourquoi ? Il a changé ?

À voir si : vous aimez l’esprit British & bitchage.
À ne pas voir si : vous êtes allergiques aux comédies romantiques.

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Drôle

Saison 1, sur Netflix

Je n’ai pas vraiment ri mais j’ai pas mal souri, parce que c’était drôle, oui, mais surtout touchant. Pourquoi arrêter la production alors qu’on tenait enfin une bonne série française bien rythmée ?

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The Handmaid’s Tale

Saisons 1-5, sur Amazon Prime et OCS

Coiffes blanches, manteaux rouges, couleurs et rang impeccables. Lumières douces, diffuses, divines presque. Visuels contrastés, organisés, adoucis. L’univers de la servante écarlate est incroyablement esthétique et ce n’est pas un hasard, comme le confirmera par la suite son négatif, le monde « normal » que nous connaissons, au rendu terne et bordélique. L’esthétisation de l’horreur loin de la gommer la renforce ; la force graphique de l’image traduit la fascination que peut exercer la société dépeinte, souligne sa dangerosité. J’ai regardé les premiers épisodes comme une proie paralysée face à son agresseur, prise dans une fascination morbide et viscérale.

La prise ne s’est pas desserrée, sauf peut-être à la fin de la saison 2, quand on impute à son personnage une décision moins cohérente que pratique pour jouer les prolongations pendant une nouvelle saison (j’ai boudé pendant quelques jours avant de reprendre le visionnage). J’en ai passé, des heures avec June Osborn, Serena Joy Waterford et Fred Waterford — la servante, l’épouse et le mari. L’intérêt grandit à mesure que les jeux d’alliance entre ces trois personnages créent des relations qui ne peuvent plus être simplement nommées, mille-feuille d’intérêts divergents-convergents-divergents, séduction, manipulation, jalousie, entraide, résistance, vengeance… Cette complexité psychologiques fait que les premières saisons en huis-clos sont pour moi les plus fortes, même si les enjeux de politique internationale des saisons 4 et 5 réservent leur lot de tensions stimulantes, après une saison 3 un peu flottante entre zoom in et zoom out.

[Prise de conscience en écrivant ce post] C’est probablement ce changement d’échelle qui a fini par me rendre exaspérants les gros plans constants sur le visage d’Elisabeth Moss : autant cela se justifie dans la cadre d’un huis-clos, où tout est filmé au plus près des personnages, traduisant leur marge de manœuvre très étroite, autant la répétition de ce procédé dans un cadre plus large prend des allures d’appels empathiques trop appuyés pour ne pas devenir un brin kitsch (et contre-productif : on s’agace plus qu’on ne s’émeut).

À voir si : vous ne l’avez pas vu.
À ne pas voir si : vous avez des traumas (beaucoup de violences et de viols).

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The Boys

Saisons 1-3, sur Amazon Prime

Pris dans les logiques du vedettariat, les superhéros en oublient leur mission première (les sauvetages ne valent plus que par leur dimension spectaculaire), voire trempent carrément dans des scandales politico-financiers incluant sexe, drogue et meurtre. Quant aux good guys sans superpouvoir qui se mettent à lutter contre les dérives des sup‘, ils ne tiennent pas longtemps dans cette inversion des rôles — les fins, les moyens, le pouvoir, quoi. La réalisation ne lésine pas sur les tripes et l’hémoglobine, mais la satire prédomine toujours sur le carnage — sanglant sur tous les plans.

L'équivalent de Superman en train de prendre des selfies avec des ados

À voir si : vous avez aimé l’épisode Avengers de Joss Whedon.
À ne pas voir si : vous ne supportez pas la vue du sang.

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L’Opéra

Saisons 1-2, sur OCS

Mauvais, mais addictif comme un bon nanar. Et ça me fascine : qu’est-ce qui fait que c’est mauvais, alors que le scénario transpose plutôt intelligemment quelques épisodes de l’Opéra de Paris, et qu’on y trouve quelques bonnes piques répliques ? Certes, les danseuses ne sont pas actrices, ni les actrices danseuses, et le bon sentiment ambiant n’aide pas. Mais même lorsqu’on se prend d’affection pour Hortense (Gromard) et que les enjeux se nuancent dans les questions de harcèlement soulevées par la deuxième saison, il manque quelque chose ; probablement : une direction d’acteurs et une réalisation à la hauteur. Hormis les scènes de danse contemporaine, auxquelles la caméra donne du corps, tout est exposé assez platement, par des dialogues sans mystère et des plans… des plans comment, justement ? Je n’ai pas le bagage suffisant pour étayer mon impression : est-ce un choix de caméra ? d’angle ? de lumières ? de montage ? Je serais vraiment curieuse de découvrir l’analyse d’un cinéphile sur les raisons de cette apparente pauvreté.

Alors pourquoi regarder ?

  • Pour faire frétiller sa balletomane intérieure, ravie de retrouver des lieux et des danseurs connus à la dérobée, et de deviner les chorégraphes ou épisodes ayant servi de support à la fiction (le passage de Benjamin Millepied à la direction, la question de la diversité, le rapport sur le harcèlement…). Il se peut que j’ai légèrement saoulé le boyfriend à force de name-dropping.
L’assistant du nouveau directeur (inspiré de Benjamin Millepied) annonce que ça va changer avec lui. Réponse dans un franglais zozotant absolument par-fait : « They always say this mais ça change jamais vraiment. »
  • Pour faire frétiller sa midinette intérieure : mentionnons pudiquement les noms de Raphaël Personnaz et Loïc Corbery, aux faux airs de Nicolas Le Riche (je ne le connaissais pas, mais vu les réactions que son nom a déclenché lorsque je l’ai mentionné sur Twitter, on ne m’a pas attendu pour crusher).
  • Pour dire : on parle de moi (enfin de nous, les blogueurs) !
« – Ça ne vous intéresse pas, les blogs ? / – L’opinion de 3 danseuses ratées, pas tellement. » Et plus loin, lorsque les danseurs attendent les résultats du concours de promotion : « – Ça fait une heure que les pronostics des blogueurs le donnent vainqueur. / – C’est des conneries, les blogs. »
  • Pour bitcher sur les faux pas : les mains pelles à tarte de Flora, dignes d’une débutante ; les tutus cheap en lycra ; le cunni fait à une danseuse en tutu (entre l’entrejambe en tissu et le collant, ça semble difficile)… Difficile de consentir longtemps à suspendre son incrédulité avec ce genre de détails à répétition. Mais ça tombe bien, les épisodes se regardent très bien téléphone à la main, prêt à screenshoter et twitter — médisance et réjouissance.
La maîtresse de ballet, maîtresse ès phrase assassine. Ici face à un danseur qui prépare Varna : «C’est poli, c’est lisse. Comme un mauvais amant, on attend que ça passe. » / Le même personnage a aussi cette saillie bien envoyée : « La direction de la danse, c’est comme Matignon : c’est l’enfer, mais ça ne se refuse pas. »

"Un audit, c'est pas fait pour chercher la vérité…" "mais pour dire qu'on l'a cherchée"

  • … pour connaître la suite, tout bêtement. Eh oui. À force, le second degré s’émousse et laisse place au premier degré, celui des violons et des histoires personnelles, traumatiques, amoureuses ou battantes. Alors que j’ai repris la saison 2 en me demandant si j’allais regarder ce navet poussif jusqu’au bout (le contraste avec The Handmaid’s Tale piquait très fort), je me suis surprise à prendre de plus en plus de plaisir (coupable) au visionnage. De là à remarquer que ce glissement est concomitant de l’apparition de Loïc Corbery…

Et parfois, on a de bonnes surprises, comme cette nuance bien formulée, répondant à la question « Il faut souffrir pour atteindre l’excellence ? ».

"On peut s'imposer une souffrance en tant que danseur." "Mais pas l'infliger en tant que professeur."

À voir si : vous êtes balletomane.
À ne pas voir si : vous êtes en compagnie d’une balletomane sans l’être vous-même.

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Lovesick

Saisons 1-3, sur Netflix

Des personnages attachants, une intrigue amoureuse et des épisodes de 20 minutes : pile qu’il me fallait pour mes soirées de novembre, Melendili a visé juste.

Dylan, infecté par la chlamydia, rappelle toutes les anciennes partenaires auxquelles il est susceptible de l’avoir transmise. On passera sur l’absence sidérante de préservatif dans ce dispositif narratif : chaque épisode ou presque fait ainsi en flashback le récit d’une rencontre passée — et il y en a un certain nombre, le jeune homme ayant tendance à tomber amoureux comme on change de chemise. Évidemment, un arc narratif plus long se dessine au fil des épisodes, entre oscillation amoureuse et mauvais timing.

L’ensemble pourrait être potache, mais cette dimension est évacuée-concentrée dans le rôle de Luke, le coloc qui ressemble à Alexander (le bon pote un peu à la masse dans Buffy) mais se comporte comme Barney (le séducteur invétéré dans How I Met Your Mother). Dylan, lui, partagerait plutôt le côté paumé-dégingandé de Josh (dans Please Like Me), boulet mi-attendrissant mi-exaspérant errant entre Abigail et Evie, deux jolis portraits de jeunes femmes, plutôt bien fouillés.

Au final, je me suis laissée (sur)prendre par la saveur douce-amère des relations et des émotions qui n’ont plus vraiment de nom à force d’être enchevêtrées, le sentiment d’être avec la bonne personne n’effaçant pas le chagrin des histoires achevées ou manquées.

(Big up aux Britanniques pour le titre original de Scrotal Recall.)

À voir si : vous avez envie de douceur.
À ne pas voir si : vous êtes allergiques aux romances.

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Westworld

Saisons 1-2, sur OCS

Une série taguée science-fiction avec une forte esthétique western ? Autant dire que le boyfriend avait fort à faire pour contrebalancer mon a priori. Mais ce qui m’insupporte dans les westerns, c’est l’errance. Or on fait tout sauf errer dans Westworld : les scénaristes savent clairement où ils vont, même si nous spectateurs, beaucoup moins. Mais il y a un sens, on le sait, on le sent, on le cherche, les personnages aussi et cette quête est au centre même l’histoire. Des questionnements philosophiques se nichent sous (ou plutôt entre) les couches temporelles narratives qui se superposent sans signe distinctif de prime abord, ménageant des retournements logiquement impeccables qu’on n’aura cependant pas vu venir — c’est virtuose. D’autant que chaque résolution ne résout rien, rouvrant la question de l’identité, de la conscience et du libre-arbitre.

Vieil homme dans sa chaise de dirigeant, avec des moulages de visages blancs derrière lui

Tenancière de bordel en corset, assise dans un laboratoire

Cow-boy et cow-girl à cheval

Il y aurait clairement une lecture leibnizienne à faire de la série, avec ses personnages qui s’arc-boutent contre une réalité où le libre-arbitre revient à être incliné mais pas nécessité à faire telle ou telle action — mais incliné quand même : je nous revois en khâgne révoltés contre cette butée. Leibnitz essaye de ménager la chèvre et le chou en articulant déterminisme divin et libre-arbitre humain : il faut en effet que l’homme soit libre de bien ou mal agir pour que Dieu puisse être lavé du soupçon d’avoir créé le mal… sans pour autant que sa toute-puissance soit remise en cause (le chèvre et le chou, je vous dis). Dieu ne créerait pas des hommes mauvais par essence, mais dotés d’un caractère tel qu’ils puissent devenir mauvais (mais aussi théoriquement bons) par une successions de choix propres. La nuance vaut ce qu’elle vaut et, khâgneux, nous nous débattions avec Leibniz et le commentaire de texte pour essayer de sauver le libre-arbitre humain dans cette étroite limite entre des choix possibles mais improbables en raison de ce qui fait que nous sommes qui nous sommes (rien ne m’empêche de prendre la décision opposée, mais je ne le fais pas, sinon je serais quelqu’un d’autre). Dans Westworld, le déterminisme divin est remplacé par le déterminisme du code informatique, avec en filigrane cette question lancinante : obtient-on des comportements fondamentalement différents si on programme chaque action d’un être artificiel ou si on le dote d’un code de base, cornerstone, qui définit son caractère et incline ses actions sans les nécessiter ? Transposé aux humains : sommes-nous réellement libres de nos choix quand un passé nous constitue ?

À voir si : vous ne l’avez pas vu.
À ne pas voir si : les paradoxes temporels vous donnent des maux de crâne.

Version-con-re

Tout est toujours moins difficile qu’on l’imagine.
Mais aussi : tout est toujours moins facile qu’on l’imagine.
En évitant la contradiction : tout est toujours moins insurmontable et plus laborieux qu’on l’imagine.

Tout est toujours moins difficile qu’on l’imagine.

Me reconvertir comme professeur de danse ? C’était tellement loin, une lubie parmi d’autres. Pourquoi ne pas faire plutôt du chocolat (une spécialisation en sus du CAP pâtisserie, qui exige plus ou moins de se lever à 6h du matin), de l’ostéopathie (5 ans d’études), du graphisme (ma passion pour les secteurs encombrés ne se dément pas) ou de l’UX design (réaction allergique au bullshit nécessaire pour faire rétroactivement passer l’intuition pour le résultat d’une méthode) ? Pourquoi pas professeur de danse, alors ? Certes, je n’ai aucune affinité avec les enfants, mais rien n’empêche d’enseigner à des adultes une fois le diplôme en poche — diplôme spécifiquement créé pour protéger les enfants, mais chut, il faut bien s’illusionner un peu si on veut faire la moindre chose dans la vie.

Je suis revenue à la danse comme je m’en étais éloignée : de manière presque inconsciente, évitant précautionneusement d’y regarder de trop près. Après tout, demander au ministère de la Culture la transformation de ma médaille de conservatoire en équivalence pour l’EAT* n’engageait à rien… J’ai envoyé un dossier et reçu la dispense, tamponnée sur un livret de formation.

Au point où j’en étais, je pouvais envoyer un dossier de candidature, ça n’engageait pas à grand-chose : 5 places pour l’une des deux formations publiques de France avec une filière dédiée à la danse classique (et la seule sans audition), c’est peu, je risquais de n’être pas retenue. Autant voir avant de fantasmer, il serait toujours temps d’aviser. J’ai envoyé un dossier et reçu un mail d’admission.

– Oui ; mais il faut parier. Cela n’est pas volontaire, vous êtes embarqué. Lequel prendrez-vous donc ?

J’ai fait semblant de croire que la décision avait été prise par l’école. Admise, il aurait été bête de reculer. J’ai annoncé que je m’éloignais au boyfriend tout frais, trouvé un appartement le premier jour de visite à Lille et Roubaix, dit au revoir à ma psy, qui m’a parlé de flèches plus faciles à mettre quand on savait où les décocher, posé ma démission, fait mes cartons, déménagé, bref tout enchaîné pour éviter de penser à quoi tout ça engageait. J’étais embarquée.

Mais aussi : tout est toujours moins facile qu’on l’imagine.

J’étais consciente qu’il y aurait du travail (notamment pour l’épreuve de musique qui à elle seule m’a convaincue que je ne pourrais pas bachoter les UV théoriques seule dans mon coin), mais confiante sur ma capacité à reprendre des études (les ayant quittées seulement 7 ans auparavant, souligneront les mauvaises langues qui n’auront pas oublié mes interminables master 2). Après tout, j’ai toujours été une bonne élève…

La bonne élève bonne à rien

C’est justement là le problème que je n’avais pas été anticipé : j’ai toujours été une bonne élève. Attentive, consciencieuse, appliquée, en un mot : docile. En reprenant place à un petit bureau d’étudiante, j’ai repris mes réflexes d’étudiante, tous mes réflexes d’étudiante, ceux qui aident à rédiger un devoir ou à apprendre un cours, mais aussi ceux que j’avais oubliés avec délice, que je pensais morts et enterrés : la suée au moment de prendre la parole au sein d’un grand groupe, la déférence envers le professeur, fût-il intérieurement jugé sot, l’infériorité intériorisée face à celui-ci, la perfection-sinon-rien, sinon tu es nulle, indigne d’être aimée, à commencer par toi-même (surtout par toi-même) — bref, les affres classiques de la bonne élève, pas bête mais disciplinée, corsetée de discipline anxieuse. Manifestement, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas.

Sauf qu’entre-temps, entre 20 et 30 ans, je suis devenue quelqu’un d’autre que cette bien-surnommée psychokhâgneuse. Et comme les amateurs de films de paradoxes temporels le savent, il est dangereux de court-circuiter les temporalités. Je ne peux pas à la fois avoir 20 et 34 ans, assumer mes idées et acquiescer à ce qui les contrarie, les taire et les soumettre au débat, avoir conscience de ce que je sais sans me laisser terrasser par ce que je ne sais pas. Trop de choses sont encodées de manière binaire chez moi, tout ou rien. Ça crée des courts-circuits, qui me renvoient parfois inutilement loin, avec une gestion émotionnelle de collégienne. J’ai cru tenir quelque chose en identifiant le déséquilibre hormonal créé par une pilule que mon corps ne supportait plus, mais cela n’a (évidemment ?) pas tout résolu. Aujourd’hui encore, dans ma deuxième année de reprise d’études, je bataille pour sortir d’une adolescence qui se rouvre parfois sous mes pieds sans crier gare.

L’allergie au bullshit

Je n’aimais déjà pas beaucoup la fac dans ma vingtaine (la tendance qu’ont les universitaires à passer plus de temps à polir leur boîte à outils qu’à s’en servir…) ; ça ne s’arrange pas avec la trentaine. Je deviens intolérante au bullshit, pire qu’au lactose. J’ai des envies furieuses de gribouiller de grands HORS SUJET dans les marges des plaquettes de formation. Il ne suffit pas d’inscrire « corps » devant « immigration et frontières » pour obtenir un cours qui fasse résonner la danse. Pas plus que l’existence de Danse avec les loups ne constitue une raison suffisante pour inscrire la lecture d’un essai d’éthologie sur le pistage des loups dans le cursus. Et on ne donne pas Surveiller et punir en lecture autonome à des L2 (non philosophes). Libre au professeur de nous faire faire des liens inattendus, mais c’est à lui de les amener dans son cours, au lieu de balancer l’ouvrage en nous demandant de lui trouver une justification. Oui à l’ouverture, non à l’absence de lien. (Et cette impression latente d’être impertinente si je souligne ce manque de pertinence…).

Loup perché sur un rocher qui est en réalité un bras de danseuse ; dans le ciel, des constellations où les étoiles sont remplacées par des empreintes de loup ; sur la neige, des traces qui reprennent la notation de danse Feuillet
Le lien entre danse et pistage des loups n’a aucun fondement, mais je me suis bien amusée à réaliser cette illustration, j’en suis même un peu fière (les traces dans la neige imitent la notation Feuillet). J’ai décidé de prendre du plaisir là où je pouvais en trouver, à défaut de sens. (Avez-vous vu la main ?)

À partir de quel degré d’ouverture n’a-t-on plus de lieu propre ? Quand tout est de la danse, celle-ci perd toute spécificité, ravalée au rang de métaphore. C’est un peu dommage quand on sait qu’il n’y a en France que deux départements universitaires consacrés à la danse (à Lille, donc, et à Paris 8). À quelle légitimité peut-on prétendre quand on lorgne partout ailleurs que sur son sujet ? La plaquette annonçait pourtant l’étude des danses scéniques occidentales. En 1 an et demie, on peut compter sur une main les références aux danses classique, jazz et urbaines — la danse contemporaine raflant la mise.

Bullshit, bullshit, bullshit… je fais un usage disproportionné de ce mot, ces derniers temps. J’imagine qu’il traduit un ras-le-bol global de ce qu’on me fait étudier (ou de ce qu’on ne me fait pas étudier). J’ai la fac en ligne de mire, mais l’école n’en est pas entièrement exempte. À force de l’invoquer à tort et à travers, je commence à être écœurée par la choréologie, outil pourtant fort pratique pour analyser des composantes du mouvement qui passent généralement sous le radar. Je n’entends plus le propos, seulement une litanie un rien sectaire. Lorsque l’enseignante dessine une énième fois sa rosace sur le paperboard, j’ai envie de mordre : avec ça, on a tout et rien dit. La répétition a vidé le schéma de sa substance, et l’on s’on mis à aduler l’outil au lieu de s’en servir. Apprenez-moi ce que vous savez, je vous en remercie vivement, mais par pitié ne faites pas semblant ; je sais désormais quand vous n’en savez pas davantage.

Dessin d'un pentagramme et une rosace labanienne à 5 pétales, avec le texte "Merci de ne pas confondre invocation démoniaque et invocation labanienne"

Mais bullshit, ne serait-ce pas non plus un mot fourre-tout que j’utilise pour mettre à distance ce qui échappe à mes attentes ? Un rempart que brandirait ma réticence au changement ou ma culpabilité de ne pas arriver avec un bagage technique suffisant ?

La crise de légitimité

Ce regard critique devrait me permettre de compenser mes réflexes de bonne élève docile, et de trouver la position qui pourra être la mienne en tant que professeur. Mais la contradiction affole mon curseur intérieur plus qu’elle ne l’aide à se positionner. À remettre en cause tout ce que je croyais savoir sur la danse ou même sur moi, je finis par douter de tout, à commencer de moi.

On n’arrête pas de nous répéter que nous sommes avant tout des danseurs, que nous devons rester des artistes en devenant professeurs, et cette lutte contre l’idée que les professeurs de danse seraient des artistes de seconde zone est noble. Sauf que c’est la réalité que nous renvoie le monde de la danse : j’ai échoué à devenir une interprète professionnelle, je n’étais pas assez douée ou travailleuse pour cela, et à une ou deux exception près, il en va de même pour le reste de la promotion.

Il n’en reste pas moins vrai que les qualités de danseur et de pédagogue ne se recoupent que partiellement : un excellent danseur ne fait pas forcément un bon pédagogue. Mais quid de la réciproque, ne cesse de me souffler une petite voix intérieure : un danseur moyen peut-il se révéler excellent pédagogue ? Comment transmettre des choses qu’on n’a pas (pas encore ?) soi-même maîtrisées ?

J’essaye de me rassurer comme je peux en me répétant ce mantra : tous les maîtres nageurs n’entrainent pas l’équipe de natation olympique ; certains apprennent juste à nager. Et j’essaye de me dépatouiller avec ça, avec l’exigence de la danse classique et son corollaire, un apprentissage particulièrement ingrat. J’essaye de lutter contre l’élitisme que son idéal a instillé en moi. Je me demande parfois si j’ai bien fait de me lancer dans cette reconversion quand je me surprends à avoir un réflexe de répulsion devant des storys d’apprenties danseuses pataudes. Heureusement, il y a aussi des moments en studio où le jugement s’évapore dans la relation : mercredi dernier, j’ai croisé le regard d’une jeune élève à fond dans son épaulement Raymonda, toute tordue, tout sourire ; en me voyant sourire, elle s’est mise à sourire plus grand encore. Ça, là, c’est ça que je cherche. Je cherche ma place, quelque part en quiconque, pas bien sûre de l’exercice à venir alors que la musique va bientôt commencer.

 

* EAT = épreuve d’admission technique, préalable nécessaire pour s’inscrire à la préparation au diplôme d’État.

Bulles de BD estivales

First thing first, les chroniquettes

Une année sans toi, de Luca Vanzella (scénario) et Giopota (dessin)

Une année sans toi : le temps de consommer une rupture amoureuse déjà actée au moment où démarre cet étrange récit. Après avoir fait la connaissance du narrateur en train de parler à une version miniature de son ex dans la paume de sa main, on pense en découvrant les bizarreries suivantes qu’il s’agit également de métaphore pour exprimer les affects, mais il faut rapidement se rendre à l’évidence : on nage en plein délire de science-fiction. L’histoire n’a plus cours, on découvre le 31 décembre quelle décennie sera chargée pour l’année à venir. Les figurines des saints étudiés par le narrateur apprenti historien parlent entre elles. Il neige des lapins blancs (apparemment la bataille de boules de neige leur est indolore, je précise pour les âmes sensibles).

C’est une suite de trouvailles et de bizarreries qui surprennent autant qu’elles peinent à faire monde, disparaissant le plus souvent avec le chapitre qui les a vu naître. Au final, j’ai l’impression que le récit affectif et l’univers de science-fiction s’encombrent mutuellement ; j’en viendrais à souhaiter me débarrasser du premier pour explorer le second et découvrir la cohérence qui en ferait l’histoire.

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Appelez-moi Nathan, de Catherine Castro et Quentin Zuttion

J’étais très contente de trouver cette bande-dessinée à la médiathèque, car j’aime bien les dessins de Quentin Zuttion et je ne comprends pas la question trans. Je ne comprends pas : pas au sens où je ne veux pas en entendre parler. Au sens où cela met complètement en échec ma faculté d’empathie par imagination.

Je comprends que le regard de la société pèse énormément quand on est attiré par une personne du même sexe que nous, ou que son sexe ne rentre pas en ligne de compte dans l’attirance qu’on peut avoir pour elle.

Je comprends qu’on rejette une féminité ou masculinité donnée comme naturelle alors qu’elle est culturellement façonnée.

Je comprends qu’on puisse se sentir extrêmement mal dans sa peau et dans son corps, qu’on refuse de se sentir défini par ses attributs et ses limites.

Personnage noyé dans un océan de seins
(J’ai trouvé très juste cette transcription de la sensation d’être débordée par son corps.)

Mais je ne comprends pas comment se projeter physiquement dans le sexe opposé peut aider à résoudre le mal-être initial. Je n’arrive pas à me départir de l’impression (fausse, comme le scandent les témoignages des concernés) qu’il s’agit d’une tentative de « normalisation » par rapport aux attentes genrées (si femme, je deviens un homme, je cesse d’être garçon manqué) ou à l’orientation sexuelle (si femme, je deviens un homme, je cesse d’être lesbienne – cf. la planche ci-dessous).

J’ai du mal à ne pas y voir une fuite de soi dans l’Autre – terrible en ce qu’elle me semble utopique, tendanciellement vouée à l’échec : même avec des opérations, peut-on jamais se sentir tel qu’on se serait senti en étant directement né dans le sexe auquel on se sent appartenir ?

J’espérais que cette bande-dessinée m’aiderait à saisir ce qui manifestement m’échappe, mais je n’ai réussi qu’à reconduire mes incompréhensions à sa lecture. C’est seulement à le dernière planche que j’ai senti qu’on commençait à toucher du doigt ce qui peut-être…

C’est quoi être un homme ? une femme ? Je ne comprends pas que la question n’arrive qu’après la transition… Est-ce une manière de se construire en ayant au préalable détruit au maximum ce qui nous définissait ? Une tentative de survie quand notre condition d’être sexué – et donc mortel – nous terrasse ? Je ne suis que perplexité – soulagée seulement de ne pas me sentir concernée par ce qui a l’air d’entraîner une grande souffrance identitaire.

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Déracinée. Soledad et sa famille d’accueil, de Tiffanie Vande Ghinste

Très séduite par le trait au crayon de couleur, les arbres aux troncs bleus et l’inventivité capillaire de cet univers graphique, j’ai en revanche eu un peu de mal à percevoir cette tranche de vie de famille (d’accueil) comme une histoire à part entière – l’impression d’être restée en surface des relations qui y sont esquissées.

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Les heures passées à contempler la mère, de Gilles Lahrer (récit) et Sébastien Vassant (dessin)

Il est rare qu’une BD soit aussi bien écrite. D’expérience de lectrice, quand le texte d’une bande-dessinée se fait littérature, il prend le pas sur le dessin, lequel se trouve relégué au rang de prétexte à étaler les mots, à les aérer par de l’image là où la poésie se contente du blanc. Or ici, l’équilibre a été préservé ; on n’est pas tenté de courir d’une ligne à l’autre en sautant par-dessus les cases entre lesquelles le récit aurait été fragmenté. Gilles Lahrer a vraiment le sens des dialogues – jusque dans le monologue intérieur de l’héroïne, écrit avec la même dynamique.

Gilles Lahrer est probablement meilleur dialoguiste que scénariste, d’ailleurs ; j’ai toujours un peu du mal avec l’ajout in extremis d’une information retenue pendant tout le récit lorsque celui-ci n’a pas besoin de suspens pour fonctionner… La complétude que l’on attend n’est pas narrative, elle est émotionnelle.

(Rupture, écriture, famille, parentalité)

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La Fille dans l’écran, de Manon Desveaux et Lou Lubie

D’habitude, lorsqu’une bande-dessinée a deux auteur, l’un est au scénario et l’autre au dessin. Ici, les deux autrices dessinent de concert : à gauche, Manon Desveaux dessine le personnage de Coline ; à droite, Lou Lubie se charge de Marley… jusqu’à ce que les deux se rencontrent et fusionnent. J’ai embarqué la BD en voyant le nom de Lou Lubie, découverte dans Goupil ou face, et si son inventivité graphique et narrative est toujours aussi réjouissante, je me suis surprise à m’attarder davantage sur les cases de Manon Desveaux, au trait plus en accord avec ma sensibilité. L’histoire est spoilée par la couverture (l’histoire d’amour lesbienne comme argument marketing ?), mais cela importe finalement peu au regard de son récit tout en humour et sensibilité.

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Fumée, de Chadia Loueslati et Nina Jacqmin

Vous vous souvenez du premier épisode de Mad Men ? On avait presque envie de tousser tellement ils évoluent dans un univers enfumé. Même impression ici avec ce récit muet où toute la vie d’un fumeur, atteint d’un cancer, se déroule en flash-blacks. La pirouette narrative finale, joliment trouvée, illustre de manière percutante le concept d’addiction et fait écho à la citation d’Hippocrate imprimée sur le rabat de la couverture : « Avant de chercher à guérir quelqu’un, demandez-lui s’il est prêt à renoncer aux choses qui l’ont rendu malade. »



Picorage hors-contexte

Extrait d’Une année sans toi, de Luca Vanzella (scénario) et Giopota (dessin)

En voyant cette case, j’ai eu l’impression de voir la gare d’Ivry-sur-Seine. C’est idiot, les auteurs sont italiens, toutes les gares se ressemblent, ce ne sont pas les mêmes lampadaires, et pourtant, à chaque fois que l’image surgit devant moi, c’est Ivry qui surgit avec. Déjà vu.

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Distributeur de boisson avec au choix : eau sale, fange liquide, truc chaud, bouillon noir, infusion douceâtre
Extrait d’Une année sans toi, de Luca Vanzella (scénario) et Giopota (dessin)

On est d’accord que ça correspond à : thé noir, chocolat chaud, soupe, café et thé à la menthe, right ?

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Le perso sort son appareil photo de cartons en disant "Te voilà toi". Une petite vignette à droite indique que la batterie est vide.
La Fille dans l’écran, de Manon Desveaux et Lou Lubie

À. Chaque. Fois.
Fonctionne aussi avec la liseuse (enfin fonctionnait, parce que je l’ai manifestement égarée).

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Présentation reprenant celle de Qui veut gagner des millions ? Question : "Je supervise la gestion des risques combinatoires basés sur l'homogénéisation, dont les impacts financiers." Réponses proposées : "Comme c'est intéressant…" / "Quoiii ?" / "Ok, cool !" / "C'est bon, les financiers !"
Extrait de La Fille dans l’écran, de Manon Desveaux et Lou Lubie

Illustration parfaite de quand on ne sait pas quoi faire de la réponse à la fatidique question « Qu’est-ce que tu fais dans la vie ? » Parfois, je suis soulagée d’être partie en reconversion professionnelle juste pour ne plus éprouver en miroir la gêne des gens à qui je répondais rédactrice technique. J’avais même pris l’habitude de m’excuser par avance, rédactrice-technique-je-sais-c’est-pas-glamour-désolée (bizarrement tout le monde n’est pas Llu, hyper enthousiaste quand il est question de documentation).

Note à moi-même : penser à modifier la question en « Qu’est-ce que tu aimes faire dans la vie ? »

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L'héroïne pique son sushi en utilisant sa baguette comme un cure-dent. Sa copine la traite de vandale. Réponse : "Je travaille toujours les sushis à la mono-baguette."
Extrait des Heures passées à contempler la mère

« Je travaille toujours les sushis à la mono-baguette. » Cette réplique est parfaite. Tout à fait un truc qu’aurait pu dire Melendili à l’époque où elle travaillait elle aussi les sushis à la mono-baguette. En meuf reloue, je me suis sentie obligée de lui envoyer une photo à la lecture ; en meuf ultra-reloue, j’ai trop envie de le raconter ici sur le blog. Vraiment, j’adore retrouver des gestes anodins mais pas si communs dans les textes ou BD que je lis.


Si vous avez scrollé jusqu’ici, n’hésitez pas à me dire si vous préférez la partie chroniquette ou la partie cases hors-sujet avec digression personnelle. Je serais de plus en plus tentée de m’en tenir à la seconde partie (mais la control freak en moi à du mal à lâcher sur l’archivage personnel).