Le petit cheval bossu

J’allais ajouter d’Alexeï Ratmanski, mais, comme pour d’autres classiques qui ont connu plusieurs chorégraphies, le ballet est ici attribué au compositeur, Rodion Chtchedrine (il faut que je m’en souvienne – mais pour cela, il faudrait déjà que je parvienne à le prononcer).

Palpatine se félicitait d’avoir la corpulence du héros (mais pas ses renversantes attitudes renversées, je le crains) ; il l’aurait également pu de ne pas avoir été taillé à l’image de son acolyte : dans la file d’attente pour les places de dernière minute, nous avons frisé l’émeute lorsqu’il m’a fait signe de le rejoindre alors que je discutais déjà depuis une vingtaine de minutes à un mètre de lui, peu encline à forcer l’entrée dans la cohue. B#4, qui m’a identifiée à la tache orange de mon sac à dos (signalétique de spectacle) me raconte qu’elle a fait un Casse-Noisette avec thermos, dans le froid, où les gens se poussaient et dénonçaient avec véhémence toute tentative de resquille, fût-elle involontaire. L’esprit de Noël sans doute. Nous n’étions lundi que le premier novembre mais aujourd’hui les décorations sont installées tellement en avance qu’il n’est guère surprenant que nous nous soyons fait enguirlander. Palpatine de se faire l’avocat du père Fouettard : « Il faut les comprendre, ces vieux, c’est sûrement leur dernière chance de voir le Mariinski. »

Le Mariinski au Châtelet. J’ai bien failli rater cette soirée ; Le petit cheval bossu, dont je n’avais jamais entendu parler, ne m’évoquait nullement un ballet. C’en est un merveilleux, pourtant – traversé d’êtres fantastiques dont la présence n’est pas discutée et néanmoins ne laisse pas d’émerveiller. De temps à autres, le môme de la rangée devant moi éclate de rire, parfois à retardement, comme si son jeune âge ne lui avait pas encore permis d’élaborer les modèles de la farce, qu’il nous suffit, adultes, de voir esquissés pour que nous sourions d’un air entendu. Il faut au môme un plus grande nombre de répétition avant que le mécanisme ne se fasse sentir et son rire part toujours précisément au moment où s’émousse celui que je ne laisse pas échapper, retardant ainsi le moment où l’adulte blasé se ferme à ce qu’il voit. Et c’est vrai que les frères du petit paysan sont fidèles à l’esprit de la vodka, deux larrons pas bien dégourdis dont les jambes vont en tous sens ; qu’Ivan lui-même est un peu fou (follet), et que le Tsar, auquel il vendra ses chevaux, a (dixit le gamin) « un chapeau de Père Noël », rouge et pointu. Je vous vois lever un sourcil circonspect : un paysan, le Tsar, hum ? C’est qu’un conte, surtout dansé, autorise le grand écart.

L’histoire est délicieusement alambiquée, pour peu qu’on l’ait en tête pour comprendre ce qui se passe sur scène. Heureusement, B#4 avait prévenu et nous avons sagement décrété un atelier lecture avant le lever de rideau, avec révision à l’entracte. En allant guetter un rôdeur, Ivan attrape une cavale qui lui offre en échange de sa liberté deux étalons (mains à l’égyptienne, habillés à la Elvis Presley, oh yeah !) et un petit cheval bossu qui devient son rusé compagnon et nous offre ainsi des manèges où cavalier et canasson sont parfaitement à l’unisson. Ils réussissent pourtant chacun à garder leur style et ainsi ne jamais abandonner leur personnage au profit d’une danse qui deviendrait ornementale : Leonid Sarafanov est un Ivan fluet aux gestes vifs et déliés tandis que Grigori Popov, sa monture, est plus nerveux et incisif. Les deux maigrichons sont de fabuleux danseurs et il faut bien les tours suivis à la seconde de la fin pour nous rappeler que c’est technique. En attendant, le jeu l’emporte et les compagnons piaillent au milieu des oiseaux de feu – ce sont mes couleurs, mais aux tutus je préfère encore la lumière rougeoyante projetée depuis les coulisses sur le torse nu du jeune paysan.

Pendant qu’ils caracolaient, les frères ont dérobé les chevaux pour aller les vendre en ville, au marché. C’est évidemment l’occasion de faire briller le corps de ballet, tout de vert vêtu (!), et de faire alterner des groupes de demi-solistes. J’aime beaucoup les danseuses tsiganes, leur petites chaussures noires, leurs robes amples et colorés, leurs roulements d’épaules… Les nourrices, même avec des fichus jaunes sur la tête, sont splendides, éplorées dans de grands développés en quatrième devant, bras en supination au ciel. Quant aux chevaux qui nous ont mené à ce divertissement, le Tsar en (petite) personne se trouve intéressé. Ivan survient à ce moment pour les récupérer ; il ne s’oppose pas à la tractation, mais choisit en échange le chapeau du chambellan, lequel se roule par terre d’être ainsi remplacé – et le petit paysan de partir pour les appartements royaux.

Je ne sais pas si la sagesse retourne à l’enfance, mais le Tsar était un « petit » vieux qui trépigne dans son pyjama rouge et se fait dorloter par ses belles nourrices, qui le font manger, jouent avec lui, le chatouillent et lui font la lecture avant de le border. Le chambellan (Youri Smekalov – j’aimerais bien le revoir, tiens) est là pour nous rappeler que nous sommes à la Cour et qu’on y intrigue. Malgré sa tenue de joker avec croix sur la poitrine et rond sur les cuisses, et sa manière machiavéliquement toonesque de tourner le buste pour tourner la tête en se frottant les mains (gantées de blanc), ce n’est pas bien méchant : il pique à Ivan sa plume d’oiseau de feu et l’amène au Tsar, qui nous déclenche ainsi une petite vision et fait un caprice pour qu’on lui ramène dare-dare la demoiselle qui lui est apparue. Coups de sabots pour marquer le départ : Ivan et le petit cheval bossu sont repartis pour un petit tour de manège…

Au deuxième acte, forcément, les compagnons trouvent la demoiselle (Alina Somova) qui ne met pas longtemps à frotter les oreilles du petit cheval (il hennit de plaisir, Palpatine comprend pourquoi) et à se laisser entraîner par Ivan, dont elle a du modérer les ardeurs pour avoir relevé une trop grande déférence. Encore un de ces moments tendrement comique où l’absence de demi-mesure est moins caricature qu’enthousiasme naïf.

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De retour près du Tsar, Ivan lui présente la jeune fille à regret. Lorsqu’elle entame la même danse qu’avec Ivan, celui-ci s’assoit sur le lit du Tsar, tout dépité. Mais s’il est agréable à la demoiselle de se faire courtiser par une tête chapeautée couronnée, se marier à un petit vieux qui est essoufflé au bout de quelques pas de danses (espèces d’arabesque sautillées tout à fait comique pour traduire le souffle court) ne lui dit pas plus que cela ; elle pose alors comme condition au mariage l’obtention d’une pierre qui repose au fond de l’océan. La pierre n’a pas de pouvoir particulier et ne sert qu’à prouver que la demoiselle sait parler au vieux Tsar un langage qu’il comprend bien – le caprice. Avant de me décider pour la soirée, j’avais fait un tour sur youtube et trouvé un extrait sous-marin. Je me demandais comment on y arriverait ; c’était pourtant simple, j’aurais du m’en douter : comme un cheveux sous la soupe. Quelques pas de cheval et c’est reparti pour de nouvelles aventures.

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Au milieu des flots qui ondoient (groupe resserré de danseurs cagoulés de blanc, snake en cascade – malgré un argument ancré dans la tradition, Alexeï Ratmanski développe une chorégraphie émaillée d’accents relativement modernes), ils rencontrent Yekaterina Kondaurova, Cavale revenue sous les traits de Princesse de la mer, tout en jambes et en présence imposante. Tandis que Palpatine avait déjà commencé à fantasmer dessus en Cavale (la perruque rousse), c’est à ce moment que je la découvre – royale, vraiment. Elle me plairait presque davantage que la demoiselle.

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[Ne cherchez pas à zoomer pour la voir, il s’agit d’une autre représentation.][Un drôle de tête à l’envers était dessinée sur le costume… comme un reflet de Narcisse intégré ;
en revanche, pas trop compris pourquoi des détails de visage sur les larges tuniques des danseuses tsiganes…]

Lorsque le Tsar lui offre la pierre qu’Ivan lui a remis, la demoiselle invente une autre épreuve, de plonger dans un chaudron d’eau bouillante. Mais le Tsar n’a nulle envie de prendre son bain, d’autant qu’il a goûté l’eau et que cela lui a brûlé le doigt ; il demande à ce qu’Ivan passe le premier. Enfer et damnation, mais le petit cheval bossu est là, jette un sort et non seulement Ivan en sort indemne, mais il est encore métamorphosé en tsarévitch.

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Il ne reste donc plus qu’à faire passer le Tsar à la casserole (les boyards ont alors vraiment l’air de mirlitons avec leur toque sur la tête) : on obtient ainsi un beau petit couple royal qui prépare son mariage à grand coup de variations.

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Cela pourrait être totalement niais, c’est en fait naïf, au sens où on le dit parfois des peintres : c’est coloré, vif et amusant ; peu de décors, réduits à quelques formes géométriques, maison ou soleil stylisés ; on ne prend pas la pose en arabesque mais on y saute beaucoup, les personnages virevoltent dans d’incessants changements de direction. En fait de brillant, c’est surtout scintillant, la technique diffractée dans une multitude d’entre-pas incisifs ; on brosse à petits traits une peinture fort vivante de tout ce petit monde cahotant, où le merveilleux n’en est pas moins relevé par une petite touche de cruauté rapidement oubliée, et où la bonne fée est jouée par un petit cheval bossu et rusé, malicieux à souhait. Il n’était pas en bois mais j’aurais bien fait un nouveau tour de carrousel.


[Pourquoi diable est-ce que je ne trouve aucune photo du petit cheval ?]

Ainsi jouait-on Strauss et Mozart

 

À la Cité de la musique, vendredi soir. J’ai avalé mon en-cas en regardant le bourgeois délocalisé, visiblement perturbé par les bancs en skaï gris en lieu et place des banquettes de velours rouge. Dans ce gros volume moderne qu’est la cité de la musique, on comprend mieux pourquoi on lui accole toujours l’adjectif de « petit ». Ici, même les ouvreuses ont l’air moins sage et le cheveux plus punk.

On retrouve une certaine décontraction chez le chef-d’orchestre, qui a laissé tombé la veste pour la chemise, débraillée. Il faut dire que la queue de pie aurait été par trop engonçant pour Andris Nelsons qui ne ferait pas un mauvais skieur : toujours en flexion, il est souple sur le genou et a ainsi la détente nécessaire pour sauter les bras en l’air (sauter, oui, avec les deux pieds qui décollent du sol), reculer le buste lorsque les vents l’emportent, les mains ramenées contre lui ou encore se tapir derrière son pupitre pour intimer le silence aux violons. C’est sportif. Heureusement, il n’a pas sauté l’échauffement : l’atmosphère crépusculaire des Métamorphoses de Strauss invite à une certaine retenue ; il revient à la musique seule de s’épancher – hors d’un développement prédictible ou simplement mémorisable. Ainsi que l’indique déjà le titre au pluriel, pas de métamorphose spectaculaire et singulière, mais des métamorphoses innombrables qui jouent sur toutes les cordes sans pour autant finir par dénaturer le morceau initial. Les variations sont continues si bien qu’on n’a paradoxalement pas l’impression que ce soit très varié, sans pour autant jamais s’ennuyer. Ce mouvement perpétuel qui ne se fige jamais vraiment dans une forme qu’il développerait, je me le représente sous formes de volutes, quelque chose qui se reprend sans cesse et dont il est fascinant d’essayer « de savoir enfin clairement,/ ce qu’il est et ce qu’il était » (en effet, si « Personne ne se connaîtra soi-même », Goethe, dans des vers que Strauss devait initialement mettre en musique, nous enjoint d’y travailler chaque jour).

J’aime beaucoup, je flâne avec la musique et découvre ainsi cette salle de concert dans laquelle je n’avais jamais mis les pieds (j’avais seulement fait un tour au musée). Nous sommes dans la galerie supérieure, une unique rangée de sièges qui fait le tour (l’ovale) de la salle, régulièrement interrompue par les piliers. Du coup, de loin, en face, on a l’impression d’avoir à faire à de petites loges d’où quelques figures émergent dans un clair-obscur, aussi lisses que les avant-bras qui les entourent pour la plupart. Il y a une paire d’yeux qui brillent dans le noir aussi – des yeux de hiboux qui appartiennent probablement à une grand-mère avec de petites lunettes toutes rondes qui n’ont pas subit de traitement antireflet.

Le deuxième morceau est plus brillant ; il s’agit du Concerto pour piano n°20. Ce qu’il y a de bien avec Mozart c’est que, même lorsqu’on ne connaît pas, on connaît quand même. Et inversement, on ne connaît jamais assez bien pour ne pas être surpris par une complexité plus grande que l’inscription aisée dans la mémoire nous l’aurait fait croire. C’est réjouissant comme un divertissement bien mené et partagé avec une société raffinée – une fête mesurée et donc pleinement appréciée. On laissera néanmoins la pianiste en reste, comme au fond d’un piano-bar : avec son haut en lamé doré qui semble sortir tout droit de chez Pimkie, la tête complètement rentrée dans les épaules et ses gestes peu gracieux, Milhaela Ursuleasa aurait du mal à jouer la galante. Ivre de musique, elle tangue pour passer les pages de sa partition et s’accoude à son bar piano après avoir d’un geste ample gratifié l’orchestre de son invitation à poursuivre – seulement on hésite entre l’arabesque d’une révérence et le salut autrement urbain d’un gamin peu amène. D’ailleurs elle se lève parfois de son tabouret pour s’y rasseoir en tapant du pied. Mais ce qui me colle limite un fou rire, c’est qu’elle chantonne. J’ai d’abord cru que c’était une vieille femme un peu nostalgique de n’avoir été vraiment mélomane, mais personne pour lui intimer le silence et, malgré le son atténué par la plaque en plexiglas sur laquelle on s’appuie (c’est un peu dommage pour le premier Strauss, mais pas plus mal pour le dernier, qui n’a pas souffert d’être assourdi – enfin on imagine, parce que ce n’est pas précisément l’adjectif qui vient à l’esprit), le chant se fait régulièrement entendre, plus ou moins distinctement ; il n’est pas certain que cela soit dans ses cordes si celles-ci ne sont pas uniquement vocales. Heureusement ses doigts sont plus agiles, même si son attitude laisse planer un soupçon de discrédit sur son jeu. On a beau faire, l’imagination humaine reste la même depuis Pascal et son savant dont les travaux ne sont reconnus qu’une fois présentés en tenue occidentale – la mienne s’est mise en branle et maintenant j’ai l’impression que les mains du chef-d’orchestre, agitées de rotation au niveau du poignet, tournent par a-coups des robinets pour régler le débit de musique. Cela ne m’empêche pas de la boire comme du petit lait et de me réjouir de la note parfaitement salée. Ainsi chantait Ursuleasa.

La trêve de plaisanterie s’établit après l’entracte et sans plus de jeu de mot aucun, c’est Ainsi parlait Zarathoustra. J’a-do-re. Déjà, pour en finir avec cette tentation grandiloquente, cela commence par une apothéose (je connaissais cet extrait, sûrement par l’Odyssée de l’espace, comme le programme me rend encline à le croire, mais j’aurais cru qu’il terminait un morceau ; que nenni, il le commence !). C’est absolument génial, de commencer par une apothéose : l’homme est mort, vive le Surhomme ! Là, tout est dit, il ne reste plus qu’à faire. Là, c’est formidable, tout peut arriver et pendant une demie-heure cela donne ; les six cors et les huit contrebasses donneront une idée de la puissance, celle du volume sonore étant encore bien inférieure à celle de la composition. Il paraît que « musicalement, le compositeur, bien que rompu aux orchestrations les plus subtiles, y « écrit gros » parfois » ; parfois, justement, j’aime cet emportement de l’intelligence qui envoie au diable la délicatesse (raffinement névrosé en puissance), un peu comme un Hugo qui déborde ses rythmes ternaires. Les moments plus posés rayonnent par contrecoup d’une étrange sérénité et cela débouche chez Strauss sur une magnifique fin qui nous sèvre de la musique tout en donnant l’impression de la poursuivre plutôt que l’achever : deux accords alternent sans que l’on perçoive pour autant l’absence d’une réponse concluante comme l’aporie qui doive mettre fin au dialogue. Cela pourrait reprendre (comme des braises) et pourtant cela cesse, mais rien n’est éteint : voilà, il faut poursuivre, persévérer, continuer à écouter l’écho de Zarathoustra. Je vais penser à me mettre à lire Nietzsche.

Le petit ailleurs de Louis Garrel

« – Le Petit tailleur, ça me dirait bien.
– Hum ?
– De Louis Garrel.
– Grumpf.
– Cela ne dure pas bien longtemps…
– Grumpf.
– Y’a Léa Seydoux.
– Il faut que je vois ce film.
– Tu vois qu’on est fait pour s’entendre. »

 

 

La Nouvelle Vague à l’âme

Malgré toutes les références aux années 1950-60 que je laisse le soin aux cinéphiles chevronnés de trouver, le moyen métrage de Louis Garrel n’est pas un film d’époque, ni de celle de la Nouvelle Vague, ni vraiment de celle d’aujourd’hui, dont tous les éléments qui permettraient un ancrage par trop agressif ont été gommés. Cela aurait aussi très bien pu se passer ailleurs que dans la capitale, si Paris n’était justement cet endroit fantasmé qui n’existe nulle part. Le temps et le lieu ne relèvent ici que du conte, qui cisèle son histoire dans une fascinante miniature (petit tailleur, quelques quarante-cinq minutes).

 

 

D’ailleurs, l’histoire est surtout histoire de filmer de belles images ; presque juste de belles images, mais justes : des gestes. Ceux du tailleur, les mains rassemblées autour du travail de l’aiguille, qui lui donnent la posture humble d’une vieille personne, comme ceux qu’Arthur, l’apprenti tailleur, porte à Marie-Julie. On prend la mesure de son amour lorsqu’il prend celles de son corps endormi, le drap froissé autour des hanches, une exploration au mètre, sous toutes les couture, avant de confectionner une robe de main de maître. Il l’habille de son regard et de son désir, d’une robe banche avec des bandes noires, graphiques, rendant plus cruel encore qu’un autre la déshabille (Arthur ramasse la robe, reprend son amour).

J’adore la scène où il la détaille ; la caméra filme son visage à elle et il énumère : la bouche, le nez, un œil, un autre œil ; puis la caméra ne donne vie à son blason surréaliste, reproduit chacune de ces parcelles (l’œil, on dirait une photographie de Man Ray) et donne raison à Arthur, il ne peut la voir en entier, quand bien même l’entier serait résumé dans le visage aimé. Pour la voir, il ne lui faut pas la voir, mais la recomposer par l’imagination – perception étrangement juste : il l’imagine.

Il faut dire que la jeune comédienne lui en fournit la matière. On ne la voit jamais jouer et pour cause : sa comédie commence hors-scène, dans la mise en scène tragique de son existence. Car, à y bien regarder, ce n’est pas au film qu’il faut reprocher de poser, mais bien à Marie-Julie, immobilisée de profil, la figure en pleurs, l’essence de la fille triste.

Le cinéaste, lui, se contente de faire une pause sur cette attitude ; tout le film n’est qu’un écrin pour un moment vécu en dehors de la vie – mise en pause-, en dehors de sa course précipitée : l’épisode commence et s’achève par les cavalcades furieuses d’Arthur qui se rend au théâtre, la première fois pour assister au spectacle, la seconde pour y manquer Marie-Julie, repartie avec son fiancé, qui doit l’aimer lui aussi, pour passer outre ses caprices indécis.

Ce n’est donc pas par pur caprice qu’on nous refuse l’accès au théâtre, même si on entend quelque chose de la répartie enfantine dans « Le théâtre, soit on y va, soit… on n’y va pas. » , même si l’expédient de filmer « pendant ce temps » ce qu’il se passe ailleurs, d’errer dans les rues ou les bars, est plein d’humour : il ne faudrait pas croire que Marie-Julie tienne quoi que ce soit de la petite Catherine de Heilbronn (hormis le rôle – à la limite, Arthur serait davantage une petite Catherine défaite). Alors que l’héroïne de Kleist finit, par la force et la pureté de son attachement, par inspirer l’amour à l’homme auquel elle s’est mystérieusement accrochée, celui de Marie-Julie ne peut que rapidement expirer puisque cet amour n’est rien d’autre que celui d’Arthur – elle est tombée amoureuse de son rôle d’amoureuse. La petite Catherine n’impose rien (que sa présence) ; la future grande comédienne exige Arthur à ses côtés, veut l’arracher à sa vocation pour qu’il devienne un miroir parfaitement lisse.

 

 

Dès lors, le choix entre Marie-Julie et Albert, le maître-tailleur, n’est pas un choix entre l’amour et le métier (deux formes de passion, en somme, si le métier est entendu comme vocation), mais entre l’amour-passion et l’amour-relation. Avec Marie-Julie, le présent pour avenir, l’extase de s’arracher à soi-même, le grand jeu ; avec Albert, l’avenir depuis le passé, le respect de ce que l’on veut être, les petits points. Lorsque Arthur essaye ses pensées brouillonnes sur Albert (provoquant la brouille) et tente de trouver un compromis lorsque c’est précisément ce que ne lui autorise pas l’attitude de Marie-Julie (elle lui a passé le mètre autour du cou), sa décision est en réalité déjà prise et ses révoltes velléitaires traduisent la douleur d’un arrachement qui s’est déjà produit. Arthur a choisi : celui qui l’avait choisi (pour reprendre l’atelier) – contre celle qui s’était laissée choisir sans l’élection réciproque qui garantit la relation. C’est un conte très moral, comme aurait pu l’entendre Rohmer. Pas la raison contre le cœur, non : entre la fille et l’homme, Arthur a choisi l’amour – d’où l’inversion des codes lorsque son affection pour le vieil homme le conduit à l’exagération d’un baise-main puis d’un bouquet en signe de réconciliation. « Mais ce n’est pas à moi qu’il faut apporter des fleurs, mon p’ti ! », bougonne le tailleur. Cette note finale est une petite merveille ; elle fournit un contrepoint comique qui interdit de prendre toute l’histoire au tragique. L’épisode est clos mais on se le repasserait bien en boucle.

Prends Lagerfeld à toi

Dernière semaine d’exposition et dernière journée de gratuité, forcément, il y avait du monde à la Maison européenne de la photographie. La file d’attente déborde dans une bonne partie de la rue de Fourcy, mais elle avance assez régulièrement et j’ai à la fois le temps et la patience d’attendre. Bien régulée, l’affluence ne gêne ainsi pas trop la visite – même si cela implique d’attendre à nouveau sur le palier du deuxième étage. Une salle de « photographie », sur la ville et l’architecture, complète la salle des photos de mode auxquelles on s’est préparé. Dans la première (par laquelle je finis, en bon mouton de Panurge, qui s’aperçoit bien tard que le « ← début de l’exposition » était masqué par le reste du troupeau), je trouve :

 

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[un grand tirage sur toile,
dans une salle à l’accrochage aéré,
une de mes photos préférées,
peut-être à cause de l’angle inouï d’un lieu qui m’est pourtant familier]

le château de Versailles, qui a implosé sous sa grandeur ; il ne reste plus qu’un fronton déposé comme une couronne en haut des escaliers – coucher du soleil ;

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un bout de château que j’avais déjà péché dans le même bassin (en bas, à gauche) ;

des maillages souples ou géométriques selon que ce sont des poutrelles de Tour Eiffel ou le feuillage d’arbres, qui ont été solarisés ;

une façade d’immeuble new-yorkais pleine de d’escaliers, renversée sur le côté comme une tranche de gâteau qui laisse apercevoir les différentes couches dont il est composé ;

une autre façade semblable qui nous incline un peu plus vers le vertige ;

une statue équestre par l’arrière, floutée comme les feux d’une voiture dans les embouteillages de nuit ;

le Panthéon en décoration d’aquarium, flanqué d’une anguille dessinée d’un trait blanc ;

un coucher de soleil à contre-jour sur la Concorde, savane urbaine avec ses lions statufiés et ses feux de brousse tricolores ; les voitures ne s’interposent pas contre le décor mais en émergent, comme un troupeau du brouillard.

 

« La photographie fait partie de ma vie. Elle ferme le cercle de mes préoccupations artistiques et professionnelles. Je ne vois plus la vie sans sa vision. » Cela me donne des visions, mais je m’en amuse beaucoup et cela me décrasse le cerveau, qui accueille et manie les idées, même curieuses, avec plus de souplesse et de malléabilité.

 

Dans l’autre salle, celle des photos de moooeude, il y a d’abord des accrochages pêle-mêle avec des embryons de séries, dont j’écarte par exemple les clichés pailletés de robots, et dont je garde :

un grand manteau qui marche d’un bon pas dans un parc, mouvement figé dans le tourbillon flou du décor ; je regarde et suis bientôt plantée avec la même netteté au milieu du tourbillon de visiteurs ;

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un visage de femme peint, à la boucle de cheveux en bronze verdi (en haut, au milieu) ; j’imagine son corps potelé comme une statue ;

Aurélia Steiner, parce cette femme à la coupe au carré et aux yeux d’une grande acuité est penchée à une balustrade ; balcon plutôt que bateau, qu’importe, j’y vois l’amante vieillie ;

la confusion des cheveux et des traits à l’encre de tous poils ;

un transfert qui transforme la photo en aquarelle et la séance de pose glamour en peinture italienne de la Rome antique ;

 

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[détail]

une Salomé qui n’est en fait rien qu’une femme avec une couronne de fleurs et des gants verts, c’est l’aspect tableau, qui m’a fait penser à Moreau ; maintenant, ce serait davantage à Klimt : les bras pliés, l’un sur une étoffe dorée posée sur la table, l’autre sur le genoux, elle me fascine ; (avec le fauteuil rouge à côté, et la suite de l’expo, je me demanderais presque : une pute en fleur ?) ; rehaut des petites éclaboussures de couleur par-dessus la couleur de remplissage (j’avais lu quelque chose à ce propos dans un bouquin sur Vermeer, mais on le visualise mieux chez Whistler, par exemple).

 

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une femme débarquée dans un tableau de Hopper (un intérieur feng-shui Fendi, en fait) ;

 

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Lagerfed qui fait son comics.

 

Ensuite, parmi la mosaïque de portraits, j’isole :

une épaule si avancée qu’on la dirait remontée comme un col, et qu’elle cache le cou ; épaule sensuelle par la velléité de se cacher ? – on dirait qu’elle imite le geste de pudeur d’Agnès dans l’Immortalité ;

la pause qui permet de s’arrêter sur la tendresse d’une femme pourtant en tenue de pose ;

une Tour Eiffel – chapeau pointu ;

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une couronne de Tours Eiffel ;

une apparition sur son fond blanc ;

un homme-aigle (nez et pommettes).

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Enfin, je déroule les trois pellicules de campagnes de pub et de photos de mode en tous genres (on ne demande pourquoi Chanel n’est pas sponsor de l’expo), érotiquement chargées pour la plupart :

de trois photos, je me fais un petit film : un profil dense, dans la matière, tient à la main un cercle tracé d’un trait, comme un fil à couper le beurre ; le monocle est mis en place sur le visage, de face, éclairé, pour une vision tranchante ; forcément, ça finit par un œil au beurre blanc, fard clair bien au-delà de la paupière (je suis très bonne spectatrice, je me suis fait rire toute seule de cette séquence incongrue) ;

chez une femme, le saillant des pommettes, souligné par les attaches d’un porte-jarretelle ; chez un homme, les sourcils accent grave-accent aigu repris par les muscles de l’aine ;

le buste d’une femme renversée sur le parquet, cheveux défaits, chemise ouverte sur la plastique qui palpite ; la cadrage qui ne voile ni ne dévoile le sein mais coupe juste au téton, et se retrouve sur une ou deux autres photos ;

un dos nu plongeant (à moins que cela ne soit la main qu’on y imagine ) ;

 

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une mariée et son déshabillage de noce ;

le chignon Bunny d’une femme de dos, tête chapeautée et baissée, le tailleur soulignant sa chute de rein ;

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un mannequin – Ken valsant aux côtés d’une vraie Barbie en plastique ;

une femme en robe fourreau noire, enlacée par les cuisses colossales d’une statue de Titan ;

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une rose à côté d’un piédestal ;


une détresse classe, difficile à imiter. Une visiteuse avait essayé sa propre version, mais, mal chaperonnée, le petit béret rouge tombait comme une soupe au milieu des cheveux. N’est pas classe qui veut.

C’était tellement possible !

 

Oncle Vania, de Tchekhov, au théâtre de l’Athénée, samedi 23 octobre
Mise en scène de Serge Lipszyc

 

Tchekhov n’était qu’un nom pour moi, que je ne savais même pas orthographier, alors lorsque Inci m’a proposé de la rejoindre avec le Teckel et Melendili pour voir une de ses pièces, je suis partie d’un pourquoi pas enthousiaste, sans savoir du tout à quoi m’attendre. Even now, I don’t know exactly what I have been attending : juste avant que la lumière ne s’éteigne, Inci nous souffle que c’est plutôt une pièce déprimante, mais, sans pour autant lui donner tort lorsque la lumière s’est rallumée, j’ai pas mal ri – de ce rire qui ne relève pas du comique, mais bien de l’humour, cette étrange manière qui empêche de jamais s’y retrouver et de trancher. Si la pièce porte le nom de l’oncle Vania, alors que le texte de celui-ci n’excède pas celui des autres personnages et qu’il fait même parfois figure de marginal, c’est qu’elle en adopte la position distanciée et le regard ironique qu’il porte sur ce petit monde.

 

Robin Renucci (oncle Vania), dont j’ai beaucoup aimé le jeu et les petites lunettes dorées ; derrière, Serge Lipszyc, dont le rôle du médecin (un peu trop certain de l’absence de certitudes) était moins convaincant que sa mise en scène (où l’humour ne permet pas qu’une intention ou un personnage prenne le pas sur les autres).

 

« Il sera bientôt trop tard. »

La vieille nourrice, déjà là avant que la pièce ne commence, tricote le temps que nous nous installions. Elle n’a rien d’une Parque pour autant, ne se mêle pas du destin, et souligne en contrepoint de sa présence tranquille les perturbations introduites par Alexandre Vladimirovitch Sérébriakov (les noms : l’une des raisons pour lesquelles il faut voir et non pas lire la pièce – entre prénoms et patronymes, on aurait vite fait de créer des synonymes d’un même personnage) dans la maison de sa défunte ex-femme. Depuis qu’il est là, on mange à plus d’heure et ce dérèglement temporel touche bientôt toute la vie des personnages : Elena Andréevna, sa nouvelle femme qui l’a épousé par amour (de lui et de sa science), regrette à présent de ne pas avoir un mari plus jeune, comme le docteur. Ce dernier, dont est éprise la trop jeune fille du professeur, n’a d’yeux que pour la belle-mère de celle-ci, qui avoue, alors qu’elle l’est toujours, avoir été « un peu séduite » par le médecin. Mais il est trop tard, elle est mariée et fidèle – à ses idéaux plus peut-être qu’à son mari. C’est ce que ne comprend pas le médecin, qui n’obtient d’elle qu’un baiser ou deux, et que ne veut pas comprendre oncle Vania, lui aussi amoureux de celle qui a pris la place de sa défunte sœur, mais qui, contrairement au médecin engagé dans la lutte contre la déforestation (c’est son rêve d’humanité, lorsque tous ceux qu’il soigne sont « toqués »), a perdu ses illusions. Tout « était tellement possible », semble-t-il, lorsque les choix n’avaient pas encore été faits, qu’on ne peut défaire. Mais il ne savait pas que même l’absence de choix en devient un ; les ramifications indéfinies de la vie ont été coupées, quelque chose est mort en même temps que quelqu’un, la mère de Sonia et la sœur de Vania, qui seule assurait la cohérence de leur univers familial et laissait croire à une vie harmonieuse. Il a toujours été déjà trop tard.

 

« Si j’avais eu une vie normale, j’aurais pu être Schopenhauer… »

On comprend peu à peu que si oncle Vania ne peut pas voir en peinture le professeur à la retraite, c’est parce qu’il l’a par le passé encadré et révéré comme une icône, avec le reste de la famille (la mère, qui se repaît de discussions et de brochures, en est restée une admiratrice inconditionnelle). Ce qu’il ne peut lui pardonner, c’est d’avoir cru à ses articles sur l’art, auquel, oncle Vania s’en rend compte à présent, le professeur ne comprend rien. Il n’en restera pas une ligne, son érudition n’a pas pesé plus qu’une bulle ; elle éclate en même temps que le vague espoir d’immortalité qui était une caution à la vie laborieuse d’oncle Vania, consacrée à la gestion du domaine pour cet homme qu’il admirait, et maintenant ressentie comme un sacrifice. S’il avait eu une vie normale, dit-il, il aurait été un Schopenhauer – confirmant par-là la foi qu’il ajoute aux travaux de l’esprit. Il ne pardonne pas son absence de réussite au professeur, auquel il avait remis sa procuration, et celui-ci ne s’y trompe pas lorsqu’il retourne contre l’oncle son reproche (re-proche ; proches, il le sont plus qu’ils ne l’imaginent) de nullité.

 

« Ils vont crier et puis ils vont se taire » (la vieille nourrice)

Oncle Vania croyait plus à l’art que le professeur lui-même et sa désillusion n’en est que plus amère, d’autant qu’il ne peut comme lui se consoler par la jeunesse de sa femme. La figure féminine à laquelle l’oncle désabusé est relié n’est autre que sa nièce, Sonia, jeune fille à l’idéalisme lucide, pétrie d’espoir plutôt que de principes (une sorte de petite Catherine de Heilbronn dans un monde désenchanté où il n’est plus possible d’inspirer l’amour par la force exemplaire du sien). Contrairement à sa belle-mère qui trouve peut-être une note d’optimisme dans le dynamisme du médecin mais n’a que faire de ses préoccupations forestières, Sonia reprend à son compte les arguments de l’homme et admire moins sa capacité à espérer qu’elle ne la partage. L’un comme l’autre ne sont pourtant pas de doux rêveurs : le médecin sait que lorsque l’homme n’est pas un paysan « arriéré », ni un petit bourgeois dont il n’y a que la bêtise qu’il n’accomplisse pas « petitement », il ne peut qu’être un de ces « hystériques, rongés par l’analyse, la réflexion… » ; Sonia, quant à elle, ne rêve pas à l’avenir, mais à un au-delà de la vie laborieuse, qui ne peut être que l’au-delà, repos qui ne viendra qu’après avoir enduré la vie. C’est en lui tenant ce discours qu’elle remet au travail son oncle et suggère qu’on peut être lucide sans désespérer – sinon en espérant, ce qui n’est peut-être que le propre de la jeunesse et de sa force.

La pièce se finit par le départ du professeur (i.e. l’éloignement de la tentation de donner un sens à sa vie par les livres) et de sa femme (l’illusion de l’amour), et ainsi le retour à la routine apaisante où l’on prend ses repas à l’heure, et où l’on fait les comptes du domaine plutôt qu’on ne les règles avec la vie. La vieille nourrice assise à tricoter ainsi que Sonia et oncle Vania penchés sur leurs cahiers m’ont déclenché une bouffée voltairienne de « Il faut cultiver son jardin » – le médecin a peut-être raison, une vie oiseuse ne peut être saine. Rien ne vaut la drogue douce du travail – ou de l’art, pour un homme de lettres (le « Il faut agir » du professeur fait d’autant plus rire qu’il est une réalité pour lui – alors qu’il n’est plus qu’une réalité de papier pour oncle Vania, qui ne parvient plus à voir une action dans la création – dédoublement de la poïesis) ou un spectateur qui veut bien se regarder lui-même lorsqu’il regarde une pièce. C’est triste, mais l’on ne peut
qu’en rire, et continuer jusqu’à ce que la vie soit élucidée.

 

Sans attendre Godot, mais seulement le train, nous sommes allées prendre Melendili et le Teckel, une mousse, Inci, un chocolat et j’ai conclu par une mousse au chocolat.