Hooked on books

Balletomane et littéraire, je considère avoir été taguée par Amélie.

Le point de départ : Have you read more than 6 of these books? The BBC believes most people will have read only 6 of the 100 books listed here. Instructions: Bold those books you’ve read in their entirety. Italicize the ones you started but didn’t finish or read only an excerpt.
Alors, mes agneaux, comme je passe désormais mes journées à rétablir le code typographique dans les interprétations originales et variées qu’en font les universitaires, je ne peux pas laisser un titre en romain. Pour que ça ne me démange pas de les souligner rageusement et d’écrire it. en rouge dans la marge, je laisserai en italique tous les titres et je soulignerai ceux dont j’ai lu des extraits.

 

1 Pride and Prejudice – Jane Austen
J’ai eu envie de claquer Elizabeth mais comme j’ai parfois aimé ricaner avec le narrateur, j’en lirai certainement d’autres un jour.

2 The Lord of the Rings – JRR Tolkien
On m’a fait regarder l’intégrale des films en version longue en VO d’une traite (jusqu’à trois heures du matin : « mais, il n’était pas censé être mort, lui ? – il a une aussi une barbe blanche, mais ce n’est pas le même que tout à l’heure. – Ah. »), mais malgré les soupirs d’extase de Dre, je n’ai jamais ouvert les bouquins.

3 Jane Eyre – Charlotte Brontë
Je croyais l’avoir lu gamine mais j’ai découvert que c’était une version abrégée, chose que j’abhorrais déjà à l’époque ; je me suis sentie un peu flouée sur le moment mais du coup cela fait un titre de plus sur ma liste à lire virtuelle.

4 Harry Potter series – JK Rowling
Il faut mettre en gras ET souligner si on les a beaucoup relu, qu’on dit « accio dico » quand on ne veut pas se lever pour l’attraper et qu’on regrette de ne pas avoir de retourneur de temps ?

5 To Kill a Mockingbird – Harper Lee
A. me l’a offert, il attend son tour sous la table basse.

6 The Bible
Cela manque gravement à ma culture et je vais peut-être penser à programmer ce chantier pour cet été. En français, hein, mais si un jour j’en lis des passages en anglais, je prendrai la King James’ version (c’était pour mister From-the-Bridge si jamais il passait par ici).

7 Wuthering Heights – Emily Brontë
J’aimerais le relire en anglais, vu le bon souvenir que j’ai gardé de la traduction- bonifié encore par Kader Belarbi ^^

8 Nineteen Eighty Four – George Orwell
Doubleplusbon. Sa critique est un des rares points que je n’accorderais pas volontiers à Kundera.

9 His Dark Materials – Philip Pullman
Je ne connaissais même pas le titre original, ce qui ne m’a pas empêchée d’être fascinée par cette trilogie, à laquelle je ne reprocherai que la toute fin, un peu mièvre par rapport au reste. J’ai longtemps rêvé d’avoir cette espèce de boussole grâce à laquelle Lyra ne voit pas le futur mais la réalité telle quelle est, la vérité (et ce mélange d’érudition et d’intelligence innée avec lequel elle s’en sert me ravit – c’est un peu le syndrome Hermione Granger), je me suis demandé quel serait mon daemon et j’ai pensé à la poussière dès que j’en voyais voltiger dans un rayon de lumière. Ça y est, j’ai envie de le relire.

10 Great Expectations – Charles Dickens
Je n’ai lu qu’
Oliver Twist mais tellement aimé que j’en lirai d’autres. Avant d’en étudier des extraits en cours d’anglais, j’y voyais un Zola anglais mais aucun misérabilisme ne résiste à l’ironie british.

11 Little Women – Louisa May Alcott

12 Tess of the D’Urbervilles – Thomas Hardy

13 Catch 22 – Joseph Heller

14 Complete Works of Shakespeare
Not yet.

15 Rebecca – Daphné Du Maurier

16 The Hobbit – JRR Tolkien

17 Birdsong – Sebastian Faulks

18 Catcher in the Rye – JD Salinger

19 The Time Traveler’s Wife – Audrey Niffenegger

20 Middlemarch – George Eliot

21 Gone With The Wind – Margaret Mitchell
Lu sur la pelouse à la pause déjeuner, au soleil, à Châteauroux, lors de mon premier stage de danse.

22 The Great Gatsby – F Scott Fitzgerald

23 Bleak House – Charles Dickens
Seulement l’incipit en khôlle. Palpatine, ne me la
isse pas entrer dans une librairie ce week-end à Londres.

24 War and Peace – Leo Tolstoy

25 The Hitch Hiker’s Guide to the Galaxy – Douglas Adams
Acheté lors de mon dernier week-end à Londres, lecture imminente.

26 Brideshead Revisited – Evelyn Waugh

27 Crime and Punishment – Fyodor Dostoyevsky

28 Grapes of Wrath – John Steinbeck

29 Alice in Wonderland – Lewis Carroll
Une version tricky m’a donné envie de le relire en VO.

30 The Wind in the Willows – Kenneth Grahame

31 Anna Karenina – Leo Tolstoy
Par un concours de circonstances (i.e. bouquins à lire pour les cours), je me suis trouvée interrompue après environ 50 pages, juste le temps de commencer à apprécier. S’il y a bien un livre que je ne renoncerai pas à lire, c’est celui-là <
L’Insoutenable Légèreté de l’être, Murakami, Boris Eifman.

32 David Copperfield – Charles Dickens

33 Chronicles of Narnia – CS Lewis

34 Emma -Jane Austen

35 Persuasion – Jane Austen
Là, je suis en train de m’attirer le mépris de toutes les blogueuses buveuses de thé.

36 The Lion, The Witch and the Wardrobe – CS Lewis

37 The Kite Runner – Khaled Hosseini

38 Captain Corelli’s Mandolin – Louis De Bernieres

39 Memoirs of a Geisha – Arthur Golden

40 Winnie the Pooh – A.A. Milne
Je préfère porcinet, d’abord.

41 Animal Farm – George Orwell
« All animals are equal but some are more equals than others. »

42 The Da Vinci Code – Dan Brown

43 One Hundred Years of Solitude – Gabriel Garcia Marquez

44 A Prayer for Owen Meany – John Irving

45 The Woman in White – Wilkie Collins

46 Anne of Green Gables – LM Montgomery
Et comment ! Toute la série achetée trimestre par trimestre chez France Loisirs, et galère pour compléter la série avec le premier tome qu’il me manquait et que j’ai fini par trouver en gros caractères pour malvoyants. J’avais alors un a priori négatif pour les romans courts et un amour démesuré pour ceux qui l’étaient aussi -démesurés (donc les séries). C’est l’époque où j’ai regretté de ne pas être rousse (aux yeux verts) avec des tâches de rousseur, et où j’ai admiré la grâce des peupliers.


47
Far From The Madding Crowd – Thomas Hardy

48 The Handmaid’s Tale – Margaret Atwood

49 Lord of the Flies – William Golding

50 Atonement – Ian McEwan
Je viens de finir
On Chesil Beach et ne compte pas en rester là.

51 Life of Pi – Yann Martel

52 Dune – Frank Herbert
Palpatine m’a fait regarder le film avec la chevauchée des vers de terre géants, ça compte ?

53 Cold Comfort Farm – Stella Gibbons

54 Sense and Sensibility – Jane Austen

55 A Suitable Boy – Vikram Seth

56 The Shadow of the Wind – Carlos Ruiz Zafon

57 A Tale Of Two Cities – Charles Dickens

58 Brave New World – Aldous Huxley
La première partie, en particulier, avec sa description des êtres programmés de l’alpha à l’epsilon, qui a ennuyé tant de mes camarades, m’a longtemps hanté, plus que l’histoire proprement dite qui suivait.


59
The Curious Incident of the Dog in the Night-time – Mark Haddon

60 Love In The Time Of Cholera – Gabriel Garcia Marquez

61 Of Mice and Men – John Steinbeck

62 Lolita – Vladimir Nabokov
One day. Une édition sans fourrure à poils roses, de préférence.


63
The Secret History – Donna Tartt

64 The Lovely Bones – Alice Sebold

65 Count of Monte Cristo – Alexandre Dumas
On me l’avait offert mais je déteste les Pléiades, je n’arrive pas à lire dessus et je l’ai revendu.


66
On The Road – Jack Kerouac
Ma cousine me honnirait si elle passait par ici.


67
Jude the Obscure – Thomas Hardy

68 Bridget Jones’s Diary – Helen Fielding
Ma mère riait tellement dans sa chaise longue que j’ai commencé par le deuxième tome.


69
Midnight’s Children – Salman Rushdie
En cours, en khôlle, et cette année à nouveau : avec une telle insistance, je ne vois pas pourquoi je résisterais à l’humour présent dès l’incipit.


70
Moby Dick – Herman Melville

71 Oliver Twist – Charles Dickens
Cf. 10

72 Dracula – Bram Stoker

73 The Secret Garden – Frances Hodgson Burnett
Un de mes premiers bouquins en anglais.

74 Notes From A Small Island – Bill Bryson
Only an excerpt from
Notes from a big country.

75 Ulysses – James Joyce
Lu une cinquantaine de pages à la BU pour voir. Quand j’aurai fini la
Recherche, vielleicht.

76 The Inferno – Dante

77 Swallows and Amazons – Arthur Ransome

78 Germinal – Emile Zola
Au nom du cours d’histoire et des dissertations à rendre vivantes, j’avais essayé de m’y remettre nonobstant ma détestation féroce de la Bête humaine, mais je n’ai même pas eu le temps d’avoir envie d’aligner tous les personnages pour les tuer et abréger mes souffrances.

79 Vanity Fair – William Makepeace Thackeray
I had such fun, commenting it in class… je devrais créer une vraie PAL pour ne pas l’oublier.


80
Possession – AS Byatt

81 A Christmas Carol – Charles Dickens

82 Cloud Atlas – David Mitchell

83 The Color Purple – Alice Walker

84 The Remains of the Day – Kazuo Ishiguro
Il me fait régulièrement de l’œil à Gibert…

85 Madame Bovary – Gustave Flaubert
J’ai de loin préféré
L’Éducation sentimentale.

86 A Fine Balance – Rohinton Mistry

87 Charlotte’s Web – E.B. White

88 The Five People You Meet In Heaven – Mitch Albom

89 Adventures of Sherlock Holmes – Sir Arthur Conan Doyle

90 The Faraway Tree Collection – Enid Blyton
Mais j’ai lu plein de Fantômettes.

91 Heart of Darkness – Joseph Conrad

92 The Little Prince – Antoine De Saint-Exupery
Le chapeau-boa ; la planète lampadaire ; le comptable d’étoiles, et la première fois que j’ai rencontré la formule « je bois – pourquoi ? -pour oublier – pour oublier quoi ? – pour oublier que je bois ».

93 The Wasp Factory – Iain Banks

94 Watership Down – Richard Adams

95 A Confederacy of Dunces – John Kennedy Toole

96 A Town Like Alice – Nevil Shute

97 The Three Musketeers – Alexandre Dumas
Athos, Portos, Aramais et d’Artagnan ! Je croyais que les romans de cape et d’épées n’étaient pas pour moi, et j’ai enchaîné sur
Vingt ans après et le Collier de la reine.

98 Hamlet – William Shakespeare

99 Charlie and the Chocolate Factory – Roald Dahl
Mouais. Y’a du chocolat, quoi.

100 Les Misérables – Victor Hugo
Il était dans le programme de khôlle et en bonne psychokhâgneuse, je l’ai lu pendant des vacances de deux semaines, dans l’ordre, juste après Polyeucte de Corneille : checked ! Bein c’est passé beaucoup plus vite, une valse sur du rythme ternaire bien martelé ; j’ai dévoré, me suis baladé dans les égouts et ai gardé une fascination particulière pour le passage du couvent.

 

À l’arrivée : more than once, it dates back ; j’ai plus lu que je ne lis. Et remarque qu’on est très chauvin dans nos lectures : une majorité de bouquins anglophones dans cette liste de la BBC et quasiment que des œuvres françaises dans l’ouvrage sur le roman, que je suis en train de relire. La Weltliteratur est une bonne raison de se kundériser.

Et comme je ne suis pas une gentille journaliste, j’accuse : Inci et Bambou (je serais curieuse de voir ça chez Mo aussi mais on se connaît moins, je propose seulement).

(au) sortir de sa/la coquille

Je ne sais pas si c’est d’exercer mon regard à dénicher dans les textes guillemets mal fermés, majuscules non accentuées ou colocations néologisantes et à repérer l’intrus qui fait que les choses ne sont pas comme elles devraient être, mais aujourd’hui j’ai sauvé une carte de cantine sur le couloir tapis roulant de la mort poubelle et par conséquent sa propriétaire de son rachat, ainsi qu’un sac en plastique contenant du tulle rose fushia, et par conséquent la gamine à qui on allait faire un costume.

Les intermittences de la mort

[Comme d’habitude, il se peut que je tue le suspens]

Lu par intermittence également. Mais cela n’est nullement dérangeant, puisqu’il n’y a pas à proprement parler d’histoire – plutôt une hypothèse : que se passerait-il si l’on cessait de mourir ? Toute l’intelligence de José Saramago consiste à ne pas partir dans une utopie métaphysique mais à inscrire cette hypothèse farfelue dans le monde qui est le nôtre et continue de fonctionner normalement. La suspension de la mort est circonscrite à un seul pays et les élus à la vie éternelle n’en continuent pas moins de vieillir, si bien que pour éviter l’entassement des maisons de retraite et pour ne pas s’occuper ad vitam eternam d’estropiés qui auraient été assassinés en d’autres temps, les familles commencent à faire passer clandestinement leurs morts encore vivants de l’autre côté de la frontière, la mafia ayant tôt fait de s’emparer de ce nouveau marché noir.

L’hypothèse de la suspension de la mort apparaît de moins en moins farfelue à mesure qu’elle permet d’analyser tous les rouages de la société : les pompes funèbres font faillite avant d’exiger que l’enterrement des animaux de compagnie devienne obligatoire ; les assurances-vie se reconvertissent en épargne pour la retraire ; le gouvernement, dépassé par la gestion de ce qui tourne rapidement à la crise, tente néanmoins de faire de la vie éternelle un élément de propagande ; quant à l’ Église, elle doit revoir son eschatologie qui ne lui donne plus aucune prise sur la société… On ne sait jamais très bien à l’initiative de qui, mais tout s’enclenche ; le style de Saramago est particulièrement efficace à faire paraître le « on » de la société, qui fait naître et grossir les rumeurs : peu de points pour de longues phrases dans lesquelles s’insèrent les dialogues et leurs répliques à la file, enchaînées par les virgules, le changement de locuteur étant marqué par une majuscule. On a l’impression d’y perdre en lisibilité au début, mais une fois acceptée l’idée de distinguer des interlocuteurs plus que des personnages, on se fait vite au rythme de ce style où le discours indirect libre est partout mais visible nulle part, comme la mort.

Lorsque cette dernière reprend du service, c’est presque un soulagement et c’est alors que le roman bascule dans sa seconde partie et délaisse la société pour un individu isolé, un violoncelliste qui a échappé à la législation de la mort et que cette dernière se doit de faire rentrer dans le rang. Une histoire se noue alors avec ou entre la mort et l’artiste, dont elle finit par devenir intime, jusqu’à ce que la phrase qui avait ouvert le roman vienne le clore : « Le lendemain personne ne mourut. » Autrement dit, toute rationnelle qu’elle soit dans la régulation de la société, la mort n’en demeure pas moins inacceptable pour une personne particulière, avec sa vie, son talent et ses manières humaines, qui nous font l’aimer et rêver pour elle à une exception de la mort, quand bien même la réalisation de ces rêves accumulés tournerait au cauchemar.

Pris au milieu de ces contradictions, l’homme ne peut que rire ou pleurer et le lecteur ne rira peut-être jamais autant, n’éprouvera peut-être jamais autant le besoin de rire qu’à ce récit de l’imperfection suprême de l’homme : sa finitude. Quelques extraits exhumées pour lesquelles on peut être mort de rire :

« […] L’église, monsieur le premier ministre, a tellement pris l’habitude des réponses éternelles que je ne puis l’imaginer en train d’en donner d’autres, Même si la réalité les contredit, Depuis le début, nous n’avons fait que contredire la réalité et nous existons toujours […] », p. 24

« Il était trois heures du matin lorsqu’il fallut emmener de toute urgence le cardinal à l’hôpital à cause d’une crise d’appendicite aiguë qui nécessita une intervention chirurgicale immédiate. Avant d’être aspiré par le tunnel de l’anesthésie, dans cet instant très bref qui précède la perte totale de la conscience, il pensa ce que tant d’autres ont pensé, qu’il pourrait mourir pendant l’opération, puis il se souvint que ce n’était plus possible et enfin, dans un dernier éclair de lucidité, son esprit fut encore traversé par l’idée que si malgré tout il mourait, cela signifierait que, paradoxalement, il aurait vaincu la mort. Emporté par une irrésistible soif de sacrifice, il allait implorer dieu de le tuer, mais il n’eut plus le temps d’ordonner les mots comme il convenait. L’anesthésie lui épargna le sacrilège suprême de vouloir transférer les pouvoirs de la mort à un dieu plus généralement connu comme donneur de vie. », p. 25.

Merci Bambou.

Les Fiançailles au couvent comme un poisson dans l’eau

Prokofiev fait chanter en russe des personnages espagnols sur un livret anglais tiré de Sheridan, mais le mariage est un régal à consommer. Un père cherche à marier sa fille Louisa à un gros poisson un marchand de poisson, lequel sexy comme son produit finira marié à la nourrice pendant sa protégée aura filé épouser son Antonio et que son amie Clara aura fait de même avec le frère (le 2 en 1, c’est plus vendeur et ça fait plein de bouteilles pour les moines). Bref, une histoire d’elopement avec sa dose de vieux barbons, de jeunes amoureux, de travestissements et de quiproquos pour que tous retombent sur leurs pattes, enfin, sur leurs écailles, sonnantes et trébuchante comme des ducats.

Les péripéties sont attendues mais les chanteurs nous attendent au tournant, avec leurs yeux outrés ou pétillants, leurs moues dégoûtées ou mutines, et autres mimiques impayables qui leur vaudraient d’être nommés comédiens aussi bien que chanteurs. Même nos deux vieilles barriques ont un jeu de scène terrible, et ne reculent pas devant quelques pas de menuet fort bien menés. Ils n’ont pas cet air emprunté qui créer un fossé avec les danseurs, lesquels se distinguent surtout par leurs costumes, en particulier ceux avec des tissus fluo en langues, oreilles et crêtes pour un mélange de chats (qui miaulent à la fenêtre de poisson Louisa) et de dinosaures radioactif- seul point discutable du spectacle. J’ai tout bonnement adoré la variation solo du poisson géant, habillé en argent de tête de hareng en cape, comme sur les programmes de l’Opéra comique : aussi bon qu’une dorade royale.

Aucune arête dans la gorge des chanteurs mais des réparties saillantes pour quelques scènes désopilantes, au nombre desquelles le numéro de charme que la nourrice fait au vieux barbon qui la trouve laide puis pas si laide que ça quand elle prétend avoir toujours rêvé d’un mari avec une telle barbe, « elle manque seulement un peu de beauté ». Elle chante ensuite pour lui, et annonce qu’avec elle, la jeune fille qui baisse les yeux devant celui qui la courtise, moins d’un an plus tard ne rougit plus de rien et ne joue plus avec son châle mais avec la barbe de son époux.

La scène où le marchand de poisson séduit le père en lui apprenant à voir des ducats à la place des écailles est une autre de ces drôleries : l’homme se prend à caresser un poisson comme si c’était un chat, avant de l’embrasser sur la bouche puis de (se faire) serrer la pince à une écrevisse (faut croire que l’écrevisse est un ressort comique connu des dramaturges, parce que je me souviens d’un véritable fou rire lors du Timide au Palais). Puis c’est au tour du marchand de frétiller à la description que le père fait de sa fille (ah, la fossette !), incapable de dire autre chose que « la friponne ! », façon Orgon qui ne peut que plaindre « le pauvre homme ! » -Idéfix. Il n’a peut-être pas tort, en même temps, à en juger par les mines ennuyées ou amusées que Louisa fait lorsque son amie Clara lui raconte que son frère (à Louisa) lui a outrageusement manqué de respect parce qu’il l’a… embrassée.

On pourrait reprendre ainsi de nombreuses scènes, parce que c’est réjouissant de bout en bout, malgré près de trois heures de spectacle qui transforment Palpatine en petit vieux plein d’arthrose. Évidemment, tout est bien qui finit bien, et le père célèbre le mariage de ses deux enfants en jouant du xylophone tandis que les danseurs habillés en serveurs, sur la passerelle en hauteur, miment un jeu de percussions avec des cuillères ; le coup de grâce. Si vous avez la possibilité d’aller voir ce poisson de janvier…

Danse sous influence

 

[il est recommandé aux non-balletomanes, si jamais il se risquent à la lecture de ce billet, de sauter cette longue introduction – la lecture est déconseillée à tous les autres ^^ ]

 

Quand chorégraphe rime avec autographe. Où il est visible que Palpatine déteint sur moi (s’agissant de n’importe qui d’autre, j’aurais intitulé la partie « Palpatine, sors de ce corps ! » mais là, on pourrait croire que mon surmoi a quelques difficultés à contenir mon inconscient, alors je vais m’abstenir).

Pas un seul instant je n’ai regretté d’être repartie dans le froid pour assister à la soirée des danseurs-chorégraphes à l’amphithéâtre de Bastille. C’est un spectacle qu’il faut aller voir seul : même en étant assez loin dans la file, cela permet de se faufiler dans les places restantes trop étroites pour les couples ou les bandes d’amis. Après avoir salué d’un mal-aimable « évidemment, c’est pris » le pull qui gardait les places des proches de celui dont je me suis ensuite rendu compte qu’il s’agissait de Yann Chailloux, j’ai trouvé une place au premier rang, au bout du banc central. À peine assise, j’aperçois une femme très droite, très classe, un peu à l’écart en bout de banc ; je me lève pour aller saluer B#5.

On est cerné de balletomanes, mes voisins de derrière veulent faire savoir tout le bien qu’ils pensent de leur « Marion » (Barbeau), mon voisin de gauche me montre Marie-Agnès Gillot juste derrière, que j’avais déjà repéré bien avant, Brigitte Lefèvre (idem) mais aussi Nicolas Paul et Emilie Cozette que je n’avais pu remarquée (comme de juste). Je crains d’ailleurs de l’avoir froissé, en lui expliquant que si je n’avais pas été voir d’autre cygne que celui de Lopatkina, c’était entre autres parce que Emilie Cozette ne me faisait aucun effet ; il s’est offusqué de la cabale honteuse qui l’accablait (j’ai essayé de ne pas penser à Victor Hugo), et l’a défendue en la présentant comme une danseuse d’une grande beauté, très discrète, qui mériterait vraiment d’être connue. Reconnue, peut-être ? Parce que bon, elle est étoile, tout de même… Toujours la même chose. Je peux reconnaître que c’est une bonne danseuse et assurément une très belle femme, mais qu’y puis-je si elle ne me fait aucun effet comme interprète ? Lorsque à la fin du spectacle j’ai demandé à mon voisin s’il était seulement balletomane ou s’il connaissait des danseurs, il m’a répondu qu’il connaissait des danseurs et s’est bien gardé de citer aucun nom à rebours de son enthousiasme à montrer qu’il était au courant de tout et de tout le monde, et j’ai compris que je l’avais froissé en rendant son étoile filante.

Pour finir dans le Who’s who ?, il faudrait ajouter Miteki Kudo, je crois, qui s’est faufilée dans les coulisses qui ont vu transiter pas mal de monde entre la salle et les coulisses. Ambiance familiale et amicale, donc, qui n’est mondaine que pour certains des (moins) proches parents, et dans laquelle le balletomane lambda peut s’amuser à tester son degré de balletomaniaquerie et se réjouir de ce que les danseurs de la « maison » soient solidaires et s’intéressent à ce qu’ils font les uns les autres.

Danse sous influence; écrire le mouvement et le danser

Cette série de pièces courtes agencées dans une programmation bien pensée permet de découvrir les aspirations protéiformes d’artistes que l’on voit toujours dans les œuvres des autres. Protéiformes dans la mesure où la chorégraphie se joint à l’interprétation, mais surtout dans la mesure où les styles qui se forment sont très divers et les influences, multiples, plus ou moins décelables selon le degré de maturité de ces jeunes chorégraphes (par l’expérience, mais aussi par l’âge). Beaucoup de noms me viennent à l’esprit et je me rends compte peu à peu que plus les pièces sont abouties, moins les influences sont clairement identifiables ou en si grand nombre que le brassage se fait nécessairement synthèse. En somme, une influence dominante suggère souvent que le style n’est pas encore très personnel (quoique pouvant être parfaitement maîtrisé, je pense notamment à Florent Melac), mais d’innombrables influences sont préférables à pas d’influence du tout, ce qui serait l’indice d’une certaine pauvreté dans le mouvement.

Avec tout ce que cela comporte d’outré, j’ai joué à me demander par quoi les chorégraphes avaient été traumatisés…

 

Allister Madin se prend pour Antonio Banderas dans Take the lead et nous sert un duo de danse hispano-latino-tango-flamenco sur pointes. C’est Allister Madin, il en fait trop, donc forcément, j’adore. La chemise ouverte jusqu’à la ceinture et la grimace de lover bad-boy sont un peu too much, mais comme il est plus galant que goujat avec sa partenaire, on se laisse entraîner sans refus (plus d’une fois cette soirée j’ai retenu ou plutôt contraint des mouvements involontaires qui cherchaient à reproduire dans mon corps la sensation de ce que je voyais, à ressentir, le verbe est bon). Le couple semble plus à l’aise dans la seconde partie que dans la première, pourtant plus soft, mais c’est peut-être précisément que la rencontre, où le contact s’établit, se dérobe et s’érotise, s’avère délicate lorsqu’en cherchant le regard de l’autre, on risque de surprendre celui du spectateur, à quelques mètres à peine, tandis que la seconde partie, fougueuse, fait montre d’une passion qui est nécessairement jouée, par les protagonistes aussi bien que par les danseurs. Coupe au carré cheveux lâchés et bientôt emmêlés, Caroline Bance relève alors le regard et le défi. Parti de passes attendues, quoique toujours efficaces, la chorégraphie surprend à deux trois reprises, par des portés ou des épaulements qui sont autant de revirements dans le duel de séduction qui s’est engagé.
J’aime quand, sur pointes, appuyée sur les épaules d’Allister de dos, Caroline Bance fait un signe de refus, non pas de la tête, mais par une violente dénégation de la jambe, agitée en attitude parallèle, le genou au niveau des hanches de son partenaire qui, tandis qu’elle se cabre, reste immobile, campé sur ses jambes écartées.
J’aime quand, face à lui (qui nous fait face, cette fois-ci), elle se plante avec aplomb en quatrième sur pointes, le visage immédiatement détourné de lui, visage qu’elle ne dérobe donc pas mais qu’elle lui refuse, avec toute la violence de la gifle qu’elle provoque et qu’il ne lui donne pas.
J’aime quand leur face à face est déséquilibrée, qu’elle est suspendue à ses bras et qu’il la traîne sur toute la diagonale de la scène, à reculons et à toute vitesse, en la tenant par le cou : on se sait plus s’il la tire à lui ou si elle lui fonce dessus comme sur un torero.
El Fuego de la pasion : Allister nous fait son cirque, dans l’arène de l’amphi marquée par une guirlande lumineuse. C’est trop !

 

Melancholia Splenica (les titres en français n’ont pas bonne presse : trop compréhensibles ? Trop peu évocateurs ?), loin de vous filer le spleen, vous refile plutôt la bonne humeur de Genus. Quoique peut-être pas aussi jubilatoire que la chorégraphie de Wayne MacGregor, la pièce de Florent Melac ne laisse pas d’être réjouissante. La copie ne souffre d’aucune pâleur, si l’on veut y voir une copie plus qu’une continuation ou une variation sur un même vocabulaire chorégraphique (en même temps les costumes similaires n’aident pas). Wayne McGregor avait traumatisé de nombreux spectateurs au motif qu’il traumatisait le corps des danseurs nombreux à se blesser, mais le seul traumatisme qui trahissent ces danseurs-chorégraphes est un enthousiasme tout ce qu’il y a de plus fécond.
Ajoutez à cette intelligence précoce (17 ans, apparemment – ce qui explique aussi l’influence quasi unique du chorégraphe anglais, dans laquelle il a du baigner l’année dernière et qui, dans l’enthousiasme, n’a pas vraiment eu le temps d’être confrontée à d’autres) des interprètes pleinement engagés dans le mouvement (Sylvia-Cristel Martin, aux bras aussi déliés que les jambes ; Charlotte Ranson, dont le visage magnifique ajoute à la présence ; Julien Meyzendi chez qui j’apprécie l’emplitude de mouvement, et Maxime Thomas qui, m’apprend mon voisin, vient de chez McGregor himself), et vous obtenez une pure danse !

 

La table en fond de scène et la musique de Bach sur laquelle Lydie Vareilhes a mis en geste le « vertige existentiel » d’un individu solitaire m’a immédiatement fait penser au Jeune homme et la mort dont le spectre a hanté tout Le pressentiment du vide pour en souligner à chaque instant le manque de force. Il y a de l’idée, une scénographie, des enchaînements de bras ingénieux et une belle intention, mais, outre un curieux décalage avec la musique (ce n’est pas que l’interprète n’est pas en rythme, juste que cela ne colle pas bien), on ne peut pour l’instant faire guère mieux que de pressentir les qualités de la jeune chorégraphe (22 ans), qui doit encore mûrir (mais on devrait pouvoir lui faire confiance, elle l’inspire, en tous cas) et de Letizia Galloni, qui a besoin de s’étoffer (à commencer au sens très littéral par se remplumer).

Pour la pièce de Bruno Bouché, un des plus aguerris, il m’a fallu chercher. Sur ma lancée Roland Petit, j’ai d’abord pensé à Proust ou les intermittences du cœur à cause du « combat des anges » entre Morel et Saint-Loup, mais j’ai ensuite bifurqué vers Siddharta pour le côté initiatique du duo entre deux hommes, sans toutefois écarter une possible influence béjartienne, spirituellement plus nourrie. Le crâne rasé d’Aurélien Houette me rappelle aussi celui de Russell Malliphant, mais cela commence à faire beaucoup. Avec ses yeux très clairs et son regard perçant, le danseur est imposant – presque dérangeant. À côté d’un Erwan Le Roux en noir, replié sur son être douloureux, il incarne une puissance lumineuse, qui est peut-être la plus violente lorsqu’elle est la plus tranquille et qu’il tourne simplement sur lui-même bras écartés… et pourtant la chorégraphie est recherché et les portés, des poses où l’équilibre est toujours tension entre les deux personnages. L’aigle blanc cherche clairement à dominer l’autre, sans aller pour autant jusqu’à l’écraser. Autant dire que pour un combat du bien contre le mal, il faudra repasser ; ou alors l’envisager de façon beaucoup moins simpliste que le jeu de couleur y invite et voir le mal non pas incarné par mais dans le danseur en noir (pour ainsi dire malmené par l’espèce de prêtre blanc presque féroce), mal ou faiblesse qu’il combat en se confrontant à la puissance de l’autre. Bless-ainsi soit-IL.

Souvenir Fugitif d’un trio de Nacho Duato avec Vladimir Malakhov, mais en le revoyant, force est de constater qu’il n’y a de commun avec la chorégraphie de Sébastien Bertaud que (la tenue et) le plaisir de voir exploser la puissance de trois danseurs à l’unisson. On distingue encore l’influence de Mc Gregor, quoique de façon moins marquée que chez Florent Melac ; elle est moins dans le vocabulaire que dans la démarche, notamment avec la recherche des lumières – bon, après avoir vu une pièce de Russell Malliphant, forcément, ce n’est pas ce qu’on retient. La danse en tant que telle me plaît davantage que sa mise en question technologique ou que sais-je encore, et la première partie, plus que la seconde, où l’on découvre pourtant avec plaisir Laurène Levy dans des pas de deux à partenaire variable (et une pose estampillée Forsythe, une – même sans jamais avoir vu In the middle en entier, on la reconnaît), avec Sébastien Bertaud, Axel Ibot, Daniel Stokes. Il n’est pas impossible que mon taux d’hormone ait renforcé mon enthousiasme pour cette pièce (notamment pour le dernier dont les jambes feraient presque oublier que les danseurs finissent par danser torse nu en mini-short).

Ce n’est pas sur du Chopin que s’ouvre Nocturne, de Nans Pierson, mais sur des cris de sirènes qui ne cessent que lorsque le pianiste commence à jouer. S’ouvre alors un étrange bal, où Juliette Hilaire, en simili chemise de nuit (à la Parc) et Alexandre Gasse dansent comme seuls (comme s’ils n’étaient pas entrés en même temps que le pianiste), dans un style très « romantique », avec… des masques à gaz. C’est d’autant plus curieux que le lyrisme de leur danse pourrait autrement prétendre à quelques camélias, par exemple. J’essaye d’abord d’en faire abstraction pour goûter la danse et quand je les oublie un instant, ils reparaissent sous forme de groin et rendent les danseurs encore plus difformes. Je me sens d’autant plus gênée qu’ils ne semblent d’abord pas gêner les danseurs – enfin, leur personnage- comme si le masque à gaz, plus qu’intégré à leur vie, l’était à leur physionomie (des groins, oui). Puis le couple s’arrête face à face, les amants prennent leur souffle comme s’ils allaient plonger, ôtent leur masque et retiennent leur respiration jusqu’à pouvoir l’expirer dans la bouche de l’autre – un baiser, en d’autres termes, en d’autres temps. Puis la danse reprend, comme à regret, regret de ne pas pouvoir atteindre l’autre. On sent qu’ils supportent de moins en moins cet attirail respiratoire, qui toujours s’interpose entre eux. Lorsque, à nouveau, ils plongent l’un dans l’autre, le garçon refuse de mettre son masque. La jeune fille (qui connaît visiblement les consignes d’avion) remet le sien avant d’appliquer celui de son amant sur son visage, qu’il dérobe. Le masque tombe et, sous le regard horrifié de la jeune fille, le garçon ne tarde pas à faire de même. La musique s’arrête. Je crains un instant que la jeune fille décide à son tour de cesser de ne pas pouvoir respirer et rejoigne le mythe de Juliette dans un double suicide, ce qui aurait considérablement atténué le geste de son amant, en l’inscrivant dans un cadre trop connu pour ne pas être devenu d’une certaine manière insignifiant (et puis, souvenez-vous, lorsqu’une tragédie se répète, elle tourne à la farce). Bien plus terrible, la jeune fille affronte la vie, devant le corps inerte du jeune homme mort ; le pianiste sort sous le bruit des sirènes et la jeune fille reste seule, en vie.
La pièce est forte et le chorégraphe aussi, d’avoir réussi à transposer la tension dramatique de la danse en elle-même lyrique à son interruption, romantique au sens fort (non-mièvre) du terme. J’aurais juste aimé que le premier baiser arrive plus vite pour être d’emblée dans l’histoire mais peut-être était-ce volontaire et que Nans Pierson a cherché à susciter sinon de la gêne, du moins un flottement, un trouble.

Près de toi mais pas forcément de moi. Même si j’apprécie davantage Marine Ganio que son frère, je n’en ai pas moins eu du mal à apprécier la proposition de Myriam Kamionka et Franck Berjont sur le thème de l’amour fraternel (et sororal). Il y a des moments-bulle (coupés par des noirs qui n’en sont pas vraiment à cause des vêtements blancs – robe très réussie- et de la musique qui ne s’interrompt pas) et des mouvements qui ont une certaine densité (sans que je parvienne à savoir si c’est du fait des interprètes ou de la chorégraphie) mais cette curieuse apesanteur ne m’a pas franchement fait planer.

 

Takeru Coste est me1 ; Samuel Murez, me2. Il est le personnage éponyme de cette pièce schizophrènique et c’est bien normal à le voir, car il ne fait vraiment qu’un avec sa gestuelle à la fois souple et hyper-nerveuse – hyper-rythmée, faudrait-il dire, tout comme la parole qui se dévide à tout barzingue, en un discours complètement dingue et concasse les mots jusqu’à ce qu’ils soient un pur jeu sonore au rythme jubilatoire (un peu comme dans 101). Là où la pantomime est de la danse mimée, me2 est du mime dansé. Le visage fardé de blanc, les danseurs nous offrent un duo d’une inventivité folle et follement poétique, traversé de part en part par un humour qui jamais n’annule le mouvement (mais au contraire qui en découle), avec une énergie Splendid (j’ai dit blanc, le masque de maquillage, pas vert) ! Rien que leur démarche… grandes enjambées, dos courbé, cou relevé, et bras balanciers terminés par des mains en pelles à tarte, ondulantes – on les croirait voir passer le temps, au travers de ces mains-passoires, mais on ne fait évidemment que le croire, parce qu’on ne voit pas le temps passer. J’aurais presque ri de ma fascination tellement j’étais enthousiaste.

Dans Le Funambule, Angelin Preljocaj avait abusé de la poudre pailletée ; Mallory Gaudion, lui, a un problème avec l’alcool. Des verres disposés en une ligne tel un rail de coke, des postures torturées pour les rattraper et finir par en faire un petit tas. Même si, contrairement à B#5, j’aime la musique d’Arvo Pärt (et pas qu’un peu), l’ennui a parfois affleuré : j’ai vraiment du mal avec le chorégraphe maudit (sans compter que l’image d’un apprenti chanteur coiffeur à la Nouvelle Star s’est superposée à lui – ce doit être la mèche, toutes mes excuses- pour en faire un rebelle de la sociétyyy). Qu’on ôte à Narkissos son narguilé et alors pourquoi pas.

La soirée a fini par un grand éclat de rire. Ça tourne à l’amphi… ça : les roues du vélo sur lequel Yann Chailloux débarque ; les hanches de Jennifer Visocchi en hauts talons, gros pull sexy, collants rouges et superstar (quelles jambes ! Comment fait-on pour avoir l’arrière des cuisses si musclé ?) ; les poules de Matthieu Botte en beau gosse qui se la pète ; les yeux d’Isabelle Ciaravola en diva qui a besoin de petites mains pour être repoudrées (mains qui sortent de fentes dans un paravent noir, simple mais chouette artifice) ; les trois petits films que s’est fait Béatrice Martel et qu’elle nous présente pour notre plus grand plaisir – et puis s’en vont. Ambiance détendue pour un divertissement de qualité : on nous apporte les coulisses sur un plateau, en deux temps, trois mouvements, quatre clips :

Clip campagne « tapis d’amour, premier baiser »

clip urbain, banc de filles et beau gosse

clip noctambule, trois accords façon fatale

clip clap trop poudrée…

Un coup de coeur particulier pour le premier avec un Yann Chailloux trop choupi et une Marion Barbeau trop sexy dans sa robe-short de tennis et soquettes blanches. De quoi envoyer au tapis (d’herbe synthétique sur lequel ils sont assis) les commentaires sarcastiques que d’habitude on entend toujours avec les chansons de Carla Bruni. Je ne sais plus qui était le thé et qui la tasse mais toujours est-il que cette soirée était ma tasse de thé. En guise de petit gâteau à tremper dedans : un sourire d’Allister Madin à la sortie.