Voyage en Calabre : itinéraire et bonnes adresses

On cherchait pour nos vacances mère-fille un coin d’Italie que Mum n’ait pas déjà visité et elle a fini par trouver : la Calabre. Le bout de la botte, tout en bas, en face de la Sicile.

L’itinéraire

Carte du bas de l'Italie avec les villes mentionnées dans l'article
Pas loin de 2000 km en tout

Mum a préparé l’itinéraire (gloire et grâce à elle) avec le guide Lonely Planet. Si vous voulez vous en inspirer, sachez qu’il est adapté à notre rythme (on ne se presse pas en vacances) et à nos désintérêts (les châteaux et les églises, c’est extra pour le décor ; si on peut être dispensées de les visiter, on aime autant). Nous, on est là pour la promenade et le régal, pour flâner et s’imprégner des ambiances. Grimper pour un panorama pourquoi pas, mais avec une glace une fois arrivées au sommet.

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4 nuits à Naples

    • Le vieux Naples 💛 💛 💛 🍽️ 🍦 
      Des ruelles, du bordel, de la splendeur, de la crasse, des églises, du bruit, des banderoles…
    • Pompéi 💛 💛 💛
      Je pensais voir quelques murets de fondation et des colonnes plus ou moins debout, et c’est une ville entière que j’ai découverte, avec des rues, des trottoirs, des murs hauts et des toits parfois, des échoppes avec leurs jarres incluses dans les comptoirs, des maisons avec leurs fresques, leurs mosaïques…  Ce sont bien des ruines, mais l’on dirait moins celles d’un site archéologique que d’une ville détruite par la guerre — surtout lorsqu’on voit la cité antique d’en haut, se détacher de la ville moderne. On y a passé plusieurs heures et on pourrait y passer facilement la journée, plusieurs journées : Pompéi est aussi longue à explorer qu’une ville encore vivante, davantage même dans la mesure où l’on furète parmi les maisons des particuliers.
    • Herculaneum 💛 💛
      Doublon de Pompéi ? Pas vraiment. Herculaneum est plus petit, mais on y découvre des étages : deux, parfois trois, un bout d’escalier ; des maisons avec leur impluvium, mais aussi des puits de lumière, tout en haut, ornés de simili-gargouilles ; et des squelettes figés dans les garages à bateau, alors que les habitants tentaient de fuir par la mer avant qu’elle n’entre elle aussi en fusion. Un tour par le musée permet de s’esbaudir de la finesse des orfèvreries (je ne me suis pas remise de la jarre violette miniature gravée dans une petite pierre précieuse…).

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2 nuits à Buonvicino

    • Buonvicino 💛 🍽️
      Un petit village aux rues pavées de mosaïques en galet, avec un kiosque, une vue lointaine sur la mer et une très bonne table. Le tout sous la houlette de notre guide félin errant, baptisé Marco il gatto pour l’occasion.
    • Diamante 💛🍦
      Il n’y a pas des masses de villages mignons au bord de la mer en Calabre, et Diamante fait partie des heureuses exceptions (aux côtés de Tropea et Pizzo), avec une jolie promenade en bord de mer et des ruelles animées par de nombreuses fresques de street art. On y déguste aussi un délicieux granité au cédrat.
    • Marina di Belvedere
      Notre premier village pierreux couleur terracotta.
    • Paola 🍽️  
      Une vieille ville bien insérée dans la nouvelle, avec une belle arche ornementée comme une église, des plantes, des églises, des ruelles…
    • Fiumefreddo Bruzio 💛
      Le village est pittoresque dans le genre pierreux, mais le wow est surtout dû au château en ruine et à la vue qu’on y a sur la mer Tyrrhénienne depuis la terrasse — un cadre parfait pour tragédie antique.

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4 nuits à Pizzo

    • Pizzo 💛 💛🍦
      Un très chouette village au bord de la mer, touristique dans le bon sens du terme : on a envie de s’y attarder, s’y installer pour le temps des vacances. Il y a à voir, c’est animé, aménagé, avec un parking où se garer à proximité et un bon choix de restaurants, une jolie plage juste là, en bas du château, des ruelles ni délabrées ni muséifiées, une gelateria familiale où viennent se ravitailler les enfants et les vieux du quartier… Tout y est pour venir s’y promener, baigner, restaurer.
    • Tropea
      Un gros village (une ville ?) au bord de la mer, touristique dans le mauvais sens du terme : on est content d’y passer, et de ne faire que ça, justement. Passer et s’en aller. C’est le Saint-Trop’ calabrais, ça grouille, de monde, de pittoresque organisé, des merdouilles à vendre à tout coin de rue.
    • Nicotera
      Un village qui mise tout sur sa vue et quelques ruelles qui semblent décorées spécialement pour Instagram.
    • Capo Vaticano
      Cette vue sur la mer.
    • Zungri 🤷‍♀️
      Quand on a visité Pompéi quelques jours plus tôt, le contraste est rude — rustre. Si vous aimez les ruines troglodytes, rendez-vous plutôt en Dordogne.
    • Vibo Valentia
      Un château, des ruelles, le cagnard, plus aucun restaurant qui sert… parfois on rate un peu une rencontre avec une ville, et ce n’est pas si grave, il y a des tartelettes à la crème de pistache pour compenser.
    • Scilla 💛
      LA Scilla de Charybde en Scylla. On n’a pourtant pas l’impression d’aller de mal en pis en visitant cette jolie petite ville, puis le village de pêcheur en contrebas : une partie des maisons a ses fondations dans l’eau, comme à Venise… Une fois qu’on a laissé le car de touristes pressés prendre sa glace à prix parisien, on savoure le calme revenu, le sourire aux yeux bleus du vendeur, assortis à la mer juste là, devant laquelle s’ébat une portée de chatons sauvages. (La plage en revanche a laissé soupçonner la dangerosité de la mer, avec des rouleaux assez violents survenus de nulle part pendant une trentaine de secondes alors que tout était d’huile…)
    • Reggio di Calabria
      La grosse ville de la région, avec une grande promenade le long de la mer, plus impressionnante que belle (un petit côté quais de Seine sur la partie en contrebas). Les arbres qui la bordent sont en revanche magnifiques.

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3 nuits à Chorio

    • Chorio
      Le village n’a rien de spécifique hormis son incroyable AirBnB de nonna vintage.
    • Bova 💛
      Quelques ruines et pas mal de rénovations en tuiles et pierres, c’est mignon, fleuri, avec une improbable locomotive à vapeur sur la place principale alors qu’aucune gare n’a jamais desservi le village.
    • Pentedattilo
      Un village fantôme au pied d’une énorme roche en forme de main, auxquels quelques durs à cuire (exposition plein Sud) essayent de redonner vie. À 32° à l’ombre, on n’a pas eu le courage d’en sortir pour arpenter ce qu’il reste de rues.
    • Brancaleone
      La petite ville moderne n’a en soi aucun intérêt, mais elle abrite un  hôpital pour tortues de mer (qui viennent pondre sur les plages de environs), et Mum avait très très envie d’aller voir les tortues de mer. On y a rencontré Gaia, bambina de 2 ans en convalescence.
    • MuSaBa 👁️
      Ce musée est à voir, dixit le guide, qu’on soit ou non amateur d’art contemporain. Le guide n’a pas tort. C’est un lieu improbable, à hauteur d’un délire d’artiste : Nik Spatari a utilisé les ruines d’une abbaye médiévale pour en faire son musée (en mode, moi aussi, j’aurai ma chapelle Sixtine torturée), et investi les environs à coups de sculptures et mosaïques — une espèce de Parc Güell au milieu de nulle part.
    • Gerace 🍦
      Gerace, le village aux 100 églises, c’est un peu comme Roubaix, la ville aux 1000 cheminées : une exagération sur fond de vérité. On n’a pas compté les églises, mais il y en a tellement dans chaque village qu’on n’a pas eu l’impression d’en voir spécialement plus que d’habitude.

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2 nuits à Santa Caterina dell’Iono

    • Santa Caterina dell’Iono
      N’y entrez pas en voiture, c’est à peu près tout ce que j’ai à vous en dire.
    • Stilo
      Nous n’avons pas visité l’édifice religieux à visiter, mais depuis la terrasse attenante, nous avons profité d’une vue plongeante sur ce joli village en pierres.
    • Stevanno 🤷‍♀️
      Apparemment, Stevanno possède une plage prisée des hippocampes, mais comme on n’en a pas croisés, ce fut sans grand intérêt.
    • Tiriolo
      Depuis les hauteurs de ce village (qui ne s’appelle ni Triolo ni Tiriolet), on peut voir les deux mers, Ionienne et Tyrrhénienne… par temps clair. Ce n’était pas tout à fait le cas quand nous y sommes passées, on a deviné plus qu’aperçu les limites bleutées des horizons, mais cela donne une idée des distances, un léger vertige peut-être à confondre vastitude et étroitesse.
    • Catanzaro
      Une ville moderne qu’on n’a pas eu le courage de visiter, dans laquelle on a seulement fait étape pour déjeuner.
    • Le Castella 💛 💛
      Nous devons cette heureuse découverte à un accident routier et des travaux de voirie : ennuyée dans les embouteillages, j’ai compulsé le guide et déniché cet arrêt non prévu. C’est une station balnéaire charmante, avec des terrasses qui donnent envie de s’y attarder. Sa plage de sable dorée (dans ce coin à galets, c’est suffisamment rare pour être signalé) a pour toile de fond un château en ruine posé sur une presqu’île : on se baigne dans une carte postale.

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4 nuits à Ciro

    • Cirò 🤷‍♀️
      Le guide indiquait que ce village au cœur des vignobles était un incontournable… en oubliant de préciser qu’il l’est uniquement pour les amateurs de vin. Il faut en effet avoir un petit coup dans le nez pour trouver du charme à ces ruelles passablement glauques.
    • Cirò Marina 🍦
      Oui, mais non, peut-être, ah ? presque, mais non. L’appréciation clignote comme un néon. Il y a du potentiel pour que ce soit charmant (de grandes plages, un petit port, un bon glacier), mais ça ne l’est pas. Une fois accepté qu’il n’y a rien à voir, pourtant, et que le farniente prend le pas sur la visite, on s’y sent bien.
    • Morano Calabro 🍽️  
      Le village s’apprécie probablement davantage de loin (par l’espace qu’il occupe sur la colline) qu’entre ses ruelles (le crépi gris a moins de charme que la pierre), mais je ne puis être objective, ravie du déjeuner gastronomique que j’y ai dégusté.

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Les bonnes adresses

AirBnB

Casa Chiara Italia à Naples
On aime ou pas la thématique Vésuve des tableaux, mais l’Haussmanien napolitain, ça en jette, avec une hauteur sous plafond délirante et un énorme lustre en cristal de famille (auquel il manque quelques pampilles… cassées ou volées, l’histoire ne le dit pas).

Chez Gorgia à Chorio 
Si cet AirBnB était un programme télé chroniqué par Télérama, son genre serait quelque chose comme : appartement baroque de nonna vintage. Il y a en trop, partout, de tout, trois Bialetti dans le placard, des affichettes en série, des tasses en exposition sur la cheminée, des victuailles dans le frigo, plus plein que quand je fais le plein, des bouteilles d’huile d’olive, fraîche ou rance, des magazines étalés sur la table basse, des produits de soin dans la salle de bain, une boîte à mouchoir dans chaque pièce, une mappemonde en guise de lampe de chevet, un meuble-machine à coudre en guise de table de chevet, des bonbonnières de biscuits et de céréales, la table déjà mise à notre arrivée… Un accueil d’autant plus incroyable que la profusion du lieu contraste avec la pauvreté apparente des environs.

Casale dell’Attiva à Cirò
L’unique agriturismo de notre séjour. Malgré une nuit où les chiens de la ferme ont beaucoup aboyé, le bruit des travaux viticoles et la virulence des moustiques, j’ai adoré notre séjour dans cette maison rustique sobrement meublée (une vague réminiscence de la chambre de Van Gogh ?) et bien bouquiné dans le salon de jardin sous la tonnelle, avec le bruit des cigales et la vue sur les oliviers.

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Restaurants 🍽️  

Matteo à Naples : à emporter ou à manger sur place dans une ambiance cantine (archi climatisée), il faut goûter la pizza fritta une fois dans sa vie (mais peut-être pas deux). Intégralement plongée dans la friture, cette curiosité ressemble presque plus à un beignet qu’à une pizza, et se digère de même.

Gastronomia Focetola à Paola : la terrasse de cette charcuterie-fromagerie donne sur une place sympathique à l’entrée de la vieille ville. J’y ai découvert la confiture de cédrat, servie en sucré-salé sur une tranche de fromage grillé : un délice !

Borgo dei Greci à Buonvicino : une très bonne table, avec vue (lointaine mais idyllique) sur la mer. On m’y a servi une polenta comme je n’en avais jamais mangée, mitonnée à l’huile d’olive et aux petits légumes du jardin, servie dans une cassolette entourée de spaghettis frits, croustillants comme des gressins. Dépité que nous n’ayons plus faim après ce primo piatto, le serveur nous a offert de délicieuses bruschettas !

L’Antico Borgo à Morano Calabro : nous sommes tombées par hasard sur ce qui s’est avéré être un sacré restaurant gastronomique. Incroyable carparccio de crevettes et burrata pour Mum, tartare de saumon à l’olive noire, cédrat et bergamote confits, glace à l’huile d’olive pour moi. Nous avons pris 3 desserts pour 2 et je ne regrette rien, bien qu’il a fallu ralentir dans les tournants en reprenant la route.
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Glaciers 🍦

On mange de très bonnes glaces à peu près partout pour presque rien (2€50 le cornet) en Calabre. Voici quand même quelques gelateria qui m’ont marquée.

Mannela à Naples
Je n’ai goûté qu’une seule glace dans cette chaîne de qualité et c’était bien trop peu (je blâme la pizza fritta).
🍦Un parfum à goûter : crema Mennella, mêlant amandes et cacahuètes, mamma mia.
🍦Un parfum à éviter : cioccolato fondante. Au chocolat corsé se mêle un parfum d’orange pas du tout annoncé (apparemment c’est récurrent).

Dal Perugino à Diamante
Je n’ai pas goûté les glaces, mais le granité au cédrat était fou : très sucré et très bon.

L’Angolo del Gelato à Pizzo
Une gelateria familiale où il fait bon revenir pour déguster environ tous les parfums une fois goûté le tartuffo, entremet glacé avec un cœur de chocolat fondant (en théorie, quand on a le courage d’attendre).
🍦Des parfums à goûter : pistache et noisette parce que l’Italie, fior di latte pour l’onctuosité, stracciatella pour sa base généreuse de fior di latte, ricotta pour l’originalité.

Bar del Tocco, di Rinaldis Giuseppe à Gerace
J’y ai pris un granité, mais quand j’ai goûté la mini-brioche archi-délicieuse qui était servie avec, j’ai regretté de ne pas avoir pris la grosse brioche con gelato (remplie de glace, oui, oui). Si vous y allez, merci de me la faire manger par procuration (la pistache fonctionne très bien avec la brioche)(de rien).

L’Antico Gelateria à Cirò Marina
L’enseigne affiche les prix obtenus dans des concours de glaciers (je me propose comme jury si vous connaissez quelqu’un qui connait quelqu’un), mais ce ne sont pas nécessairement les parfums primés qui sont les meilleurs : préférez les classiques aux inventions composées. J’y ai mangé deux glaces par jour pendant trois jours ; la serveuse, adorable et amusée, m’a offert la sixième.
🍦 Un parfum à goûter : le cioccolato fondante, réellement cacaoté par rapport au cioccolato tout court.
🍦Un parfum à éviter : pistache-amande

Journal d’une demi-journée à Gent

Pas spécialement de coup de cœur pour cette ville, mais cela m’a fait du bien d’arpenter de la nouveauté, même si je me suis parfois demandé ce que j’y faisais, ce que j’y cherchais. Des angles de vues. Des curiosités. Des amusements. De l’ailleurs pas trop loin. De la saine fatigue. Du déni de tendinite.

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D’un TER à l’autre, la langue change. Je n’avais même pas songé que je ne serais plus en zone francophone. Le double nom de la ville aurait pourtant dû me faire tiquer. Gent/Gand.

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Deux minutes après être sortie de la gare, je tombe sur une boutique de danse, luxueuse. Devant l’une des cabines d’essayage, une petite fille en justaucorps à jupette opaque intégrée, flambant neuf flambant rouge lycra brillant, pirouette à répétition sur le même pied nu, en réalité tenu par une bande de résille que j’imagine appartenir au monde de la GRS. Seule l’absence de concordance entre mes envies et la disponibilité de ma taille me sauve de la ruine. Le magnifique justaucorps d’inspiration Yumiko à trois chiffres pousse la ressemblance jusqu’au bout : la plus grande taille est trop juste. I’ve come to visit the city and, stumbling on a dance store, I had to come inside. Je baragouine un truc du genre, sans stumbling. I know the feeling, me répond la vendeuse adorable, quoiqu’on ne devrait plus ou pas encore employer cet adjectif pour une femme de son âge.

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Charpentes métalliques, en français dans le texte

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Ma salade chez Botaniste ne me plaît pas trop. Des goûts qui changent certes, enfin, mais trop d’acidité. Tant pis. Je réactive la 3G pour ce qui mérite de l’être : la recherche du la best ice-cream in town. C’est chez Coco, Gianluca Ciliento (8 avis) est formel, il est italien et sait reconnaître a real Gelato. À la lisière du cœur historique, je rebrousse chemin et je fais bien : ces glaces italiennes ne sont pas seulement crémeuses de texture, mais de goût. Lait fermier entier, ouais. La pistache, mais surtout la peanut butter & jelly est une tuerie, je suis d’accord avec Jeanne M (52 avis, local guide). Je retrouve en plus frais le plaisir de ma découverte états-unienne, l’arachide allégé d’un trait sucré. Tout de suite, la ville se savoure mieux.

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Plus loin, au niveau d’un Oyya, chaîne de gaufres-glaces. Probablement dépitée par les couleurs flashy et les vagues inertes de ces glaces plus industrielles qu’italiennes, une femme qui a les lunettes et le bronzage d’une Italienne avise ma glace aux couleurs tendrement fades, et me demande d’où elle vient. J’indique le nom et vaguement la direction, ajoute un delicious en diérèses digne d’une Américaine, et déjà elle est sur le départ. J’essaye de préciser davantage l’itinéraire, mais je la retarde, l’appel du gelato est plus fort, il guidera ses pas.

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La contrepartie de cette image d’Épinal ? Le panneau « Boat tourism / Noise pollution » plus loin.

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Trop de monde, je n’ai plus l’endurance. Je trouve un coin tranquille, deux marches qui descendent au canal, juste de l’autre côté du château des Comtes et de ses environs si arpentés. Je donne sur l’effervescence et y échappe. Près de moi, juste derrière, à côté, devant en diagonale : un arbre, un pan de mur presque jaune, un bateau privé amarré, des fleurs, quelque chose comme une cannette ou un sachet devenu déchet ; en face, plus loin, sur l’autre rive : le canal transformé en douve par la tour du château, des joncs étrangement végétaux dans ce décor de pierre, et des jeunes par petits groupes de trois ou quatre sur la pelouse où je me poserai à mon tour plus tard, après un grand tour-détour.

Une embarcation de touristes arrive par la gauche. Parmi eux, un jeune homme asiatique esquisse dans ma direction un geste de la main, discret ou hésitant (le geste ou le jeune homme). J’y réponds par le même geste, sans penser que le reste des touristes va croire que je suis le jeune homme asiatique, je veux dire que c’est moi qui amorce le mouvement. Toute l’embarcation se met à me répondre, et prise par surprise à mon propre geste, je l’amplifie, nous nous faisons coucou à qui mieux mieux le temps que barque se passe. Je ne vois plus le jeune homme qui avait surgi dans le paysage de ma contemplation pour m’y réintroduire, mais le quiproquo m’a requinquée. Petit boost de gaité anodine.

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Lieu de pause, sur la rive opposée au château des Comtes

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Une touriste française lit après moi la traduction approximative du panneau présentant le château des Comtes… reniflez ici plus de mille ans d’histoire… Elle éternue et commente, flegmatique : ça doit être ça, je suis allergique à l’histoire. (Je vais pouffer intérieurement un peu plus loin.)

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Gouttière-paille

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Débusquer des photos, essayer de cadrer m’amuse beaucoup. Beaucoup moins en revanche lorsque la relation s’inverse et que la densité des monuments me somme de prendre des clichés qui ne pourront que m’encombrer, moi ou ma carte SD.

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Pour la peine, des poubelles colorées

… L’avantage d’un petit pays, c’est que la conscience de l’étranger est plus forte : on trouve des billets internationaux sur toutes les bornes de la gare.

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Dans le TER du retour, une mère joue avec une petite fille pas si petite pour le gant-marionnette qu’elles s’échangent à tour de rôle. Représentation en flamand non sous-titrée.

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Les restaurateurs ont le jeu de mots polyglotte. En plus de ce resto de poissons « je m’en fish », j’ai croisé un Miss Yu (asiatique), un Wok A Way (obvious) et un Missy Sippy (cocktails).

Nordland et îles Lofoten, le guide pratique

Après vous avoir inondé de photos sur Twitter et Instagram, voici un article avec les infos pratiques qui pourraient vous être utiles si vous décidez de vous rendre sur les îles Lofoten et d’explorer la côte du Nordland.

Feuille de route

Mum et moi avons élaboré notre itinéraire en nous aidant du guide de Lonely Planet – et de Google Maps pour estimer les temps de trajet. Le guide suggérait de faire les trajets du Sud au Nord ; pour des raisons pratiques de location de voiture et d’avion, nous l’avons fait en sens inverse. Je ne pense pas que cela change grand-chose, sauf à concevoir une excitation particulière à franchir la frontière du cercle polaire arctique.

La capitale (2 jours pleins)

  • Jour 1 : vol de Paris à Oslo
  • Jour 2 : Oslo
    // Promenade autour de l’opéra // en centre-ville // dans les jardins de la résidence royale 💛 // sur les docks 💛 // autour de la forteresse
  • Jour 3 : Oslo
    // Promenade dans le jardin botanique 💛 // le long de la rivière Akerselva // dans Grünerløkka, le quartier bobo 💛 // dans le jardin Frognerparken (avorté par l’orage)
  • Jour 4 : vol d’Oslo à Bodø et location de voiture

Nordland (3 jours)

  • Jour 5 : route côtière de Bodø à Tjong
    // le maelström de Saltstraumen 💛 // la plage de Skorvik 💛 // la mer de glace du Svartisen 💛
  • Jour 6 : route côtière de Tjong à Mosjøen
    // traversée en ferry avec repère du cercle polaire arctique // pont 💛 et la chaîne de montagne des sept sœurs à Sandnessjøen
  • Jour 7 : retour par les terres de Mosjøen à Bodø
    // rue Sjøgaden à Mosjøen // glaciers du cercle polaire arctique // Fauske

Les îles Lofoten (3 nuits à Flakstad, 3 nuits à Svolvær)

  • Jour 8 : traversée en ferry de Bodø à Moskenes
    // 3h de traversée // village d’Å // plage de Ramberg
  • Jour 9 et 10 : exploration du Sud des îles
    // village de Nusfjord // plage et église de Flakstad 💛💛💛 //  village de Hamnøy // souffleur de verre à Vikten
  • Jour 11 : route de Flakstad à Svolvær
    // Henningsvaer, plus bobo avec boutique de déco
  • Jour 12 : excursion en bateau au Trollfjord (et ses aigles de mer) 💛
  • Jour 13 : exploration du Nord des îles 💛
    // moutons, plages, montagnes


    Le retour
  • Jour 14 : ferry de Svolvær à Skutvik et retour en voiture à Bodø
    // traversée en ferry avec des vues splendides 💛💛💛 // gravure préhistorique de la pierre à Sagelva // la bibliothèque de Bodø 💛
  • Jour 15 : vol de Bodø à Oslo puis d’Oslo à Paris

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Les wow et les mouais

Wow :

  • à peu près tous les paysages incluant de l’eau (sous forme de mer, fjord, lac) et des montagnes, c’est-à-dire environ partout 🤩,
  • Saltstraumen et son maelström à observer depuis le pont,
  • les plages de Ramberg (au bord de la route) et de Flakstad 😍 (l’impression d’être au bout du monde) : du sable fin, de l’eau turquoise et la vue sur des montagnes où s’attardent des plaques de neige, c’est erreur 404 dans mon cerveau, saturé de beauté oxymorique,
  • le Trollfjord et ses aigles de mer (surtout si vous n’avez pas vu les fjords de la région de Bergen),
  • la traversée en ferry de Svolvær à Skutvik 🤩 : le profil déchiqueté des montagnes des Lofoten apparaît peu à peu dans son ensemble, puis se confond avec d’autres îles à mesure qu’on s’en éloigne, jusqu’à former à l’horizon une frise ininterrompue, blanche-bleutée de nuage, de distance et de neige.

Mouais, aka sachez à quoi vous attendre, ça peut être survendu par votre guide :

  • Mosjøen : la rue mignonne était un bonus sachant que la ville était une étape pratique dans notre périple, mais ça ne mérite pas forcément un détour ;
  • les villages de rorbuer comme Å, Nusfjord ou Hamnøy font de jolies photos, mais ce sont essentiellement des espaces touristiques (en mode dortoir tranquille ou arrêt de car). À prendre en compte également avant de réserver un rorbu dans un village de pêcheurs : l’odeur des séchoirs à morue donne rapidement envie de vomir (globalement, c’est comme si vous respiriez à pleins poumons de la nourriture pour poissons d’aquarium 🤢) ;
  • les villes de taille moyenne : les Norvégiens ont une capitale agréable et sont doués pour les villages de pêcheurs, mais les villes de taille moyenne (du genre à inclure un hypermarché), ce n’est vraiment pas leur truc, ambiance cubes juxtaposés sans plan d’urbanisme. Svolvær est foncièrement laide, attirant les touristes en ce qu’elle constitue le point de départ d’excursions en bateau et de traversées en ferry. Bodø s’en tire mieux avec son port, ses restaurants et sa bibliothèque, mais reste essentiellement une plaque tournante entre l’aéroport et les ferrys. Quant à Fauske, la ville du marbre rose, vous pouvez la zapper sans sourciller.

Ce qu’on ferait différemment a posteriori ? 

Pas grand-chose, en réalité. Peut-être :

  • trouver un hébergement dans les environs de Svolvær plutôt que dans la ville même, éventuellement plus au Nord : la partie centrale de l’île ne mérite pas spécialement de s’y attarder. Elle est beaucoup moins spectaculaire que le Nord et le Sud, et peut juste être traversée ;
  • vérifier en amont les horaires des ferrys et prévoir un hébergement sur le continent après le passage du ferry pour éviter de se lever tôt ;
  • vérifier en amont les horaires de marées pour le maelström (nous avons eu de la chance, ce n’était pas terminé lorsque nous sommes arrivées, mais à 1h près, c’était râpé)

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Moyens de transport

L’avion : il y a à peine moins de kilomètres entre Oslo et les Îles Lofoten par la route qu’entre Oslo et Paris à vol d’oiseau, d’où le choix d’un vol intérieur (RIP bilan carbone).

La voiture : difficile de faire sans, mais la circulation est loin d’être dense et le réseau si simple qu’il est difficile de se perdre. Les routes sont en parfait état, constamment refaites sous vos yeux ébahis, mesdames et messieurs. Et quand les travaux ont lieu dans un tunnel, une voiture avec un panneau Følg me vous escorte comme des VIP.
À noter que les différentes îles des Lofoten sont toutes reliées par des ponts ou des tunnels.

Les ferrys : toujours un bonheur de fluidité dans l’organisation. Même plus besoin de préparer sa CB comme c’était le cas il y a 3 ans ; les plaques d’immatriculation sont photographiées pendant qu’on attend dans la file (Mum attend la douloureuse sur son compte bancaire). On navigue comme sur des roulettes. Sur le continent du moins… pour les traversées entre les îles Lofoten et le continent, vous renseigner sur les horaires de ferry au moment de préparer votre voyage peut être une bonne idée (que nous n’avons pas eue). Cela vous évitera de flipper en voyant les ferrys de milieu de journée déjà réservés (Bodø -> Moskenes) ou de vous lever à 7h du mat’ pour prendre l’un des deux seuls ferrys de la journée (Svolvær -> Skutvik). Si vous ne trouvez pas les horaires sur le site de Torghatten, appelez-les, ils décrochent assez vite et parlent anglais.

Le vélo : on a croisé plein de gens à vélo sur les îles Lofoten et leur caractéristique commune, c’était d’avoir l’air au bout de leur vie.

Les pieds : je m’imaginais faire de belles randonnées sur les îles Lofoten, mais la vérité, c’est qu’en-dehors des promenades sur les plages et dans les villages, il n’y a pas beaucoup d’alternatives entre marcher sur le bord de la route et grimper de manière hardcore. Les rares zones de plaine sont souvent préemptées par les particuliers, et je ne me vois pas marcher chez les gens.

Le bus et le tram (à Oslo) : vous pouvez télécharger à l’avance l’application Ruter pour acheter ensuite vos billets à la volée (de mémoire, quelque chose comme 3,50€ le billet).

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Budget

Un bras ou un rein.

La monnaie est le krone, et il faut approximativement diviser les prix par 10 pour retrouver le prix en euros – pratique, jusqu’au moment où on s’aperçoit qu’on a une légère tendance à vouloir diviser par 100.

La Norvège, ça arrache, surtout si comme nous, vous êtes des princesses qui ne veulent pas faire de camping ni partager une salle de bain en rorbu (les princesses constipées aiment faire caca tranquillement). Comptez entre 95 et 150 € la nuit pour deux en hôtel ou AirBnB au mois de juin, sachant que c’est pire en juillet (le même hôtel à Bodø avait déjà pris 50 € à une semaine d’intervalle).

Pour la nourriture, c’est simple : imaginez que vous vivez à l’aéroport. À titre d’exemple, la bouteille de Coca-Cola en 500 ml coûte 3€50 (en ville comme à l’aéroport, donc), un roulé à la cannelle artisanal 5€. Dans un pays où il est difficile de trouver un plat à moins de 19€ au restaurant, le pique-nique devient vite un art de vivre.

Pratique : pas besoin de changer d’argent, tout peut se payer en carte bancaire – y compris les toilettes publiques sur la plage de Ramberg. Et quand vous avez atteint votre maximum de paiement sans contact, la machine ne bugue pas, obligeant le commerçant à recommencer l’opération : elle vous demande simplement votre code PIN.

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Covid and co

La pandémie semble ne plus avoir cours en Norvège : les rares masques croisés étaient portés par des touristes descendus de leur car. Soyez  néanmoins prévoyant et emportez une trousse à pharmacie, en y glissant des auto-tests. 8 ml de collyre pour conjonctivite m’ont coûté 30€ et les tarifs affichés à l’aéroport pour les tests Covid étaient prohibitifs : 89€ pour un antigénique, 250€ pour un PCR (certes en urgence).

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Météo et soleil de minuit

À Oslo, ça tournait autour de 20 degrés. Une température manifestement suffisante pour que les autochtones sortent les robes d’été… voire piquent une tête dans le port (eau à 14 degrés, non Bretons s’abstenir). Personnellement, je supportais très bien mon blouson et j’ai baigné quatre phalanges.

Le temps est très changeant sur les îles Lofoten, d’une heure à l’autre voire d’un versant de montagne à l’autre. Il ne faut pas perdre de vue que l’on est au-delà du cercle polaire arctique ; en juin, les températures tournent autour de 10 degrés – parfois moins en ressenti avec le vent et l’humidité. Je ne saurais que trop recommander la technique de l’oignon, testée et approuvée avec deux couches de cachemire dont un hoodie avec capuche, une mini-doudoune et un coupe-vent imperméable.

Au-delà du cercle polaire arctique, il n’y a plus de nuit : n’oubliez pas votre masque-à-yeux pour avoir une chance de dormir car il n’y a de volet nulle part et les stores occultants sont en option (je ne vous raconte pas les installations McGyver à base de coussins et de plaids que nous avons parfois réalisées…). Si, comme moi, vous êtes particulièrement sensible à la lumière, cela peut valoir le coup d’investir dans un masque comme celui-ci (cadeau du boyfriend, je l’aime d’amour) ; il évite le jour qui ne manque pas de se faire autour du nez avec les masques distribués dans les longs courriers.

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Bonnes adresses

À Oslo

  • Le café Kaffebrenneriet Birkelunden : pour les viennoiseries, mais surtout pour son chocolat chaud mousseux préparé dans un bol avec du vrai chocolat.

À Bodø

  • Thon Hotel à Bodø : le prix arrache et les chambre sont un rien kitsch avec leurs images d’aurores boréales, mais le buffet du petit-déjeuner est assez fou (des okonomiyaki, sérieusement ?).
  • Le restaurant Tiger sushi bar à Bodø : le buffet à volonté à 19€ par personne permet de se délecter de saumon norvégien à moindre coût. D’un moelleux fou, il redéfinit le concept de sushi.

Sur les Îles Lofoten

  • Ce AirBnB à Flakstad : on a eu un peu peur à l’arrivée en constatant qu’il s’agissait d’un entresol, mais tant qu’on mesure moins d’1m90, cela ne pose aucun problème. L’emplacement est fabuleux, au milieu de champs de fleurs, avec vue sur la montagne et accès direct à une plage de sable fin. Je doute que l’on trouve endroit plus paradisiaque pour se promener sous le soleil de minuit.
  • Le Kafe Friisgarden à Ramberg : les pâtisseries n’ont pas grand intérêt, mais le chocolat chaud est de bonne facture et le café lui-même est assez improbable avec sa déco vieillotte dans une maison en bois traditionnelle.
  • La compagnie Brim Explorer pour l’excursion vers le Trollfjord : plusieurs compagnies organisent cette sortie et c’est par pur hasard que nous nous sommes retrouvées avec Brim Explorer (la seule où il restait des places). Le bateau était plus moderne et spacieux que celui que nous avons vu partir à côté de nous, avec des espaces intérieurs permettant de tout voir sans attraper froid, et la guide était incroyable, pleine d’humour et d’enthousiasme sincère – le genre de personne qui a une favorite jellyfish.