Soyons snobs et polyglottes !

Cet article sera placé sous le signe de l’ « Unheimlichkeit ». 

         Mais comment ? Retirez-moi ces guillemets ! 

Cet article sera donc placé sous le signe de l’Unheimlichkeit

         Mais enfin, nous savons lire, ce terme est parfaitement compréhensible. 

Cet article *respire un grand coup* sera donc peut-être placé sous le signe d’une inquiétante étrangeté. 

         Traduction ?! employez donc le … 

Ta gueule. Terme allemand. Justement, tout le monde n’est pas obligé d’en avoir fait, ni d’avoir lu Freud. « On dirait que vous employez des termes étrangers pour faire chic. » nous sermonne la tortue (professeur de philosophie), peut-être deux minutes après avoir exposé une petite théorie sur la praxis. « Quand on emploie un terme grec, par exemple, il faut en préciser le sens et expliquer ce que le mot d’origine apporte de plus. » L’hôpital qui se moque de la charité. Ou peut-être devrais-je dire charity ?
    Il semble en effet que, pour être dans le hic et nunc (in ? mais c’est terriblement out, mes agneaux !), il faille employer à tout crin quelque expression étrangère. Comme si de rien n’était, si vous avez la classe du polyglotte ; en soulignant le mot, même et surtout si c’est à l’oral (en âjoutant des âccents circonflêxes pârtout), si vous avez la gouaillerie du snob. Certes le terme dans sa langue d’origine est parfois plus ad hoc. Il y a cependant un kairos du bon mot. Le louper, c’est montrer que vous manquez cruellement d’une constructive imagination : voilà la porte ouverte à la fétichisation du substantif et la fermentation débridée de la substance ! Vous auriez bien besoin d’un esprit de fairness, pour juger en tout probité de ce qu’apporte le terme étranger. Traduire, un processus de falsification. Laissez-moi rire. Surtout lorsqu’il s’agit d’un mot transparent. Mais vous avez raison, transparent, on risque de ne pas le remarquer : astiquez-le un peu, qu’il brille d’une aura strange.

   Moralité : Tout ceci n’est que jeu de Legos, pardon de logos. Saupoudrons joyeusement notre logos de termes tombés de tous les dictionnaires bilingues que nous pourrons trouver – c’est le crème de le crème, isn’t it ?

(En)boîte(ment) de nuit et de rangement

    Ou des effets bénéfiques d’aller en boîte le lendemain d’une nuit écourtée à son commencement pour cause de dissertation philosophique – je ne vous rappellerai pas la jouissance du point final à deux heures du matin, quand à cette magnifique question qu’est « Qu’est-ce que bien juger ? », vous pouvez déclarer l’affaire classée. Vu le caractère tardif des délibérations – je plaide coupable-, il n’est pas garanti que le procès verbal soit exempt d’erreurs judiciaires. Qu’importe : un point final, adjugé vendu, petit coup de marteau – nul besoin alors de massue pour vous endormir.

    Le lendemain matin fut particulièrement éprouvant ; l’éternité, c’est long, surtout sur la fin de la matinée. Réduites à parler des lectures guimauve-romantiques de nos dix ans. Pour s’apercevoir avec ma voisine que nous avions lu les mêmes. On ne se rend pas compte de l’ampleur du monopole dans ce domaine. Un conformisme de clichés souriants – ce serait un album familial, passe encore, mais cela relève plus de l’album d’autocollants Panini à collectionner. Voilà, voilà. Donc si un rire niais vous échappe quand votre plume vous démange, mesdemoiselles, il y a un créneau à prendre.

    Tout ça pour dire que nous étions épuisées et qu’un passage en boîte –nous passerons les délibérations sous ellipse- a fait du bien. Un prépateux, c’est comme un téléphone, il faut le vider entièrement pour que la batterie soit convenablement rechargée. [Vous mettrez la comparaison sur le compte du manque de sommeil, je suis en cours de chargement.] Et au retour : le délice du pain au chocolat encore tiède et fondant, qui n’a pas eu le temps de sécher et vous laisse les mains toutes graisseuses, la boulangerie tout juste ouverte, l’apprenti en train de fournir les présentoirs.

    J’en viens à ce que fait la raison du titre : le lien entre boîte de nuit et de rangement. Ce dernier est l’activité me tenant éveillée sans grand effort mental la plus utile que j’ai trouvée. Il faut en effet quelque chose de vraiment simple ; j’ai tout de même mis dix bonnes secondes à me demander si Montaigne, c’était avant Montesquieu (dans l’ordre alphabétique et donc sur mon étagère). L’automatisme dans la bonne humeur, voilà ce qu’il faut. Mika, donc, comme si je n’avais pas assez entendu de musique. Et le rangement de mes cours. Dissocier les cours empilés alternativement dans le sens de la longueur et de la largeur, édifiant une pile digne d’une tour de Kapla – et aussi prompte à se casser la figure. Vider chaque volet du trieur. Les ajouter au corpus du bureau  correspondant. Versions d’un côté, commentaires de textes de l’autre. Ouvrir les anneaux voraces de mon classeur de philo et lui donner en pâture l’analyse du premier livre de la Physique d’Aristote. Indigeste mais il dévore. Saisir une pochette plastique à droite, les feuilles à gauche et unir en un mariage heureux chaque texte latin à sa traduction. Bénir l’agrafeuse d’avoir mâché le travail. Mettre le dictionnaire de thème latin sur l’étagère du dessus, moins accessible. Redresser les classeurs et prendre celui qu’on vient de ranger quelques minutes auparavant pour y ajouter une feuille esseulée retrouvée dans la corbeille de papiers. Verbe – complément. Mika fait un bis puis un ter de tout son album.

Début des vacances : reeeelax, take it eeeeeaaaaaasy
Fin de vacances : no hope, no love, no glory, no happy ending ?

 

Avez-vous l’esprit de géométrie ou l’esprit de finesse ?

…. le questionnaire pascalien, fragment 512 pour les fanatiques ^^

 

Dans votre bibliothèque, les livres sont plutôt rangés :

m par ordre alphabétique d’auteur ou de titre

u par collection/ édition/ de façon harmonieuse à l’œil

q par collection et à l’intérieur de chaque collection par auteur ou si vous êtes un serial liseur d’auteur en série, par auteur et à l’intérieur de chaque auteur (enfin de son aire d’influence sur l’étagère- les entrailles, ce n’est pas trop mon tripe) par collection.

 

Vous comprenez mieux lorsque :

m on vous fait un exposé lent et structuré avec des parties bien délimitées et des articulations clairement visibles (avec tout plein de décalages dans la disposition typographique, du souligné, voire des couleurs ou soyons fous, du stabilotage en délire)

u le sujet est analysé, pris et repris, détaillé, précisé, que l’on approfondit certains points plutôt que d’autres : ainsi dans la multitude des (re)formulations, vous en trouvez toujours une percutante qui vous parle. Genre « la pièce est tombée », c’est l’illumination qui permet rétrospectivement de tout comprendre (sauf s’il s’agit de la Physique d’Aristote).

q personne ne vous explique

 

Vous réussissez mieux :

m les dissertations

u les commentaires de texte

q les deux, mon capitaine

 

Pour faire une dissertation :

m après y avoir un peu beaucoup réfléchi, avoir lu et surligné la moitié des ressources de l’Amazonie en polycopiés, vous articulez vos idées et élaborez un plan que vous étoffez au fur et à mesure ; les exemples prennent tout naturellement leur place (un petit coup d’articulation acrobatique s’ils rechignent à entrer dans la case assignée)  – et si le Ciel est avec vous, de nouvelles idées et précisions vous viennent pendant la rédaction.

u vous noircissez des pages et des pages de brouillons, en jetant les idées morcellées comme elles vous viennent. Puis vous tentez d’ordonner le magma à coups de délimitations, d’encadrés, de numéros, de sous-parties, de renvois, de flèches, barrées, puis réhabilitées, mais peut-être barrées en fin de compte, vous ne savez plus très bien. Quand cela ressemble à un champ de bataille, vous commencez à avoir un semblant de plan et partant, une vague idée de la problématique. Vous passez alors à la bataille décisive, stabilo à la main, une couleur par partie voire sous-partie et, agressés par tant d’illuminations, la mal de crâne survient, qui n’aura d’égal que celui que vous aurez dans deux jours, quand à la rédaction, il faudra jongler avec les renvois, les feuilles étalées sur votre bureau ( les jours de chance et de faible inspiration) ou par terre, la feuille désirée étant invariablement introuvable – cela vire au cauchemardesque si vos brouillons sont recto-versos.

q Vous écrivez au fil de la plume.

 

Vous êtes un littéraire (désolée Miss Me, tu peux toujours imaginer), votre profil est plutôt :

m  philosophique

u  littéraire

q  cultivé

 

Vous êtes doués pour expliquer :

m oui

u non

q merde

 

En langue, vous êtes plus à l’aise :

m dans la rigueur de l’allemand ou du latin

u dans les subtilités de l’anglais – dash !

q pour embrasser – de toute manière, vous êtes polyglotte

Vous arrivez à la fin du questionnaire :
m vous ne voyez toujours pas où je vous mèn
e ou pourquoi, il aurait mieux valu un article rédigé
u cela fait trois questions que vous cocher systématiquement le losange sans même lire
q enfin ! Ce n’est pas plus intelligent que les tests de Cosmo et c’est moins drôle

Faites-vos jeux, m’sieurs dames !

 

 

 

 

Vous avez un maximum de m : vous avez un esprit de géométrie, à vous la patience du concept ! Vous raisonnez plutôt justement et surtout, vous faites l’effort de vous arracher du sens commun pour vous orienter vers les premiers principes. Vous n’étiez pas du genre à demander toujours « Pourquoi ? » quand vous étiez petit ?

+ vous êtes logique et potentiellement organisé, éloigné du sens commun dès que vous éteignez votre télé

– à avoir trop de cases, parfois on a l’impression qu’il nous en manque une

 

Vous avez un maximum de u : vous avez un esprit de finesse (auquel viendra ou non s’ajouter un esprit de justesse dans le raisonnement). Vous saisissez en un clin d’œil et voyez dans chaque détail un foisonnement. Touche à tout ?

+ vous êtes nuancé, vous comprenez vite

– vous êtes souvent incapable d’expliquer quoi que ce soit, les autres comprennent toujours trop lentement à votre goût. Vous risquez également de tomber dans le sens commun. Et bonjour le temps passé à faire des plans de dissert.

 

Vous avez un maximum de q : vous êtes au choix :

         un anti-pascalien

         un indécis du questionnaire – maladie dont je souffre également souvent

         une personne dépourvue de cœur, au sens pascalien du terme, i.e, vous n’avez pas d’intuition et vous raisonnez comme un pied, i.e. peu et fort mal.

         un emmerdeur / un menteur / un tricheur / un vantard / un maniaque / un misanthrope / un inconscient

         un génie qui allie l’esprit de finesse à l’esprit de géométrie avec un zeste de dandysme. Risque de retomber dans le second terme ci-dessus.

*souris de toutes ses dents*

     Lorsque j’ai vu que le capuchon de mon bic crystal avait la consistance du verre dépoli, j’ai réalisé que le stylo fait office de hochet pour le khâgneux. Ce dernier y ronge son frein et ne garde de dent qu’envers le sujet.

    A Hanging, de George Orwell . Texte métaphorique de notre réaction à son égard.   

    Et 1939 arrivera-t-il donc jamais ?